Ce jeudi 13 novembre, la droite et l’extrême droite au Parlement européen ont vidé le devoir de vigilance de sa substance. Ce faisant, ils ont privé l’Union européenne de l’un de ses principaux leviers pour protéger les droits des travailleurs à l’étranger, l’environnement et le climat. C’est une nouvelle preuve du virage pro-business de l’Union européenne. Le texte adopté il y a un an était très ambitieux, les grandes entreprises de plus de 1 000 employés et 450 millions d’euros de chiffre d’affaires avaient l’obligation d’évaluer les risques de violations des droits humains et environnementaux tout au long de leur chaîne de valeur.
Désormais, ce seuil est relevé. Seuls les groupes de plus de 5 000 employés et 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires sont concernés, soit moins d’un millier d’entreprises, selon le centre de ressources néerlandais sur les multinationales.
Le rapporteur du texte, le député du Parti populaire européen Jorgen Warborn, salue une simplification des règles pour les entreprises. « De toute l’histoire européenne, je pense que c’est la proposition législative qui réduit le plus les coûts pour les entreprises. Pour elle, cela représente environ 4,7 milliards d’euros d’économie », déclare le député européen.
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Les défenseurs des droits humains et de l’environnement sous le choc
Autre mesure votée ce matin, la fin du régime européen de responsabilité civile pour les entreprises. Une simplification et des économies en échange de sacrifice de la stratégie environnementale de l’UE, estiment plusieurs associations. Pour elles, c’est « une régression inacceptable » dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Les défenseurs des droits humains et de l’environnement sont sous le choc. « La société civile européenne et française est dans un état de sidération parce que c’est la première fois dans l’histoire de la procédure législative européenne qu’on a une telle alliance entre la droite conservatrice et l’extrême droite », explique Marcellin Jehl, porte-parole de l’ONG Amis de la Terre.
« Cela se fait aujourd’hui au détriment du climat, alors même que les dirigeants du monde entier sont réunis à Belém au Brésil pour parler des engagements des États et des grandes entreprises en matière climatique. On a là une vraie trahison au Parlement européen, avec des députés qui se sont alliés d’une manière inédite pour supprimer les obligations climatiques faites aux entreprises », estime-t-il.
L’industrie pétrolière et les États-Unis pointés du doigt
Les défenseurs de l’environnement pointent du doigt l’influence de l’industrie pétrolière et des États-Unis de Donald Trump, à l’instar d’Olivier Guérin de l’ONG Reclaim Finance.
« On pense notamment à l’entreprise TotalEnergies qui a envoyé une lettre très récemment à Emmanuel Macron pour lui demander de vraiment s’opposer au devoir de vigilance au niveau européen. On pense aussi à ExxonMobil qui a fait un gros lobbying auprès de l’administration Trump pour supprimer ces lois européennes. Et on a donc également l’administration Trump aux États-Unis qui a fait pression pendant plusieurs mois contre les lois européennes parce qu’elles ne seraient pas bonnes pour le business. »
Avant le vote, le chancelier allemand Friedrich Merz et le président français Emmanuel Macron avaient publiquement appelé à abroger purement et simplement le devoir de vigilance.