Par

Antoine Grotteria

Publié le

23 nov. 2025 à 18h36

Un parapluie contre l’amnésie. En ce dimanche 22 novembre 2025, des dizaines de passants s’engouffrent dans le jardin mémoriel en hommage aux victimes des attentats du 13-Novembre 2025 à Paris. La pluie tombe avec force sur la place Saint-Gervais (4e), derrière l’Hôtel de Ville. Contraste détonnant avec la douceur printanière qui avait inondé le lieu, le 13 novembre 2025, au moment de son inauguration. Quelques jours séparent les deux instants. Pourtant, un fil mémoriel semble les faire tenir ensemble.
Les souvenirs personnels se greffent au vécu collectif. Dans les allées, Chantal repense à cet « apéro avec des amis parisiens qui s’est transformé en soirée cauchemardesque devant la télévision » depuis son domicile à Amiens (Somme). Comme elle, chacun convoque inconsciemment son expérience. Pour éviter l’oubli, la Ville de Paris a bâti ce jardin de 3500 mètres, en collaboration avec les associations de victimes. Un site « neutre » rapidement approprié par les visiteurs.

Entre plantes et blocs de granit

Pour Aude, le jardin a été parfaitement pensé. « C’est très beau d’avoir associé des éléments de granit avec de la verdure. Le message est puissant », assure cette quadragénaire parisienne, qui tenait à se rendre près de l’Hôtel de Ville après avoir effectué un footing de plusieurs kilomètres.

Composé de six stèles en forme de blocs de granit bleu, correspondant aux sites touchés par les attentats – le Stade de France, le Carillon, le Petit Cambodge, la Bonne Bière, la Belle Équipe, le Comptoir Voltaire et le Bataclan– le lieu est également constellé de plantes et d’arbres.

Cette association entre le minéral et le végétal confère au jardin une ambiance propice à la solennité.

« C’est très calme. Il n’y a quasiment pas de bruit autour »

Cyril
Rennais venu à Paris pour le week-end

« On a l’impression de sortir du chaos, mais sans le fracas. Cela apaise », exprime le touriste, devant la plaque de présentation située à l’entrée du site, en contrebas de l’église Saint-Gervais.

Le jardin vu de l'entrée de l'église Saint-Gervais, avec son grand orme de paix.
Le jardin vu de l’entrée de l’église Saint-Gervais, avec son grand orme de paix. (©AG/ actu Pairs)Une violence contenue et des émotions

L’apaisement, dix ans après les faits, ne suffit pas à contenir les émotions qui assaillent certains visiteurs. Devant le bloc du Bataclan, quelques larmes coulent. Certains déposent des bougies et des roses sous les noms des 92 victimes de la salle de concert. « On se dit que ça aurait pu être pareil pour nous », devise Grégoire, capuche sur la tête pour se protéger des intempéries. Ce Normand n’a pas hésité un instant à rallier ce lieu.

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« La mémoire, ça se construit. Si on ne fait rien, on oubliera très rapidement, surtout dans une société où tout va très vite »

Grégoire
Normand

La géographie des lieux, borné par les six stèles correspondant aux sites attaqués, est expliquée à l'entrée de l'espace.
La géographie des lieux, bornés par les six stèles correspondant aux sites attaqués, est expliquée à l’entrée de l’espace. (©AG/ actu Paris)

Une violence contenue dans ce lieu aussi poétique, avec l’érection de deux grands arbres, dont l’orme de la justice séculaire, en face du portail d’entrée de l’église. Les feuilles tombent une à une. L’hiver fait son effet. Mais la vie continue. Elle se figure même sur les plantes disséminées. Aux premières douceurs printanières, des oiseaux feront leur apparition.

La vitalité emplira les lieux, comme l’avaient souhaité les associations de victime. Interrogé par franceinfo, le président de « LifeforParis » et survivant du Bataclan, Arthur Dénouveaux, avait martelé vouloir construire ce jardin comme un site « respectueux, mais pas un lieu de tristesse » dans lequel cohabiteraient des « enfants qui s’amusent et des gens qui s’y recueille ». 

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