Après Harry Baur, Jean Gabin, Lino Ventura et en attendant Vincent Lindon, Grégory Gadebois endosse le costume mythique de Jean Valjean. Il le fait dans une version minimaliste par rapport à l’ampleur des Misérables de Victor Hugo, mais non dénuée de profondeur.
Le film d’Eric Besnard s’intéresse aux cinquante premières pages du livre. Jean Valjean est libéré après dix-neuf ans passés au bagne. Son crime ? Avoir volé une miche de pain et tenté à plusieurs reprises de s’évader de cette machine à briser les hommes. Il en ressort pétri de haine et de violence. Chassé de partout, il trouve refuge chez Monseigneur Myriel, évêque de Digne, qui vit dans le dénuement le plus total.
Grégory Gadebois a perdu 30 kg pour le rôle, Bernard Campan porte une perruque pour incarner l’ecclésiastique. Les deux acteurs sont presque méconnaissables mais offrent leur talent à cette confrontation entre un homme dévoré par le besoin de vengeance et un autre persuadé que la bonté peut réparer les âmes. Avec une mise en scène dépouillée, une colorimétrie très grise et un casting qui ajoute deux beaux rôles féminins, la sœur de l’évêque (Isabelle Carré) et sa bonne (Alexandra Lamy), ce Valjean est une sorte de huis clos social traversé par des questions métaphysiques.
Après Louise Violet qui campait le portrait d’une femme enseignante au début des hussards de la République, Eric Besnard s’intéresse aux croyances et aux valeurs qui fondent une société, qu’elles soient religieuses ou laïques. S’il prend quelques libertés avec le texte original, le réalisateur ne trahit pas Victor Hugo dont la pertinence du discours nous interroge aujourd’hui encore sur ce qui a du prix et du sens. 1 h 38