Mardi 18 novembre, le député européen Raphaël Glucksmann était l’invité de la Grande Confrontation, l’émission politique de LCI, qui promettait de le mettre «face aux Français». Lors de ce format, qui s’est terminé par un débat bruyant avec Eric Zemmour, le dirigeant de Place publique a été interrogé par un panel de Français. Au milieu des divers profils – petit patron, étudiante portant le voile, agriculteur –, l’attitude d’une intervenante a suscité les soupçons de plusieurs internautes, qui ont accusé la chaîne d’avoir fait appel à une complice de l’élu de centre gauche, pressenti pour la course à l’Elysée.
Jugée trop souriante et amicale avec Raphaël Glucksmann, qu’elle a tutoyé sur le plateau, Nelly Bouet, restauratrice «déçue par la politique», selon l’animateur David Pujadas, a été attaquée en ligne, aussi bien par des militants de droite et d’extrême droite que de La France insoumise.
Elle est accusée d’être en réalité une «coach de l’homme politique», une membre de son parti Place publique, voire une proche de Raphaël Glucksmann. En cause, un extrait durant la confrontation avec Eric Zemmour, où l’on peut lire «oh, calme-toi» sur les lèvres de cette femme, qui semble regarder en direction de Glucksmann en lui faisant des signes d’apaisement avec les mains, tandis que les deux politiciens s’écharpent.
Bidonnage sur @LCI qui a demandé à une Française anonyme de poser une question à Raphaël Glucksmann
Alors que Nelly Bouet est son amie, elle le tutoie et lui fait des signes depuis le public de se calmerpic.twitter.com/9XHo1ddXqe
— VirusWar🕊️ (@VirusWar) November 20, 2025
CheckNews a retrouvé la trace de Nelly, qui est bien à la tête d’un restaurant-café à Saint-Germain-des-Fossés, dans l’Allier. Sur son compte Facebook, elle n’affiche aucune affinité politique particulière. Idem sur son compte Twitter, inactif depuis 2014.
Contactée, Nelly Bouet rejette en bloc les accusations de proximité avec Raphaël Glucksmann : «Les gens sur Internet sont tarés, ils n’ont pas assisté au débat. Ils ne savent pas, mais par contre, ça bave.» Elle explique avoir été repérée par LCI après un portrait dans le Monde, publié en mars 2024 et consacré à la réalité des petits patrons.
A la suite de son passage dans l’émission, elle dit avoir été visée par une «vague de méchanceté gratuite» en ligne, qu’elle attribue à «la médiocrité» de certains internautes. «On nous demande de représenter les Français, leur quotidien, leurs galères. Et ce que je découvre en sortant du plateau, c’est la violence des commentaires», déplore-t-elle.
Elle insiste sur le fait qu’elle ne connaissait «personne» avant l’émission. Y compris Glucksmann : «Je ne savais même pas qui c’était.» Après avoir fait des recherches sur lui avant l’émission et à l’issue de cette dernière, elle le considère comme un «gauchiste caviar».
Sur ses échanges sur le plateau, notamment son tutoiement de Raphaël Glucksmann, elle s’explique simplement : «Je tutoie tout le monde. Ce n’est ni un manque de respect ni de la proximité. Je suis comme ça.» Durant notre échange, elle affiche cette même familiarité avec CheckNews.
Quant à la séquence où elle semble dire «calme-toi» au député européen, elle dément : «C’était le mec qui était derrière Glucksmann, qui bouillonnait. Le mec, je me suis dit : il va sauter sur le plateau, ça va partir en couille.»
Nelly Bouet, qui se définit comme «fille d’ouvrier», affirme voter blanc depuis 2017 : «Mais nos votes blancs ne sont pas pris en compte.» Elle décrit un rapport conflictuel à la politique. Après avoir voté successivement pour Chirac en 2002, Sarkozy en 2007, puis Hollande en 2012, elle s’est détournée durablement des partis et assure n’avoir jamais voté Macron : «Pour moi, il était hors de question de mettre un mec banquier qui a travaillé pour des riches.»
Sur ses affinités actuelles, elle se présente comme sensible aux discours de fermeté et de réduction des dépenses de l’Etat. «Je vais être plus du côté de Jordan [Bardella], par exemple», concède-t-elle, sans pour autant vouloir se désigner comme une de ses électrices. Elle critique Zemmour pour ses positions jugées extrêmes, citant notamment la volonté qu’il avait d’obliger les étrangers à donner des prénoms français à leurs enfants. Quand on lui parle de Jean-Luc Mélenchon, elle le qualifie rapidement d’«extrémiste», qui «attise la haine». Idéalement, elle voudrait «quelqu’un qui soutienne la France, qui […] fasse diminuer les dépenses de l’Etat, [qui] soit là pour les Français qui bossent». Sur l’immigration, elle n’est «pas contre que les gens étrangers viennent travailler chez nous, mais il faut qu’ils s’intègrent dans notre pays».
En ce qui concerne les rumeurs les plus farfelues, dont elle a eu vent, elle assure avec ironie qu’elle n’est pas la «maîtresse» de Raphaël Glucksmann : «Parce que la pauvre Léa [Salamé, journaliste et compagne de l’eurodéputé, ndlr], elle va me faire des scandales, sinon.»