80 % des plus de 10 000 personnes qui ont recours aux conseils du CIDFF chaque année sont des femmes, « mais on accueille et on accompagne les hommes de la même manière. Eux aussi peuvent avoir besoin d’aide à l’accès au droit ou à la recherche d’emploi », explique Anna Matteoli, directrice de la structure.
« Pour nous le féminisme, c’est l’inverse de la domination »
C’est juste qu’ici, au QG départemental du CIDFF à Strasbourg, dans son antenne de Haguenau ou dans l’un des treize autres points d’accueil dans le Bas-Rhin, l’oreille est « féministe. Au sens de vouloir l’égalité entre les femmes et les hommes. Beaucoup de gens croient que le féminisme c’est vouloir prendre le pouvoir sur les hommes. Au contraire, pour nous le féminisme, c’est l’inverse de la domination. »
Créé en 1972 sous l’impulsion de Françoise Giroud, le mouvement des CIDFF s’est déployé partout en France. Celui de Strasbourg, pour l’Alsace, a été parmi les premiers, en 1975. Celui de Mulhouse, pour le Haut-Rhin, a suivi en 1982. La mission était alors de permettre la mise en œuvre concrète des objectifs posés par la première ministre chargée de la Condition féminine : promouvoir l’égalité entre hommes et femmes, aider les femmes à connaître leurs droits, et lutter contre les discriminations.
Cinquante ans plus tard, la nécessité de ces missions demeure. D’autres se sont ajoutées, ou du moins sont devenues beaucoup plus explicites : la lutte contre les violences sexuelles et sexistes (VSS) est devenue un sujet de société, et fait partie de l’éventail de prises en charge et de formations dispensées par le CIDFF, auprès de scolaires ou de professionnels. Apprendre l’égalité aux ados, former les référents VSS en entreprise (dont la nomination est obligatoire depuis 2019) ou former des membres des forces de l’ordre à écouter les victimes, autant d’actions qui constituent les maillons de la chaîne, fragile, du chemin vers l’égalité réelle.
Depuis son arrivée au CIDFF en 1997, Anna Matteoli a pu voir « beaucoup de choses évoluer dans le droit et la société. Le sujet de l’égalité a pris de l’importance. » Mais les « mais » restent nombreux.
Par exemple, « on entend de plus en plus de propos masculinistes lors de nos interventions en milieu scolaire. Les stéréotypes de genre sont très présents chez les jeunes, et le dernier rapport du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) est très inquiétant : les jeunes femmes sont de plus en plus féministes et les jeunes garçons de plus en plus masculinistes. Il y a une rigidification de l’image que beaucoup ont des rôles des uns et des autres. »
Perspectives budgétaires « anxiogènes »
Autre inquiétude de taille : les moyens de fonctionnement : « On a d’énormes difficultés à boucler nos budgets. Si l’importance de ce qu’on fait était si évidente, ça ne serait pas si difficile de trouver des moyens. L’an dernier, pour la première fois en 50 ans, on a dû faire des appels aux dons et au mécénat ! »
L’une des nouvelles difficultés est celle de la prime Ségur, obligatoire, destinée à relever le niveau de vie des employés du secteur sanitaire et social non lucratif. Intention louable pour ces métiers peu considérés et mal payés, mais réalisation plus délicate pour les associations : la prime de 183 euros mensuels par salarié coûte chaque fois 447 euros à la structure. Soit 120 000 euros en tout pour cette année « sans qu’on soit aidés pour ça. Comment on fait ? »
Pour 2025, le CIDFF67, 30 salariés, fonctionne avec 1,5 million d’euros, patchwork de subventions venant principalement de l’État (via une multitude d’interlocuteurs publics « pour lesquels il faut chaque fois constituer un dossier ») et de la CEA. Or la situation budgétaire du pays est peu réjouissante, et le serrage de ceinture qui s’annonce crée, pour Anna Matteoli, « un climat anxiogène. En termes de financements, on n’a aucune visibilité ».
Le CIDFF67 fête ses 50 ans ce samedi au Shadok, Presqu’île Malraux, à Strasbourg de 15 h 30 à 22 h. Les services assurés par les CIDFF sont gratuits. Les locaux de celui du Bas-Rhin sont au 24 rue du 22-Novembre à Strasbourg, ainsi que dans 14 autres points d’accueil et de permanence partout dans le département. Renseignements au 03 88 32 03 22 et sur https://basrhin.cidff.info/ Dans le Haut-Rhin, le CIDFF68 est installé 9a rue Schlumberger à Mulhouse et tient des permanences dans 13 autres communes et quartiers du département. Renseignements au 03 89 60 45 43 et sur https://hautrhin.cidff.info/