3 questions à Maryse Estier, la metteuse en scène de la pièce « Le Dindon » présentée au Théâtre National de Nice du 20 au 22 novembre. Découvrez ce troisième volet centré sur les liens entre possession, séduction et pouvoir.
L’actu des régions
Chaque jour, un tour d’horizon des principales infos de toutes les régions.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter « L’actu des régions ». Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité
Après avoir présenté Marie Stuart en 2024, Maryse Estier revient avec « Le Dindon » au Théâtre National de Nice du 20 au 22 novembre. Dans ce vaudeville explosif, Feydeau pousse le quiproquo à son paroxysme et s’amuse de nos travers humains, partagés entre la tranquillité du quotidien et la folie de nos passions.

Extrait de la pièce « Le Dindon » mis en scène par Maryse Estier.
•
© Carole Parodi
Nous avons posé trois questions à Maryse Estier, la metteuse en scène franco-suisse, qui a toujours été fascinée par cette pièce et son intrigue.
Qu’est-ce qui vous a inspiré pour réaliser ce vaudeville ?
Maryse Estier : « Ce qui m’a d’abord frappée, en travaillant sur Le Dindon, c’est à quel point les codes du vaudeville y sont proches de ceux du film d’horreur. La première scène est de ce point de vue édifiante : un homme essaie de s’introduire de force chez une femme, après l’avoir suivie toute une semaine. Elle crie, se débat, il la poursuit, elle tombe, elle se blesse, et au final, quoi qu’elle fasse, il entre et il est terrifiant. Par la suite, il ne cessera de s’imposer, et de faire irruption partout où l’on se croit à l’abri, dans une chambre d’hôtel, ou chez un ami.

Extrait de la pièce « Le Dindon » mis en scène par Maryse Estier.
•
© Carole Parodi
Avec mon équipe, nous avons donc largement puisé dans le répertoire du film d’horreur à la Shining, faisant du Dindon un monstre qui déforme la réalité partout où il passe, tordant le temps et l’espace comme c’est le cas dans les cauchemars.
Maryse Estier
à France 3 Côte d’Azur
Mais là où Feydeau est singulier, c’est que ce monstre mi-homme mi-animal, il nous dit qu’il ne faut pas en avoir peur, mais plutôt en rire. Chaque situation inquiétante est dégonflée par un gros gag, chaque moment de terreur est un pétard mouillé, et c’est ce mécanisme qui crée l’humour irrésistible de cette pièce, de manière assez unique dans le répertoire. »
Pouvez-vous nous expliquer le lien que vous voyez entre votre réalisation autour de Marie Stuart en 2024 et Le Dindon ?
« Il y a quand même dans les deux propositions de spectacle des points de départ et de conflit similaires : à chaque fois, les femmes s’y retrouvent malgré elles dans des situations de grands embarras, prises en otages au milieu des désirs contradictoires des hommes.
Chez Schiller, le conflit était politique, chez Feydeau, il est domestique, mais dans les deux cas les femmes se débattent pour s’en sortir tant sur le plan privé que public.
Maryse Estier
à France 3 Côte d’Azur

Extrait de la pièce « Le Dindon » mis en scène par Maryse Estier.
•
© Carole Parodi
La question de la représentation, qu’elle soit régalienne ou mondaine, semble toujours s’ajouter aux problématiques que traversent les femmes. Et dans les deux pièces, elles s’en tirent avec puissance et panache, et ce sont elles qui reprennent le pouvoir, fût-ce pour un moment, et fût-ce seulement au théâtre. »
Quels sont vos futurs projets ?
« L’année prochaine, je vais adapter « Napoline », qui est un roman en alexandrin de Delphine de Girardin, une écrivaine et dramaturge du 19ᵉ siècle. C’est un texte tout à fait à part dans les productions de son temps, tant sur la forme que sur le fond : c’est un long poème à la première personne, une femme raconte l’histoire de son amie, morte de ne pas avoir voulu compromettre ses idéaux face à la médiocrité de la société humaine.
Là aussi, il s’agit de mettre au centre du spectacle des personnages féminins complexes, mais cette fois-ci, après la fresque historique et le drame bourgeois, en explorant la forme du conte.
Maryse Estier
à France 3 Côte d’Azur
Car « Napoline », ce n’est pas que l’histoire d’une jeune fille vivant sa première déception amoureuse. C’est aussi et surtout un miroir poétique tendu à nos idéaux malmenés, et à nos rêves, chaque jour un peu plus flous, de ne plus être écoutés. »
>> « Le Dindon », du 20 au 22 novembre au Théâtre National de Nice. Une pièce de Georges Feydeau / adaptation et dramaturgie Maryse Estier et Clémence Longy / mise en scène Maryse Estier.