Adolf Hitler était atteint d’une maladie génétique rare d’ordre sexuel, d’après de nouvelles analyses ADN. (image d’illustration prise en 1940)

AFP

Adolf Hitler était atteint d’une maladie génétique rare d’ordre sexuel, d’après de nouvelles analyses ADN. (image d’illustration prise en 1940)

HISTOIRE – Le concept du documentaire a de quoi surprendre. Au Royaume-Uni, la chaîne Channel 4 va consacrer samedi une émission à Adolf Hitler et plus précisément à son ADN, rapportent plusieurs médias britanniques dont The Telegraph et The Independent ce jeudi 13 novembre. Plus de 80 ans après sa mort, Hitler’s DNA : Blueprint of a Dictator revient sur la vie du dictateur.

Leurs investigations, commencées en 2018, s’appuient sur une tache de sang retrouvée sur un tissu du bunker où le chef nazi s’est donné la mort en avril 1945. De l’ADN a été séquencé à partir de cet échantillon et les scientifiques assurent l’avoir formellement identifié comme celui d’Hitler. À partir de ces données, ils ont conclu qu’il souffrait d’un « trouble génétique » qui aurait affecté le développement de ses organes sexuels.

Ce syndrome dit « de Kallman » peut empêcher l’un ou les deux testicules de descendre – ce qui était le cas pour le dictateur d’origine autrichienne selon un rapport médical de 1923 faisant état d’un problème du genre au niveau de son testicule droit. Une information qui pourrait bien avoir fuité lors de la Seconde Guerre mondiale : une chanson populaire parmi les Anglais affirmait déjà qu’« Hitler n’a[vait] qu’un seul testicule ».

« L’ADN révèle beaucoup, mais il n’explique pas tout »

Ce trouble génétique empêche aussi la progression de la puberté et peut affecter la vie sexuelle des patients. La plupart ont des niveaux de testostérone bas ou fluctuant et jusqu’à 10 % d’entre eux ont un « micropénis ». Ce syndrome de Kallman permettrait d’expliquer le dévouement « presque total à la politique » d’Adolf Hitler, relève l’historien du nazisme Alex J Kay.

Interrogé dans le cadre du documentaire, il rappelle que le « Führer » était « la seule personne parmi tous les dirigeants nazis » qui n’avait pas d’« affaires extraconjugales ». Mais l’historien appelle aussi à ne pas tirer de conclusions hâtives, uniquement sur la base des études génétiques. « L’ADN peut nous révéler beaucoup de choses, mais il n’explique pas tout », souligne-t-il.

Si les gènes du dictateur indiquent une prédisposition aux comportements antisociaux, mais aussi un trouble de l’attention (TDAH) voire un trouble autistique, il n’est cependant pas sérieux de lier ses problèmes à sa politique sanguinaire. « Associer l’extrême cruauté de Hitler aux personnes atteintes de ces troubles risque de les stigmatiser », insiste le professeur de psychologie Simon Baron-Cohen, cité par le documentaire. « La grande majorité des personnes atteintes de ces troubles ne sont ni violentes, ni cruelles, et beaucoup sont même tout le contraire », poursuit-il.

Un documentaire d’un goût « douteux », juge le « Guardian »

Cette plongée dans l’intimité d’Adolf Hitler ne fait pas l’unanimité. Le Guardian juge dans son article que le documentaire de Channel 4 est d’un goût « douteux ». « Juste parce que les scientifiques peuvent faire quelque chose, doivent-ils le faire ? », demande le journaliste, reconnaissant cependant que « certaines des informations présentées […] contribueront au débat historique ».

Michael Le Page du New Scientist a aussi fait part de son scepticisme face à ce documentaire qu’il a « regardé pour que vous n’ayez pas à le faire ». Taclant un film « sensationnaliste » qui sous-entend que les actes d’Hitler étaient basés sur le « déterminisme génétique », il estime que « la seule chose que nous apprenons c’est qu’Hitler a le syndrome de Kallmann (…). Or les effets physiques de cette maladie varient beaucoup et il existe déjà un documentaire prouvant qu’Hitler avait un testicule non descendu. »

L’émission a notamment le mérite de faire taire une vieille rumeur qui voudrait qu’Adolf Hitler ait eu des ancêtres juifs du côté de son père, Alois, un enfant illégitime. Le doute subsistant sur l’identité du grand-père du dictateur nazi avait alimenté des théories sur une possible origine juive, laquelle aurait expliqué son antisémitisme. Cette analyse est complètement balayée par l’analyse de l’ADN du « Führer ».