La France et l’Allemagne ont été les deux principaux orchestrateurs, ciblant sept domaines stratégiques pour amplifier la compétitivité et la souveraineté numérique de l’UE :
- Simplification
- Marchés numériques plus équitables
- Souveraineté des données
- Biens communs numériques
- Infrastructures publiques numériques et outils open source pour l’administration publique
- Groupe de travail sur la souveraineté numérique
- IA européenne de pointe
En mettant l’accent sur la coordination et l’effet de levier des investissements du secteur privé, la France et l’Allemagne ont renforcé l’engagement en faveur de la souveraineté numérique déjà pris par les leaders technologiques européens. On peut s’interroger sur la pertinence de ces objectifs, qui s’inscrivent dans un contexte où la Commission envisage un assouplissement des règles, notamment en matière d’IA et de protection des données. L’effet de levier des investissements privés n’est pas en soi une déréglementation, mais il s’accompagne mécaniquement d’un déplacement du pouvoir vers le secteur privé, et donc d’un cadre où les exigences publiques risquent de s’affaiblir.
Le chancelier allemand Friedrich Merz et le président français Emmanuel Macron ont tous deux prononcé des discours confiants sur la souveraineté numérique en Europe. Merz la qualifie d’étape importante sur la voie vers « une Europe numérique souveraine, sûre et compétitive », soulignant l’interdépendance et la collaboration entre les secteurs économiques français et allemand avec un investissement de « 12 milliards d’euros » dans des technologies clés.
À travers des déclarations au ton très affirmé, les deux dirigeants soulignent que « l’Europe relève le défi » et qu’elle « a les atouts nécessaires pour mener l’ère numérique ». Macron évoque plus particulièrement l’accélération de l’innovation européenne, « afin de maintenir une protection des données solide et d’appeler à des conditions de marché plus équitables ».
Ces affirmations font néanmoins apparaître une tension majeure : comment l’UE peut-elle poursuivre ces ambitions tout en évitant que l’IA ne s’étende progressivement à l’ensemble de l’économie politique, puis à la société ?
Avec la probable volonté de revoir à la baisse certaines dispositions du règlement général sur la protection des données ces dernières années, on peut considérer que la déréglementation est la stratégie qui commence à être privilégiée pour stimuler le secteur technologique européen, en particulier l’IA.
On en vient alors à douter de l’efficacité réelle des règles annoncées lors de sommets comme celui de Berlin, qui génèrent beaucoup de discours mais peinent à se traduire dans les faits. Ce scepticisme est renforcé par la domination des multinationales américaines telles que Google, Meta et Microsoft. Ces entreprises disposent d’une marge de manœuvre considérable pour consolider des positions quasi monopolistiques et contourner le « principe de limitation de la finalité » du RGPD en exploitant les données des utilisateurs à leur avantage.
Le RGPD et les restrictions numériques évoquées lors du sommet sont présentés comme des outils essentiels pour préserver l’autonomie technologique de l’Europe face aux géants du numérique. Reste à savoir si ces principes seront réellement appliqués, ou s’ils serviront surtout de façade à une déréglementation progressive (voire à une mise en œuvre affaiblie) qui maintiendrait l’Union européenne dans une situation de dépendance vis-à-vis des entreprises américaines.
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