Lloyd Cole livre à Rouen la version la plus sèche et la plus précise de ses chansons. Une élégance sans esbroufe, de l’humour, quelques regrets de fan – et beaucoup d’émotion.

Vendredi dernier, j’ai été entraîné par l’un de mes « bros » au concert, au 106 de Rouen, de la dernière date de la tournée française « Solo Show – 2 sets » de Mister Lloyd Cole. Et cela a eu pour effet de réveiller en moi quelques réminiscences adolescentes : du genre radiocassettes, coiffure en guidon de vélo (que j’arborais fièrement alors comme Écossais d’adoption), et… pop acidulée de ses Commotions…
Lloyd Cole nous proposait donc deux sets de près d’une heure chacun, comme sa précédente tournée de 2023, mais cette fois en format purement (c’est le mot) acoustique : très peu d’effets, juste la reverb de la console, le pop singer requalifié folk et ses deux six cordes, une Martin D‑45 et une Taylor 324 (selon la forme de leur tête). C’est un exercice très difficile, nécessitant une concentration extrême, que de jouer principalement des arpèges avec un instrument acoustique, devant un public certes conquis d’avance, mais cependant exigeant, et voulant participer à la fête. Le maestro rappellera gentiment à l’ordre les pseudo-perturbateurs d’un « Please don’t do that ! » quand certains d’entre eux (dont je fais partie) souhaitaient l’accompagner en frappant dans leurs mains ! Il interrompra même quelques secondes le bien nommé Like a Broken Record à cause d’un fan un peu trop enthousiaste…
Les deux sets seront en tout cas impeccables, comme la tenue immaculée de « Mr (ne l’appelez plus) Malcontent », constitués de chansons de ses groupes (The Commotions et The Negatives), dépouillées pour l’occasion, ou de ses efforts solo, ainsi que de belles reprises de Bowie (Can You Hear Me?) et de Cohen (Chelsea Hotel #2). Il ponctuera chaque titre d’un « Thank you, très gentil ! »… Autodérision encore lorsqu’avant de jouer Like a Broken Record, il lance : « J’ai écrit cette chanson en 2007, année de ma plus grande invisibilité ». Ou lorsqu’il qualifie chacun de ses albums de « fantastic ». Vraiment un bon gars, ce Lloyd ! Mention spéciale pour ce qui me concerne à On Pain et The Idiot, joués dans de superbes versions acoustiques, totalement différentes de celles, plus électro, présentes sur le dernier album en date de l’artiste.
Ces deux sets ont révélé Cole comme un excellent guitariste, l’interprétation dans ces conditions magnifiant son inventivité musicale, notamment dans le phrasé, le plus souvent chanté. Sans oublier son sens de l’humour, tout droit sorti de son Derbyshire natal. Certes, cela paraît toujours un peu la même chose, mais joué différemment… Comme la rythmique d’Impossible Girl, qui fait furieusement penser au Whatever d’Oasis !!
Seulement deux (petits) bémols (of course) finalement : pas de solo iconique pendant Forest Fire, ni de Jennifer She Said, l’unique chanson pour laquelle ma belle-sœur était venue !
Un bon moment pour en oublier d’autres moins joyeux. Même si ma maman était plus férue de musique classique, je pense qu’elle aurait apprécié. Ce texte lui est dédié.
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Stephan Triquet
(Merci à jungleboy pour les illustrations)
Lloyd Cole (solo) au 106 (Rouen)
Production : AEG
Date : vendredi 7 novembre 2025
Le dernier album de Lloyd Cole :
Lloyd Cole – On Pain
Label : earMUSIC
Date de parution : 23 juin 2023