Cheffe de file du groupe sortant d’opposition Révéler Rennes, vous avez annoncé repartir en campagne pour les prochaines municipales rennaises aux côtés de Charles Compagnon, le chef de l’autre formation d’opposition à la maire. Vous vous apprêtez aussi à annoncer que vous lui avez cédé la future tête de la liste d’union. Vous confirmez ?
Au préalable, je vous confirme que la campagne aux municipales démarre enfin ! Et qu’on est ravis ! Les Rennais sont impatients que les débats débutent vraiment. Ils ont soif d’échanges. Le succès de la pétition pour la sauvegarde de la patinoire Le Blizz, qui a déjà atteint 7 000 signatures, le démontre. Les habitants ont été frustrés par les six années passées emplies de faux-semblants et de fausse démocratie participative. Pour nous, ça va vraiment être l‘ enjeu de cette campagne : parler des sujets qui animent leur quotidien, leur donner la parole, permettre une confrontation autour de la vision qu’on porte pour notre ville et des projets qu’on veut défendre. Aujourd’hui, nous sortons de cette phase préparatoire de précampagne. Elle a été très riche sur les plans programmatique et politique. Nous rentrons dans le vif du sujet et ça fait du bien.
Avec Charles Compagnon comme tête de liste, donc ?
Je soutiens Charles Compagnon, oui. Clairement, le paysage rennais est fragmenté. Si chacun joue sa partie, la majorité sortante a déjà gagné. Donc, j‘ ai choisi l’union, condition indispensable, mais pas suffisante, pour gagner Rennes. Je fais ce choix par responsabilité, par cohérence et aussi par efficacité. Avec Charles, on partage un diagnostic, des valeurs et la même exigence. Donc, je fais un sacrifice personnel au profit d’un investissement collectif. Charles est le mieux placé pour conduire la liste. Il a la force de travail, la volonté, la ténacité et l‘ énergie pour s’investir à 100 % dans la campagne, comme il s’est investi à 100 % dans ce mandat.
Votre candidature aux côtés de Charles Compagnon est-elle une sorte de “ticket” ? Vous allez le présenter comme ça ?
Nous assumons notre binôme et notre duo. Sur l‘ ordre de la liste, je laisse à Charles le soin de s’exprimer. Il va le faire très prochainement (une conférence de presse est prévue ce vendredi 14 novembre, NDLR).
On sait que Charles Compagnon a annoncé vouloir être « maire à 100 % ». En cas de victoire, il ne souhaite pas cumuler ce mandat avec la présidence de la Métropole. Votre duo s’inscrit-il dans cette démarche : à lui la mairie, à vous la présidence de la Métropole ?
C‘ est un peu tôt pour le dire. Je laisserai Charles exprimer son souhait de candidature. Un duo exécutif est envisageable.
Vous présentez votre démarche comme « sacrificielle ». Dans Le Mensuel de Rennes de novembre, des membres de votre groupe estiment les chances d’une victoire très faible en mars prochain. Partagez-vous ce constat ? À quel point celui-ci a pu peser sur votre décision ?
S’il y a un enseignement que je retiens de mes plus de dix ans d’engagement politique, c’est que rien ne se passe jamais comme prévu. En réalité, oui, sur le papier, la marche est très haute. Je ne vais pas dire l’inverse. Rennes est une ville profondément ancrée à gauche. Lors des derniers scrutins, la gauche et l’extrême gauche ont obtenu des scores qui laissent peu de place à l’espoir. Maintenant, les choses bougent et elles bougent très vite. On est dans un paysage qui est très incertain. Et donc, il est tout à fait possible que les planètes s’alignent.
Donc, la faible chance de victoire n’a pas pesé sur votre décision ?
Ma décision est motivée par le souhait de ne pas reproduire les erreurs du passé. On a payé cher, Charles et moi, en 2020, notre concurrence, notre rivalité. Cela nous a coûté beaucoup d‘ énergie. On a éparpillé les bonnes volontés, les militants… On a divisé. On a perdu beaucoup de temps à essayer de nous différencier au lieu de faire campagne sur nos idées, nos projets ou de critiquer le bilan de l’équipe sortante. Cela s’est révélé être un gaspillage d’énergie et de talent. Vraiment, je ne voulais pas reproduire cette situation. C’est pour ça que j’ai pris cette responsabilité.
Vous dites que les “choses bougent beaucoup”. Pourquoi ?
Depuis l‘ annonce de l’alliance au premier tour entre les Verts et le PS, les Rennais commencent à voir qu’ils ont à faire avec une union entre des gens qui ne sont d’accord sur rien ou sur peu de choses, à part conserver leur place. Cette alliance est une coalition d’intérêts individuels. Pas un collectif porté par un élan commun. Prenez leurs divergences profondes. On ne parle pas de désaccords sur quelques sujets d’actualité ou de postures. On parle de divergences profondes sur la vision de la ville : l’avenir de la patinoire, l’usine Safran, les portillons du métro, le zénith… Sur tous ces grands projets, qui impactent la vie quotidienne des Rennais, les membres de la majorité sortante ne sont d’accord sur rien. Donc oui, ça commence à se voir. Je crois à cette prise de conscience des habitants là-dessus.
Sans compter, que LFI est clairement en mesure de perturber leurs plans. Les insoumis vont monter une liste coûte que coûte. Elle pourrait bien passer au-dessus de la barre des 10 %, synonyme de triangulaire. Dans cette équation, on a une vraie chance de victoire.
De votre côté aussi, quelqu’un peut aussi perturber vos plans… Le LR Thomas Rousseau, renâcle toujours à faire l’union avec vous…
On discute toujours. On discute d’ illeurs avec beaucoup de monde, avec LR, mais pas seulement. Notre rassemblement ira de la sociale démocratie à la droite républicaine. Et donc, on continue de travailler avec LR. Et avec toutes les bonnes volontés.
Cette idée, j’en ai entendu parler, comme tout le monde. Je note qu’aucune formation de la droite ou du centre n’y a souscrit. Cela s’explique certainement parce qu’elle est techniquement, juridiquement et financièrement infaisable. On aurait peut-être pu imaginer cela, il y a un an, pas à moins de 130 jours du scrutin.
Dans le futur programme, quels sont les principaux sujets qui relèvent de votre « touche » ?
En matière de sécurité et de tranquillité dans les quartiers, je ferai en sorte que la priorité soit de restaurer une présence humaine de proximité. Dans les transports, avec une police métropolitaine. Dans les immeubles, avec une future brigade de tranquillité résidentielle, que l’on souhaite mettre en place en coopération avec les bailleurs et la police municipale. Cela fonctionne très bien à Montpellier, une ville de gauche.
Les questions de sécurité renvoient à une approche très globale que l’on ne doit pas laisser à l’État sur lequel Nathalie Appéré a passé son temps à se défausser, sans faire preuve de volontarisme. D’autres maires ont pris le sujet à bras-le-corps et cela produit des résultats significatifs. Rennes n’est évidemment pas la seule à être touchée par des phénomènes d’insécurité mais elle reste à l’avant-dernière place des classements du nombre d’effectifs de policiers municipaux par habitant.
Sur la question des mobilités, avez-vous réussi à convaincre Charles Compagnon du bien-fondé d’étendre le métro à l’extérieur de la rocade comme vous l’aviez proposé en 2020 ?
Oui et j’en suis très heureuse. C‘ est la vie quotidienne des gens, là encore. On constate qu’aujourd’hui, on se déplace moins bien qu’hier à Rennes. Et ça n’est pas acceptable. On parle beaucoup de vélo, mais on oublie tous ceux qui n’ont pas ce type d’alternatives. Donc, oui nous souhaitons prolonger le métro au-delà de la rocade et réviser l’implantation des parkings relais. Ils sont tous concentrés dans la ville. Cela n’a pas de sens.
Évidemment, c’est un sujet de longs termes. Ce n’est pas un investissement réalisable sur un seul mandat. Pourtant, il est indispensable si on veut renouer avec le caractère visionnaire de Rennes et la projeter dans l’avenir. Il faut absolument démarrer très vite les études pour pouvoir lancer ce chantier.
Quels seraient ces prolongements ?
Dans un premier temps, desservir l‘ aéroport, jusqu’au parc-expo et même le campus de Kerlann. On peut aussi envisager une extension vers Chantepie. Cela était prévu dans le projet initial d’Edmond Hervé. Un pont a même été construit…
On détaillera nos propositions dans les semaines qui viennent. En tout cas, pour moi, c’est un sujet que je vais marteler. Idem pour la mise en place d’une ligne de bus reliant les communes de la périphérie sans avoir à passer par la ville centre. Le réseau routier est existant. Il n’y a même pas besoin de construire de route.