Par

Fabien Binacchi

Publié le

19 nov. 2025 à 13h09

« C’est sûr que le quartier en avait besoin. C’est une bonne chose, mais c’est aussi à double tranchant pour nous, qui y habitons. » À Noailles, dans le 1er arrondissement de Marseille,des travaux de « requalification des espaces publics » se poursuivent jusqu’à fin 2027, certains craignent aussi que ce chantier attendu fasse encore grimper les prix de l’immobilier. Cette année, ils ont déjà augmenté de 9 %. On vous explique.

« Attirer encore plus de monde »

Dans le bas de la rue d’Aubagne, Salah, le gérant d’une supérette, regarde le résultat des travaux avec un enthousiasme certain : « Ça devient vraiment beau et ça va attirer encore plus de monde », espère-t-il. Des pavés recouvrent désormais la chaussée.

Entamé en septembre, le chantier mené là par la Société publique locale d’aménagement d’intérêt national Aix Marseille Provence (Spla-in AMP), vise à métamorphoser ce quartier animé mais vétuste du centre de Marseille. En novembre 2018, l’effondrement de deux immeubles avait fait 8 morts et 2 blessés.

Alors cette « requalification des espaces publics » à 10 millions d’euros, qui aura concerné toutes les rues et places de Noailles d’ici la fin de l’année 2027, est vue d’un très bon œil, sur place. L’installation nouvelle de bancs, de fontaines, d’arceaux à vélos et la plantation d’une quarantaine d’arbres sont également au programme des aménagements.

Les rues en vert sont l'objet de la première phase de travaux et celles en bleu entreront en chantier dès mi-2026.
Les rues en vert sont l’objet de la première phase de travaux et celles en bleu entreront en chantier dès mi-2026. (©Spla-in AMP)« Les prix vont encore grimper »

Rue Longue des Capucins, Karim, les bras chargés de sacs de courses, n’est pourtant pas ravi à 100 %. « C’est sûr que c’est très beau ce qu’ils sont en train de faire mais je crains que provoque aussi une nouvelle augmentation des loyers », souffle le père de famille.

C’est déjà compliqué. Ces dernières années, c’était plus cher. Et vu que maintenant, le quartier devient meilleur, il y a encore plus de monde qui va vouloir venir et les prix vont encore grimper. Depuis que j’y suis, ce que je dois payer a triplé.

Karim, habitant de Noailles

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Même peur pour Mohsen, qui vit rue de Rome. « Ces travaux, c’était vraiment obligé. Ça n’était pas propre. Mais c’est aussi à double tranchant pour nous, qui y habitons. Noailles va encore monter, forcément. Et peut-être qu’un jour, je serai obligé d’aller chercher un appartement plus loin dans Marseille. Ce serait vraiment un crève-cœur pour moi. »

Un phénomène de gentrification

Nouvelles rues, mais aussi nouveaux commerces et nouveaux habitants, Noailles, surnommé le ventre de Marseille pour son célèbre marché, subit « un certain phénomène de gentrification » que tous ces travaux « risquent encore d’accentuer », reconnaît un peu plus loin un autre riverain qui « n’est pas originaire de la ville » et qui s’est lui-même installé là il n’y a que quelques mois.

« J’y participe à ma manière et je me doute que c’est compliqué pour ceux qui voient toutes leurs habitudes chamboulées, glisse ce trentenaire. Mais, moi, je voulais absolument ce quartier parce qu’il est en plein centre-ville et surtout super vivant. Et je ne suis pas le seul. J’ai des amis qui cherchent aussi à venir s’installer ici. »

Les travaux sont terminés sur la partie basse de la rue d'Aubagne, ici ce mercredi 19 novembre.
Les travaux sont terminés sur la partie basse de la rue d’Aubagne, ici ce mercredi 19 novembre. (©Fabien Binacchi / actu Marseille)Le prix au m2 a augmenté de 30 % en 5 ans

En cinq ans, le prix moyen du mètre carré à l’achat a pris près de 30 %. Et depuis le début de l’année 2025, selon les notaires des Bouches-du-Rhône, Noailles est même l’un des quartiers de Marseille où l’augmentation est encore la plus marquée : + 9 %. Une embellie que les propriétaires qui le peuvent (si leur logement n’est pas classé F ou G et que leur bail le prévoit) seraient effectivement tentés de répercuter dans les loyers.

Et, ce, alors qu’« on est en pleine crise du logement » et que les prix sont déjà « très élevés alors que la population a un niveau de revenus très éloignés de Paris », avait appuyé la maire des 1er et 7e arrondissements Sophie Camard, au début de l’été, lors d’une descente contre les boîtes à clés des meublés touristiques installés dans l’espace public.

Ces locations qui pourraient encore tenter de plus en plus de propriétaires à Noailles, encouragé par la demande, au grand dam des habitants. Sur Airbnb, de nombreuses annonces mettent déjà en avant leur localisation dans le quartier.

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