Sur terre, dans les airs, en mer mais aussi dans le cyberespace. Depuis quelques années, la guerre a investi le champ du numérique, avec, à la clé, une menace plus diffuse et des conflits presque invisibles aux yeux du grand public. Attaques informatiques, diffusion de fausses informations… « Le combat dans le cyberespace est déjà là. C’est notre quotidien, avec un acteur particulier, la Russie, qui cible directement les armées et d’autres entités en France », explique le général Emmanuel Naëgelen, le chef du « Comcyber », ce commandement de 500 cybercombattants, en grande majorité installés à Rennes.
Présent, ce mardi 18 novembre 2025, à la dixième European Cyber Week de Rennes, le militaire est sur ses gardes : au vu de la montée de la menace russe, il considère qu’« il faut être prêt, au-delà du combat au quotidien, à un combat de haute intensité qui pourrait arriver d’ici à deux ou trois ans ». Des propos qui font suite à ceux du chef d’état-major des Armées, le général Fabien Mandon, qui estime que l’armée française doit être « prête à un choc dans trois, quatre ans » face à la Russie. Dans ce contexte et alors que la loi de programmation militaire pour 2024-2030 prévoit 6,7 milliards d’euros en plus pour la défense en 2026, il sera nécessaire de démultiplier les capacités de cyberguerre, plaide le général Naëgelen, afin que l’armée soit en mesure d’attaquer et, surtout, de défendre ses systèmes de pilotage et de combat, aujourd’hui largement numérisés.
Écosystème breton
Dans ce grand chantier, la Bretagne aura une place clé. D’abord parce que c’est là que le Comcyber s’entraîne et opère. Ensuite parce que la région dispose d’une « grande partie des leviers » pour « passer à l’échelle », selon le général Naëgelen. En région rennaise, le Comcyber peut compter sur deux autres entités du ministère des Armées : la Direction générale de l’armement-maîtrise de l’information (DGA-MI) et ses 1 800 experts dédiés au développement d’innovations numériques pour la défense, et l’Agence ministérielle pour l’intelligence artificielle de défense (Amiad), créée en mai 2024 et qui compte déjà 150 collaborateurs.
À ces acteurs s’ajoute un tissu d’écoles, d’universités, de chercheurs et d’entreprises (plus de 10 000 salariés) coordonnés par le Pôle d’excellence cyber (PEC). Un « terreau favorable et stimulant » dont l’armée a besoin, selon l’ingénieur général de l’armement, Frédéric Bouyer, patron des experts bretons de la DGA-MI. Car c’est lui qui développe certaines des innovations utilisées par la défense hexagonale. « Nous besoin de ces innovations parce que face à nous, nous avons des attaquants qui n’arrêtent pas d’innover. Ce sont des créatifs, hélas », déplore le général Naëgelen.