Le 7 novembre, Cem Yoldas a officialisé sa candidature aux municipales 2026 en tant que tête de liste du collectif « Strasbourg c’est nous ». Il compte présenter une « alternative de démocratie directe, populaire, féministe et antifasciste », à travers un programme de rupture, centré pour l’instant sur la gratuité totale des transports en commun, le gel des loyers et le désarmement de la police municipale. Rencontre.
À Strasbourg, la gauche a une nouvelle candidature. Alors que celles-ci s’accumulent ces derniers temps, « Strasbourg c’est nous » est à son tour entré dans la campagne le 7 novembre. Soutenu par le Nouveau parti anticapitaliste – l’Anticapitaliste 67, l’Union pour la reconstruction communiste, Yeni Demokratik Gençlik (Nouvelle jeunesse démocratique), « D’ailleurs nous sommes d’ici », et le Comité de soutien à la Jeune Garde Strasbourg, le collectif a désigné Cem Yoldas comme tête de liste.
Strasbourgeois depuis 10 ans, et ayant grandi en Alsace, Cem Yoldas est éducateur de prévention spécialisée au Neuhof. Un « métier qui l’a conduit là où il est », où il a pu observer « la réalité de la misère de Strasbourg, ville parmi les plus pauvres de France, où les quartiers populaires sont délaissés par les politiques publiques et victimes de discriminations et de violences policières ».
On est dans une démarche différente de ce qui se fait habituellement aux municipales.
Cem Yoldas, candidat de « Strasbourg c’est nous » aux élections municipales
Il est aussi l’un des visages de l’antifascisme strasbourgeois, étant le porte-parole de la Jeune Garde, organisation antifasciste dissoute en juin 2025 par Bruno Retailleau [décision contestée devant le Conseil d’État, ndlr]. Un engagement politique qui l’a notamment mené à lutter à Strasbourg contre le Bastion Social, mouvement néofasciste, et le bar identitaire de l’Arcadia, dont la fermeture a été obtenue en décembre 2018 après de nombreuses controverses.
Régulièrement la cible d’attaques de l’extrême droite, qui ont redoublé depuis l’annonce de sa candidature, Cem Yoldas annonce la couleur : « C’est pour cela qu’on se présente. Ce n’est pas l’extrême droite qui va décider quel candidat a une légitimité à se présenter selon sa couleur de peau. Ce n’est pas non plus l’extrême droite qui va décider qui est Strasbourgeois ou non. »
© Nicolas Kaspar / Pokaa
« Incarner quelque chose de différent de ce qu’il y a à gauche »
Cem Yoldas et « Strasbourg c’est nous » oeuvrent depuis mars 2025 à porter des réflexions pour trouver des « alternatives de démocratie directe, populaire, féministe et antifasciste ». Car initialement, ils ne souhaitaient pas porter une candidature ; ils ont surtout mené plusieurs réunions publiques pour « influencer les débats », notamment sur les sujets de l’écologie dans les quartiers populaires et sur l’islamophobie.
Finalement, s’ils ont décidé de porter une candidature, c’est parce qu’ils souhaitent « incarner quelque chose de différent de ce qu’il y a à gauche ». Un Strasbourg « populaire et antiraciste, incarné par des personnes qui sont issues d’horizons différents et des quartiers populaires ». Des « élu(e)s de combat, qui sont sans compromission et qui sont capables de résister qu’importe la force de la tempête en face ».
Notre liste est une liste antifasciste, antiraciste et de combat.
Cem Yoldas, candidat de « Strasbourg c’est nous » aux élections municipales
© Nicolas Kaspar / Pokaa
Une combattivité que Cem Yoldas explique ne pas retrouver dans les listes qui sont proposées aujourd’hui à gauche, citant les Écologistes et la France insoumise. Il accuse par exemple Jeanne Barseghian et la municipalité d’être « sourdes à toutes critiques du bilan » et « d’aller jusqu’au bout de leurs idées, quoi qu’il en coûte ».
Quant à LFI, Cem Yoldas ne les considère « pas ouverts à la discussion » et critique un « manque d’incarnation populaire et de diversité », jugeant la désignation de Florian Kobryn comme tête de liste comme une volonté de « lisser l’image du mouvement ». Affirmant aller plus loin que LFI sur les questions du logement ou des transports, il conclut : « Les Insoumis seuls ne pourront pas résister aux forces de l’argent. »
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Un programme de rupture, entre transports gratuits, gel des loyers et désarmement de la police municipale
Côté programme, les premières bases de la rupture annoncée par Cem Yoldas portent sur plusieurs « revendications très claires, travaillées depuis mars ». Dans le détail :
- La gratuité totale des transports en commun. Une « mesure écologiste et sociale pour alléger le coût de la vie et pour que les gens puissent s’adonner à des loisirs » alors que l’inflation touche tout le monde, et que « la vie est devenue extrêmement chère ».
- Un plan d’urgence social sur la question du logement. Cem Yoldas cite une réglementation de AirBnb, une rénovation thermique des logements sociaux, le gel des loyers et la baisse des loyers sur le parc social géré par les bailleurs municipaux. Il compte également remettre des concierges dans les logements collectifs pour « créer du lien social » et interdire la construction des logements privés « pour stopper la gentrification qui amène certaines populations en dehors de la ville ».
Nous sommes la seule force politique qui incarne la rupture avec les logiques capitalistes et fascisantes.
Cem Yoldas, candidat de « Strasbourg c’est nous » aux élections municipales
© Nicolas Kaspar / Pokaa
- Le désarmement de la police municipale, « parce que ce n’est pas son rôle ». Cem Yoldas fait la différence entre la police municipale et la nationale, expliquant que « armer davantage relève du populisme, et que ça ne répond pas à des problématiques de violences ». Il souhaite ainsi que la police municipale soit présente comme « une force du quotidien qui puisse aider les habitant(e)s et qui assure la tranquillité publique ».
- Un pôle d’accueil et d’accompagnement des personnes victimes de violences policières.
- Une « végétalisation égalitaire », qui amènerait des espaces de fraîcheur dans les quartiers populaires comme le Neuhof ou Elsau, où c’est encore très bétonné.
- Une médiation entre BlueCo, la direction du Racing et les associations de supporters/rices visées par les mesures de privation de liberté.
- Une « politique claire sur la question du sport dans les quartiers populaires », point noir de la municipalité selon Cem Yoldas.
© Nicolas Kaspar / Pokaa
De futures actions à venir
Dans les prochaines semaines, Cem Yoldas et le collectif « Strasbourg c’est nous » comptent aller au contact des habitant(e)s, avec du tractage, du porte à porte… Et aider celles et ceux qui ne le seraient pas à s’inscrire sur les listes électorales, alors que les municipales sont une élection où il y a généralement beaucoup d’abstention.
S’il ne veut pas pour le moment en dire plus, alors qu’il y aura sans doute des discussions à venir pour composer la liste, Cem Yoldas annonce que d’autres personnes seront annoncées le 8 décembre prochain, à l’occasion d’un premier gros meeting. Celui-ci se tiendra à la Maison des Associations, en présence de Philippe Poutou. Et on pourra en apprendre davantage sur le programme.