Une femme qui fait plutôt partie du chronotype tardif, les couche-tard.Les personnes naturellement “couche-tard” ont un rythme biologique décalé qui peut augmenter leur vulnérabilité aux troubles dépressifs. © Freepik

Certains s’endorment sans effort à 22 h. D’autres voient l’heure passer, encore et encore, sans ressentir la moindre envie de dormir. Et si vous êtes de ceux-là, vous vous êtes peut-être déjà demandé si ce rythme “à part” pouvait avoir un impact sur votre moral.

Les recherches récentes montrent que oui, les couche-tard sont statistiquement un peu plus à risque de souffrir de symptômes dépressifs. Pas parce qu’ils vivent mal, pas parce qu’ils manquent de volonté, mais simplement parce que leur horloge interne fonctionne différemment.

Du matin ou du soir, comment savoir ?  Le chronotype du matin : un rythme en phase avec la société

Certaines personnes sont naturellement du matin. Elles s’endorment tôt, se réveillent sans effort à l’aube et se sentent pleinement efficaces dès les premières heures du jour. Ce fonctionnement, qu’on appelle chronotype matinal, repose en grande partie sur des mécanismes biologiques et génétiques. 

Pour ces profils, la société, avec ses journées qui commencent tôt, ses horaires scolaires et professionnels matinaux, correspond globalement à leur rythme interne. Leur horloge biologique et leur environnement avancent ensemble et cela limite les tensions sur le sommeil et sur l’humeur.

Le chronotype du soir : un rythme décalé qui peut peser

Les chronotypes du soir, eux, suivent un fonctionnement différent. Ils s’endorment plus tard, donc se réveillent difficilement le matin et voient leur énergie monter surtout en fin de journée. C’est un vrai fonctionnement biologique, pas un défaut.

Mais la difficulté apparaît lorsque ce rythme interne se heurte au rythme social. La plupart des obligations (école, travail, transports) commencent tôt, ce qui force les couche-tard à vivre en léger décalage permanent. Avec le temps, cette désynchronisation peut perturber le sommeil, générer une fatigue persistante et fragiliser l’équilibre émotionnel.

Dépression : pourquoi les couche-tard sont-ils plus à risque ?  Quand être couche-tard devient un vrai défi pour le moral

En Finlande, une étude portant sur 18 039 adultes a montré que les personnes ayant un chronotype du soir déclaraient plus souvent des symptômes dépressifs et anxieux que les profils matinaux. Cette association restait présente même après avoir pris en compte des facteurs comme le sommeil ou certaines habitudes de vie.

Ces observations ne se limitent pas à un seul pays. Une revue scientifique publiée en 2022 dans Frontiers in Neuroscience a analysé plusieurs travaux internationaux et conclut que le chronotype du soir apparaît régulièrement comme un facteur associé à une plus grande vulnérabilité aux troubles de l’humeur.

Ces travaux ne disent pas que tous les couche-tard deviendront dépressifs, mais que ce profil est un peu plus fragile. C’est une nuance importante, mais qui mérite d’être connue.

Dépression et chronotypes : pourquoi un tel lien ?

Les chercheurs évoquent plusieurs explications, souvent complémentaires. La plus simple est le décalage constant entre le rythme interne et le rythme extérieur. Quand on se couche à 2 h du matin mais qu’on doit quand même se lever à 7 h pour travailler, le sommeil devient insuffisant, irrégulier, parfois de mauvaise qualité. Cette fatigue accumulée, jour après jour, joue clairement un rôle dans l’humeur.

Il y a aussi la lumière. Les couche-tard voient moins la lumière du matin, qui est pourtant essentielle pour stabiliser notre horloge biologique. Sans elle, le corps reste “en retard”, et l’on se sent souvent moins énergique et plus vulnérable émotionnellement.

Enfin, la nuit crée un environnement particulier. Quand tout est calme, beaucoup de personnes se retrouvent à réfléchir davantage, à ruminer, à tourner en boucle sur ce qui les inquiète. Cette tendance à ruminer le soir ou la nuit est un des facteurs qui peuvent accentuer les symptômes dépressifs.

Comment savoir si on est vraiment concerné ?

Le plus simple est souvent de regarder votre quotidien. Le “couche-tard” type n’est pas seulement quelqu’un qui traîne volontairement sur son téléphone. C’est souvent une personne qui ne ressent tout simplement pas la fatigue en début de soirée. Elle voit l’heure avancer sans que son corps n’envoie le signal du sommeil. Son énergie monte généralement quand les autres commencent à décrocher, et ses idées deviennent plus claires une fois la maison plongée dans le calme.

Le matin, en revanche, c’est plus compliqué. Le réveil sonne trop tôt, la sensation de sommeil inachevé est fréquente, et l’humeur est souvent en mode “brouillard” jusqu’à tard dans la matinée. Le week-end, cette personne dort naturellement plus longtemps sans que cela soit une grasse matinée “de plaisir”, mais plutôt un retour à son rythme interne. Elle peut aussi remarquer qu’elle réfléchit davantage le soir, parfois un peu trop, jusqu’à tourner en boucle sur ce qui la préoccupe.

Attention, cela ne dit rien de votre santé mentale, mais cela aide à comprendre comment votre rythme peut influencer votre moral lorsqu’il se heurte au rythme du monde extérieur.

Couche-tard : peut-on agir sans se forcer ?

On ne change pas complètement son chronotype, mais on peut réduire le décalage qui épuise le moral. Les spécialistes recommandent d’y aller doucement et régulièrement.

  • Avancer le réveil très progressivement, par tranches de dix à quinze minutes, pour ne pas brusquer le corps.
  • S’exposer à la lumière du matin dès que possible : ouvrir les volets, sortir quelques minutes, profiter de la lumière naturelle qui aide l’horloge interne à se recaler.
  • Limiter les écrans et les lumières fortes le soir, afin de favoriser l’endormissement.
  • Garder des horaires de sommeil réguliers, y compris le week-end, pour éviter que le décalage ne s’installe à nouveau.

Et si, malgré ces ajustements, le moral reste bas ou que la fatigue devient trop envahissante, il peut être utile d’en parler avec un médecin ou un psychologue. Cela permet de distinguer ce qui relève simplement du rythme biologique et ce qui pourrait traduire un trouble de l’humeur.

À SAVOIR

Le fait d’être couche-tard n’est pas seulement une habitude : c’est aussi lié à la biologie. Des recherches ont montré que certaines variations du gène PER3, qui aide à régler notre horloge interne, sont plus fréquentes chez les personnes qui se couchent et se réveillent naturellement plus tard. Cela confirme que ce rythme tardif est en partie inné et pas un manque de volonté.

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