Une incursion, des protestations indigènes, un incendie et désormais un affrontement sur le pétrole : les chaotiques négociations climatiques de la COP30 entre près de 200 pays achoppent vendredi 21 novembre 2025, dernier jour du sommet, sur la question de pointer du doigt ou non les énergies fossiles. Au point que l’Union européenne évoque ouvertement la perspective d’une COP30 « sans accord », ce qui serait un échec humiliant pour le Brésil et cette première conférence climatique de l’Onu en Amazonie.
La présidence brésilienne du sommet, qui se tient à Bélem depuis la semaine dernière, a mis un projet de texte sur la table avec une grande omission : il ne contient pas le mot « fossiles » et encore moins la création de la « feuille de route » réclamée par au moins 80 pays européens, latino-américains ou insulaires.
Un texte provisoire « inacceptable »
Protestation immédiate des Européens et de leurs alliés, dont la Colombie, qui mène la bataille contre la « prolifération » du pétrole. « Ce qui est actuellement sur la table est inacceptable, a déclaré le commissaire européen au climat, Wopke Hoekstra, à des journalistes. C’est malheureux à dire, mais nous sommes vraiment face à un scénario sans accord. » « Le texte ne peut pas rester tel qu’il est », a relevé le ministre allemand de l’Environnement, Carsten Schneider.
Les pays qui ont marqué leur opposition sont l’Inde, l’Arabie saoudite et la Russie, rejoints par des pays émergents, a déclaré Monique Barbut, ministre française de la Transition écologique, à des journalistes. Pour la ministre colombienne de l’Environnement, Irene Velez Torres, la COP30 « ne peut se terminer sans feuille de route pour abandonner les combustibles fossiles ».
Le projet a aussi immédiatement été rejeté par des ONG. « C’est comme une page blanche, il y a si peu pour combler le manque d’ambition pour en rester à 1,5 °C de réchauffement, ou pousser les pays à accélérer l’action », a réagi Tracy Carty de Greenpeace. Il est « extrêmement décevant », selon WWF.
« Ceux qui doutent que la coopération soit la meilleure chose à faire pour le climat seront absolument ravis de voir qu’on n’arrive pas à nous mettre d’accord », a plaidé le président de la COP30, le diplomate André Correa do Lago. Après une nuit de consultations, il va continuer pour une journée qui s’annonce très longue. Il a la lourde tâche de mettre d’accord 194 pays et l’Union européenne, membres de l’accord de Paris, pour une adoption par consensus, comme c’est la règle aux COP.
L’hypothèse d’une prolongation
L’idée d’une « feuille de route » pour accélérer la sortie du pétrole, du charbon et du gaz, largement responsables du réchauffement climatique, est née de la frustration face au manque de concrétisation de l’engagement à une sortie progressive des énergies fossiles pris à la COP28 il y a deux ans.
Dans une année géopolitique mouvementée, avec de nombreux pays occidentaux se détournant politiquement du climat, peu comptaient sur le retour de cette question à l’ordre du jour. Mais le président brésilien, Lula, l’a relancée au début du sommet de Bélem et encore remise au centre du jeu mercredi lors de sa visite à la COP30, dopant le camp anti-pétrole.
Aucune COP n’a terminé à l’heure depuis 2003. Nombre de vétérans de ces négociations jugent probable une prolongation à Bélem.
Succession d’incidents
Jeudi, les travaux ont été retardés par un incendie qui a forcé l’évacuation du site à la mi-journée, privant les délégués de précieuses heures. Le feu s’est déclaré en plein cœur du site temporaire érigé au Parque da Cidade, constitué d’immenses tentes climatisées. En quelques minutes, de hautes flammes ont consumé une partie du toit dans le secteur des stands nationaux.
Dix-neuf personnes ont été prises en charge par les secours à cause des fumées, et deux pour des crises d’angoisse, selon le ministère de la Santé. C’est le troisième incident perturbant la conférence de l’Onu, démarrée la semaine dernière dans cette grande ville emblématique de l’Amazonie urbaine. Une incursion de manifestants indigènes puis le blocage de l’entrée avaient déjà désorganisé les travaux du sommet.