Les éternels seconds sont parfois les plus pugnaces, bien décidés à conjurer le sort. Briguant la mairie lors du scrutin du 15 et 22 mars 2026 avec sa liste « Carros à Cœur » – non investie par le Rassemblement national – Gilles Renoux est l’un de ceux-là. En 25 ans d’engagement politique, tour à tour à l’UMP (devenu Les Républicains), le CNIP (1) et désormais élu régional du Rassemblement national (RN), le Niçois s’est déjà lancé à l’assaut des mairies de Saint-Laurent-du-Var (en 2000), et de Gattières (2006 et 2012) mais aussi des cantonales (2014) et des régionales (2015 et 2021). Il en sort candidat malheureux, sauf pour la dernière élection, où il devient conseiller RN à la Région, poste qu’il occupe toujours.

Mais cantonné à l’opposition il est voué à « regarder le train passer », selon sa formule. Ce qu’il se refuse de faire pour Carros, où il vit et travaille depuis 15 ans dans le secteur de l’impression numérique. À 66 ans, il n’envisage pas de « carrière en mairie », mais espère réaliser « toutes les promesses de campagne en un mandat, contrairement à Yannick Bernard », le maire sortant (sans étiquette), qu’il tacle copieusement.

Pourquoi n’êtes-vous pas investi par le RN ? Vous êtes pourtant l’un de ses élus à la Région…

L’investiture est contraignante. On me la payerait, je n’en voudrais même pas. Partir sans étiquette me permet de n’offusquer personne : je vise l’union des droites. Ma liste va du RN en passant par Reconquête, l’Union des droites pour la République et Les Républicains.

Si le RN vous avez investi, n’aurait- il pas froissé leur allié Éric Ciotti (UDR), soutenu par le maire sortant Yannick Bernard ?

Éric Ciotti compte ses soutiens, notamment au sein du conseil départemental, qui sera son refuge en cas de défaite dans sa course à la mairie de Nice. Si j’étais parti avec le RN, il aurait été obligé de me soutenir… Après ce que Yannick Bernard a pris comme coups pour le soutenir, ce n’était pas envisageable.

Stéphane Longin, directeur de SOS Villages d’enfants, à Carros.

Vous déplorez la dégradation des relations avec la Métropolede Christian Estrosi. Mais vous ne l’aimez pas non plus…

En se faisant frondeur, Yannick Bernard a braqué les Niçois. Nous n’avons plus aucune subvention ! De mon côté, j’ai fait passer le message à l’entourage de Christian Estrosi. On ne peut pas faire sans la Métropole.

Pourquoi dîtes-vous que la ville stagne ?

Parce que Yannick Bernard n’a porté aucun projet structurant. La maison de santé, le parc de la Tour et l’école Simone-Veil sont autant d’idées de Charles Scibetta, [le précédent maire de 2014 à 2020]. La seule paternité que Yannick Bernard peut revendiquer, c’est celle du canisite. Le reste c’est de l’entretien, sa mission de base.

Quid, alors, de la place Saint-Pierre remaniée pour 521 446 euros ?

Pour rattraper le temps perdu, il fait vite mais mal, sans chercher des subventions. Nous aurions opté pour un projet moins cher, en sous-terrain. Ça laissait la place libre aux commerçants qui sont aujourd’hui en train de mourir.

Vous souhaitez relancer l’attractivité de la zone industrielle, la première du département. Comment faire mieux que 12 500 salariés et 2,5 milliards d’euros de chiffres d’affaires par an ?

La zone industrielle peut ambitionner un rayonnement national et international. Mais il faut de la communication intensive et s’intéresser aux industriels pour leur faciliter la vie. Pourtant, le maire s’en fiche complètement, il n’est jamais là aux réunions.

Vous saluez « l’héritage Scibetta ». Alors pourquoi ne pas vous allier pas à Stéphane Revello, candidat de son ancien groupe d’opposition « Carros Ensemble » ?

Pour Stéphane [Revello], j’ai du respect mais trop de divergences. J’ai 25 ans d’expérience. Lui, manque de maturité. Ça n’empêche que c’est un jeune carrossois, plein d’ambition. Mais le maire lui fait trop facilement la leçon. Donc sa candidature ne gêne pas. Ça peut être une transaction de deuxième tour.

Un toboggan adapté aux enfants en situation d’handicap, dans le jardin des Lucioles à Carros, le 29 octobre 2025.

Si vous n’avez pas reçu l’investiture du RN, vous comptez bien capitaliser sur le score du parti lors des législatives ? En 2024, Lionel Tivoli a été élu à 64 %.

Et il n’était pas des Alpes-Maritimes ! Parce qu’on est implantés à Carros, on va faire encore mieux. Le climat est tellement favorable que ça compense la prime aux sortants. Tout ce qui se passe aujourd’hui, les coups de couteau, c’est déplorable. Mais pour nous, c’est bon. Côté sécurité, on va embaucher quatre nouveaux policiers, instaurer une brigade de nuit et une équipe cynophile.

(1) Crée en 1949, le Centre national des indépendants et paysans est le plus ancien parti de droite de France.