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Rédaction Paris

Publié le

15 nov. 2025 à 6h36

Des salons feutrés de l’hôtel Ritz Paris au plus austère tribunal administratif de Paris. Celui-ci avait été saisi par un délégué syndical du prestigieux palace licencié, entre autres, pour son « comportement agressif » à l’égard de ses supérieures hiérarchiques. Le requérant – qui travaillait depuis 2018 comme « équipier » au « service hébergement » du prestigieux cinq étoiles de la place Vendôme et était « membre suppléant » au comité social et économique (CSE) – avait été licencié le 26 septembre 2024 pour « motif disciplinaire », après autorisation de l’inspecteur du travail. 

« Un comportement agressif »

Sa hiérarchie l’accusait en fait d’avoir « conduit à deux altercations » et « perturbé le fonctionnement du service ». Le 23 mai 2024, il avait traité la première gouvernante et la directrice Housekeeping de « dictateurs » et de « nazis »…

Ce « comportement agressif » était « de nature à porter atteinte à la personne et à la santé des deux salariées concernées », avait estimé l’établissement. Il lui était également reproché d’avoir passé sa pause « dans une réserve sans y avoir été autorisé », d’avoir « quitté son poste de travail pendant plus de trois heures » et d’avoir « fait charger son téléphone » dans une chambre où il travaillait, alors même qu’il « présentait des antécédents disciplinaires ».

Le salarié demande sa réintégration au sein de l’hôtel

Mais le salarié avait saisi la justice : il estimait que « la décision de l’inspecteur du travail était fondée sur certains témoignages qui n’ont pas été portés à sa connaissance » et qu’il n’avait d’ailleurs « jamais pris connaissance de la demande d’autorisation de licenciement adressée par son employeur à l’inspecteur du travail ».

« Les faits reprochés ne sont pas d’une gravité suffisante pour justifier la décision d’autorisation de licenciement » et leur « matérialité » n’est pas établie », arguait-il encore sur le fond. Il soutenait même que cette décision était « en lien avec son mandat » au CSE car les faits reprochés « suivaient de peu » son élection et il n’avait « fait l’objet d’aucune sanction auparavant ». 

Il demandait donc sa « réintégration dans son emploi et dans son mandat » et réclamait à l’Etat – dont il estimait que la « responsabilité » était « engagée » – 10 000 euros »en réparation du préjudice subi ». 

« La matérialité et le caractère fautif » des faits reprochés sont « établis », estime le tribunal administratif de Paris dans un jugement en date du 23 septembre 2025 et qui vient d’être rendu public. Le règlement intérieur de l’hôtel précise en effet qu’il est « interdit de s’introduire sans autorisation dans un office » et la « raison personnelle exceptionnelle » invoquée par le salarié pour justifier qu’il ait chargé son téléphone dans une chambre, « à savoir une opération que son fils devait subir », n’avait pas été signalée à ses « supérieurs hiérarchiques ».

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Des griefs…mais pas suffisamment graves

Concernant l’absence à son poste de travail pendant plus de trois heures, le salarié la justifiait par « une moindre activité » et assurait avoir « appelé à trois reprises la gouvernante de service pour lui demander si elle avait des tâches à lui confier ». 

Mais « l’enquête de l’inspecteur a montré que la gouvernante de service n’était pas la personne que M. X soutient avoir appelée et (…) la fiche de poste équipier (…) ne prévoit pas le système des crédits appliqué aux femmes de chambre pouvant les conduire à finir leur service plus tôt », objecte le tribunal administratif de Paris. Quant à l’altercation avec les deux salariées, « un témoin a corroboré les propos tenus » au cours de celle-ci par le requérant. 

Reste que cette altercation constitue un « fait isolé » et le salarié a « présenté ses excuses », constate le tribunal administratif de Paris. « D’autre part (…) la décision (…) ne revient ni sur le branchement du téléphone personnel dans une salle de maintenance, ni sur le temps passé dans la réserve ni sur l’absence du poste de travail pendant plus de trois heures ». Aucune « désorganisation du fonctionnement du service » n’a d’ailleurs été justifiée par l’établissement, insistent les juges. 

Et si le requérant « a déjà fait l’objet d’une convocation en vue d’une éventuelle sanction disciplinaire le 5 février 2024 après « la disparition d’une bière dans le mini-bar d’une chambre de l’hôtel », l’établissement n’avait « pas donné suite à la procédure disciplinaire » car « les éléments recueillis n’ont pas permis d’établir avec certitude l’imputabilité des faits reprochés ». 

Au final, « alors qu’aucune faute disciplinaire n’a été reprochée à l’intéressé depuis son embauche (…) les faits fautifs ne peuvent être regardés comme présentant un caractère suffisamment grave pour justifier l’autorisation de licenciement », conclut le tribunal administratif de Paris.

Les juges rejettent cependant les demandes indemnitaires du salarié et « il n’appartient pas au juge administratif d’enjoindre à la société (…) de réintégrer M. X dans son emploi et dans son mandat » : il devra donc se contenter de 1 500 euros pour le dédommager de ses frais de justice.

RB et CB – PressPepper

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