La forêt de Sachsenwald, en Allemagne. COURRIER INTERNATIONAL
Le Sachsenwald est “idyllique, lors des journées d’automne auréolées de tons rouges, or et bruns”, lit-on sur le site de Die Welt. “Ici, à l’est de Hambourg, la famille de l’ancien chancelier de l’Empire Otto von Bismarck possède depuis plus de cent cinquante ans la plus grande forêt d’un seul tenant du nord [de l’Allemagne].”
Celui qui est considéré par beaucoup comme le père de la nation allemande a reçu ces terres boisées, d’une superficie de 7 000 hectares, de la part de l’empereur Guillaume Ier en guise de remerciement pour services rendus à la nation. Et grâce à “l’un des derniers vestiges [juridiques] de l’Empire allemand (qui a duré de 1871 à 1918)”, ses descendants ont reconverti une partie de ce bois en petit coin de paradis. Un paradis fiscal, cela s’entend.
Contrairement à d’autres propriétaires terriens, les héritiers de Bismarck bénéficient d’un statut particulier qui leur permet de contrôler le montant de la taxe professionnelle prélevée sur leur domaine, et de déterminer en partie à quoi celle-ci va servir. Un avantage pour la compagnie forestière dirigée par Gregor von Bismarck.
Et ce n’est pas tout. “Ils proposent aux entreprises la location de cabanes isolées en guise de pseudo-lieux d’exploitation, transformant ainsi la forêt en une sorte de paradis fiscal, dont les recettes servent notamment à la gestion du domaine.” Les montants demandés aux sociétés installées sur le domaine sont en effet bien inférieurs à ceux dont elles devraient s’acquitter dans le reste du Schleswig-Holstein.
“Des coûts considérables”
D’après le quotidien conservateur berlinois, ce “modèle d’optimisation fiscale attractif” est fortement critiqué depuis que l’émission satirique ZDF Magazin Royale l’a mis au jour, à la fin de l’année 2024. Les autorités du Schleswig-Holstein entendent donc mettre fin aux privilèges de la famille Bismarck en rattachant la forêt à huit communes des environs, sans pour autant exproprier complètement les héritiers du chancelier.
“Le hic, c’est qu’aucune de ces communes ne souhaite hériter de cette forêt.” Elles craignent que la division de la forêt ainsi que son entretien n’entraînent des “coûts considérables”, et menacent de porter l’affaire en justice. Face à ces critiques, les élus régionaux du Schleswig-Holstein ont récemment repoussé un vote sur le changement de statut du Sachsenwald. “Personne ne sait si cela aurait plu au ‘chancelier de fer’.”