Une femme qui fume et qui a plus de mal que les hommes à arrêter de fumer.Arrêter de fumer reste un défi impossible à relever pour de nombreuses femmes. © Freepik

Le tabac n’est-il plus en vogue ? Sur le papier, la tendance est positive. En 2024, selon le Baromètre de Santé publique France, 18,2 % des adultes français – de 18 à 75 ans – fumaient quotidiennement, contre 28,6% en 2014. En dix ans, ce sont ainsi quatre millions de fumeurs quotidiens qui sont partis en fumée.

En détaillant par genre, on découvre toutefois de grandes disparités. Ainsi, les hommes restent plus nombreux à fumer que les femmes (19,7% contre 15,3%). Une différence notable, qui fait dire à certains que les femmes « gèrent mieux » leur rapport au tabac. Ce n’est pas si simple. Car si l’on zoome sur l’évolution, la situation féminine n’est pas vraiment linéaire.

Le guide Tabagisme-Femme observe par exemple une remontée du tabagisme chez les femmes de 55 à 64 ans, une génération arrivée tard dans le tabac et qui en paie aujourd’hui le contrecoup.

Et lorsque l’on prend en compte l’inégalité sociale, l’image change encore. Les femmes les plus précaires, les moins diplômées ou au chômage fument nettement plus que la moyenne nationale. Ce n’est donc pas « la femme » au sens large qui a plus de difficultés à arrêter. Ce sont plutôt certaines femmes… dans certains contextes. Et c’est justement là que l’écart se creuse.

Arrêt du tabac : pourquoi c’est plus compliqué pour les femmes ?  Quand la biologie complique l’arrêt du tabac

Dans le tabagisme, le corps compte, et il ne réagit pas de manière identique selon le sexe. Le cycle hormonal, les variations d’estradiol, la périménopause… tout cela influence les émotions, le stress, l’appétence au réconfort, et donc la dépendance.

Les organismes de santé rappellent régulièrement les spécificités féminines qui existent dans la manière dont la nicotine agit, et surtout dans la façon dont on supporte son absence.

La littérature scientifique ne prétend pas que les femmes sont biologiquement plus dépendantes. Mais que certaines phases physiologiques rendent le sevrage plus fragile.

La peur de prendre du poids : un frein bien réel

On connaît la musique : arrêter de fumer, c’est respirer mieux, dormir mieux, récupérer plus vite… sauf que pour beaucoup de femmes, la cigarette est aussi liée à une peur tenace, celle de la prise de poids. Le cauchemar !!

La nicotine a un effet coupe-faim léger, et l’arrêt peut entraîner une modification de l’appétit. Rien de catastrophique, mais suffisamment pour que cela devienne un frein psychologique majeur. Le RESPADD souligne que cette crainte est fréquente et doit être prise au sérieux, car elle influence la décision d’arrêter autant que les symptômes de manque.

Ce n’est pas le poids lui-même le problème, mais ce qu’il représente : le regard des autres, l’apparence, l’injonction sociale permanente à « rester mince »… alors que la plupart des hommes apprécient les rondeurs !

La charge mentale, l’oubli de soi, le quotidien : une réalité qui pèse

Impossible d’évoquer l’arrêt du tabac sans regarder la vie derrière le paquet de cigarettes. Les enquêtes de Santé publique France montrent que le tabagisme touche davantage les personnes en situation de stress professionnel, précarité ou isolement. Or, toutes ces conditions sont statistiquement plus fréquentes chez les femmes, en particulier celles ayant des revenus faibles ou une charge familiale importante.

La cigarette devient alors une parenthèse, un souffle, un « moment pour soi » dans des journées trop pleines. Et ce rituel-là, émotionnel autant que physiologique, est difficile à lâcher.

Il serait trop simple, et injuste, de dire que les femmes ont plus de mal à arrêter parce qu’elles seraient « moins motivées ». Gestion des enfants, lessives, ménage… Elles cumulent juste davantage de contraintes quotidiennes, et parfois moins d’espace pour s’occuper d’elles-mêmes.

Arrêt du tabac : un enjeu de santé publique urgent

Ce qui rend la situation urgente, ce ne sont pas seulement les difficultés à arrêter. Ce sont les conséquences. Selon le RESPADD, les décès féminins liés au tabac augmentent régulièrement, alors que chez les hommes, ils diminuent depuis plusieurs années. Le cancer du poumon féminin, autrefois rare, suit une tendance inquiétante. Sa mortalité croît plus vite que chez les femmes que chez les hommes.

Pourquoi ? Parce que les femmes ont commencé à fumer massivement plus tard, notamment dans les années 70-80.
Les maladies arrivent donc maintenant. Et certaines auraient pu être évitées avec un sevrage plus tôt… ou mieux accompagné.

Adapter l’accompagnement : une nécessité plus qu’une option

Puisqu’on sait que les femmes ne sont pas confrontées aux mêmes problématiques, pourquoi leur proposer les mêmes outils d’arrêt ? Certains centres d’addictologie proposent déjà des suivis plus spécialisés : 

  • prise en compte du cycle, 
  • accompagnement nutritionnel, 
  • soutien psychologique ciblé, 
  • travail sur l’image de soi, sur la charge mentale.

Il ne s’agit pas de créer un « sevrage spécial femme », mais de tenir compte de leur réalité, ce qui devrait être la base de toute politique de santé. Il en va de l’espérance de vie de la gente féminine dans les décennies à venir…

À SAVOIR

Selon Santé publique France, les jeunes fument nettement moins qu’avant. Chez les 18-29 ans, le tabagisme quotidien est passé de 29,3 % en 2021 à 18,4 % en 2024. Une chute spectaculaire qui montre que les nouvelles générations entrent plus tard, et moins, dans le tabac.

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