Les investisseurs sont en train de réorienter leurs paris vers les secteurs défensifs en prenant (un peu) leur distance avec le boom de l’intelligence artificielle. Les marchés ont mieux terminé la semaine dernière qu’ils ne l’avaient commencé grâce à la résurrection du scénario de baisse de taux de la Fed dès décembre. Les jours qui viennent seront marqués par le retour de quelques statistiques aux Etats-Unis après la fin du shutdown et par une semaine boursière américaine tronquée par l’enchaînement jeudi férié de Thanksgiving / Black Friday.
Les marchés actions ont souffert la semaine dernière, mais ça aurait pu être pire. Le rebond du marché américain vendredi a un peu adouci la facture, même si le bilan hebdomadaire reste largement négatif. En Europe, le Stoxx Europe 600 a ainsi perdu 2,2%. Aux Etats-Unis, le S&P 500 a lâché 2% sur la semaine. C’est la troisième d’affilée en territoire négatif pour l’indice large américain, qui n’est plus tellement habitué à baisser.
Les deux côtés de l’Atlantique sont confrontés à un double mouvement identique : une tendance de fond légèrement optimiste couplée à un arbitrage aux dépens des secteurs phares de l’année et en faveur des compartiments plus défensifs. La principale différence entre le S&P 500 et le Stoxx Europe 600, c’est que ces secteurs phares ne sont pas tout à fait les mêmes.
Aux Etats-Unis, c’est la thématique IA qui a pris une petite déculottée, en particulier via les vendeurs de puces. L’ETF Invesco PHLX Semiconductor a perdu 6% la semaine dernière, après avoir déjà lâché 1,9% et 4% au cours des deux semaines précédentes. Bilan des courses, son passif atteint 11,4% sur le mois de novembre, ce qui constituerait sa pire performance depuis septembre 2022 (juste avant le boom ChatGPT). Les investisseurs sont conscients qu’une forme de bulle spéculative entoure l’IA, mais ils pensent toujours que c’est une opportunité inratable. Ça ressemble un peu au mythe du fruit défendu.
En Europe, les deux moteurs de la performance 2025 sont moins funky et un peu à sec : ce sont la banque et la défense. La perspective d’un accord de paix en Ukraine (dont je vais parler un peu après) a pesé sur les vendeurs d’armes. L’indice MSCI Aéronautique et défense a perdu 5,7% la semaine dernière et un peu plus de 8% sur le mois de novembre. Depuis le déclenchement du conflit, seul le mois de juin 2024 (-8,5%) s’est avéré plus négatif. Côté secteur bancaire, c’est moins spectaculaire, mais la baisse a atteint 3,3% la semaine dernière, et même 6% par rapport au record du 13 novembre.
En Europe comme aux Etats-Unis, ce sont les secteurs de la Santé et de la Consommation de base qui ont profité de la rotation. Sans surprise, puisqu’ils passent pour être les plus défensifs en cas de coup dur. Le mouvement avait été esquissé il y a dix jours. Il a pris un peu plus de corps la semaine dernière, en dépit d’un curieux revirement du marché, vendredi.
La dernière séance de la semaine dernière avait tout du traquenard. Le moral des investisseurs était fragile, la volatilité était élevée et c’était la séance de compensation mensuelle (3e vendredi du mois), propice à des changements de paris sur le marché des options. Le genre de séance qui peut se terminer à -3%, d’autant que les indicateurs avancés faisaient le yoyo depuis des heures. Et puis John Williams a surgi. Non, pas le John Williams de la musique de Star Wars, des Dents de la Mer et de Harry Potter. Le John Williams de la Fed, celui qui a dit vendredi qu’il y a de la place pour une baisse des taux de la Fed le 10 décembre prochain, alors que le marché commençait à tirer une croix dessus. Comme c’est un membre important de la banque centrale américaine, les financiers en ont conclu qu’il avait été envoyé en éclaireur pour adoucir un peu le message ferme envoyé par la Fed dernièrement. L’effet a été assez spectaculaire. La probabilité d’une baisse de taux dans trois semaines est passée de 36 à 70%. John Williams a donc bien troqué sa baguette de chef d’orchestre contre une baguette magique.
On en a déjà parlé la semaine dernière, les taux vont redevenir l’obsession du marché à court terme. Les résultats trimestriels ont rendu leur verdict et le force de traction de l’IA est abîmée. Restent les taux directeurs, dont la baisse serait synonyme de soutien à l’économie.
Pour les amateurs de signaux avancés, Bank of America estime désormais que la Fed va capituler sur les taux quoi qu’il arrive, parce que la liquidité financière est en train de se contracter alors que les actifs risqués sont encore valorisés comme si elle restait abondante. Les premiers signes de stress sont apparus sur les cryptos, les spreads et la baisse des banques et des courtiers en bourse. Pour éviter un choc systémique, la Fed sera forcée de baisser les taux plus vite et plus fort que prévu, selon BofA, qui signale deux indicateurs de stress à surveiller pour que la capitulation soit quasi-certaines : un passe de l’indice KBW Nasdaq Bank Index sous les 140 points (actuellement 148) ou du NYSE Arca Securities Broker/Dealer Index sur les 950 points (actuellement 968).
Les infos à ne pas rater pour bien commencer la semaine
- Les USA et l’Ukraine disent avoir élaboré une « nouvelle version » du plan de paix asséné par Washington vendredi, qui faisait la part belle à la Russie. Le secrétaire d’Etat Marco Rubio s’est montré satisfait des progrès et a précisé que la date limite du 27 novembre fixée par Donald Trump pour un accord n’est pas gravée dans le marbre. Comme souvent, la Maison Blanche semble avoir surjoué la pression pour obtenir des concessions supérieures à ce qu’elle estimait pouvoir atteindre par des procédés moins brutaux.
- Moody’s a relevé la note crédit souveraine de l’Italie de Baa3 à Baa2, perspective stable.
- En France, l’Assemblée nationale rejette la partie « recettes » du budget 2026.
- Au Japon, le marché spécule sur une hausse de taux de la BoJ après une série d’indicateurs en ce sens.
- Sur l’agenda macro : aux Etats-Unis, les prix à la production et les ventes de détail de septembre seront annoncées le mardi 25 novembre, tandis que les commandes de biens durables seront dévoilées le mercredi 26 novembre. En Europe, c’est la journée de vendredi qui sera scrutée de près avec les taux d’inflation préliminaires de novembre de la France et de l’Allemagne.
- Sur l’agenda des sociétés : Agilent, Alibaba, Dell, Compass, Deere et The Kroger font partie des dernières grosses publications de la saison.
En Asie Pacifique, Hong Kong rebondit de 2% et l’Australie de 1,3% pour démarrer la semaine. Les autres places sont plus mitigées. L’Inde, Taiwan et la Corée du Sud sont en progression modeste. Le marché japonais est clos pour un jour férié. Les indicateurs avancés européens achètent le rebond de Wall Street vendredi : les places du vieux continent sont attendues en hausse à l’ouverture.
Le CAC 40 démarre la journée en hausse de 0,6% à 8 033 points. Le SMI s’adjuge 0,6% à 12 705 points. Le Bel 20 prend 0,3% à 5 012 points.
Les temps forts économiques du jour
Les indicateurs PMI flash de novembre pour les grandes économies seront publiés tout au long de la journée, avec l’indice de confiance de l’Université du Michigan (16h00) et quelques discours de banquiers centraux US (Williams, Barr, Logan, avant 15h00). Tout l’agenda ici.
Les cotations sont celles du jour autour de 7h00, les liens permettent d’avoir le temps réel :
Les principaux changements de recommandations
- 1&1 : New Street Research passe de neutre à vendre avec un objectif de cours réduit de 22 à 13 EUR.
- Akzo Nobel : Bernstein passe de surperformance à performance de marché avec un objectif de cours réduit de 64 à 59 EUR.
- Amundi : Morgan Stanley reste à pondération de marché avec un objectif de cours relevé de 70,80 à 82,10 EUR.
- Bridgepoint Group : Morgan Stanley passe de pondération de marché à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 340 à 360 GBX.
- Compagnie Financière Richemont : HSBC maintient sa recommandation d’achat et relève l’objectif de cours de 190 à 205 CHF.
- Crédit Agricole : Morgan Stanley reste à pondération de marché avec un objectif de cours relevé de 18 à 19 EUR.
- Eiffage : Barclays reste à surpondérer avec un objectif de cours réduit de 145 à 140 EUR.
- EssilorLuxottica : Barclays reste à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 345 à 365 EUR.
- Inditex : RBC Capital passe de performance de marché à surperformance avec un objectif de cours relevé de 49 à 52 EUR.
- Inwido : SB1 Markets démarre le suivi à l’achat avec un objectif de cours de 205 SEK.
- KBC Groupe : Morgan Stanley passe de surpondérer à pondération de marché avec un objectif de cours relevé de 122 à 126 EUR.
- MBB : Bankhaus Metzler démarre le suivi à l’achat avec un objectif de cours de 230 EUR.
- MTU Aero Engines : Bankhaus Metzler passe de conserver à acheter avec un objectif de cours relevé de 400 à 406 EUR.
- Nemetschek : Jefferies démarre le suivi à l’achat avec un objectif de cours de 110 EUR.
- Ocado : RBC Capital maintient sa recommandation de sousperformance et réduit l’objectif de cours de 240 GBX à 155 GBX.
- Relx : Investec passe de conserver à acheter avec un objectif de cours de 4000 GBX.
- Saint-Gobain : DZ Bank reste à accumuler avec un objectif de cours réduit de 110 à 100 EUR.
- Sika : Citi passe de neutre à acheter et réduit l’objectif de cours de 190 CHF à 180 CHF.
- Société Générale : Morgan Stanley reste à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 68 à 69 EUR.
- Sodexo : Barclays reste à pondération de marché avec un objectif de cours réduit de 63 à 51 EUR.
- Soitec : Citi maintient sa recommandation de vente et réduit l’objectif de cours de 36 EUR à 20 EUR.
- Solaria Energia : RBC Capital passe de surperformance à performance de marché avec un objectif de cours relevé de 14 à 18 EUR.
- Standard Chartered : Morgan Stanley passe de pondération de marché à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 1718 GBX à 1848 GBX.
- Stellantis : Evercore ISI reste à performance de marché avec un objectif de cours relevé de 9 à 10 EUR.
- Talanx : Oddo BHF passe de sousperformance à neutre avec un objectif de cours relevé de 105 à 112 EUR.
- TeamViewer : Bankhaus Metzler reste à acheter avec un objectif de cours réduit de 17 à 13 EUR.
- Teleste : Inderes passe d’alléger à accumuler avec un objectif de cours de 4,10 EUR.
- Ubisoft Entertainment : Gilbert Dupont reste à accumuler avec un objectif de cours relevé de 7,10 à 7,70 EUR. TD Cowen reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 14 à 9 EUR.
- Vicat : Citi reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 63 à 69 EUR.
- Vinci : Barclays reste à surpondérer avec un objectif de cours réduit de 140 à 136 EUR.
- Wacker Chemie : Deutsche Bank passe de conserver à vendre avec un objectif de cours réduit de 63 à 60 EUR.
En France
Annonces importantes (et moins importantes… Je précise que les informations sont données à chaud avant l’ouverture et ne préjugent pas de la couleur des actions pendant la séance)
- LVMH renfloue Le Parisien/Aujourd’hui en France à hauteur de 150 millions.
- EssilorLuxottica serait intéressé par l’acquisition d’une participation de 5% à 10% dans la maison de couture italienne Giorgio Armani, selon Il Sole 24 Ore.
- TotalEnergies envisagerait de vendre jusqu’à 6% du capital d’Adani Green Energy.
- Thales, CNN MCO et CS (Sopra) vont moderniser les trois porte-hélicoptères de la Marine Nationale.
- BNP Paribas lance son programme de rachat d’actions.
- Ubisoft finalise son accord avec Tencent et récupère 1,2 MdEUR.
- Casino pourrait lancer une augmentation de capital de 300 MEUR pour renforcer son bilan.
- Compagnie Chargeurs va céder Novacel à KPS Capital Partners.
- L’AMF déclare conforme le projet d’offre publique d’achat simplifiée d’EQT visant les actions de Waga Energy.
- La Compagnie Vranken va apporter la marque Pompadour sous licence à Vranken-Pommery.
- Poxel
- Les principales publications du jour : Inventiva… Le reste ici.
Dans le vaste monde
Annonces importantes (et moins importantes)
D’Europe
- Julius Bär met en garde contre une baisse du bénéfice net pour l’exercice 2025.
- Prosus améliore ses semestriels mais publie sous les attentes.
- UBS Group travaille d’arrache-pied pour rester une banque internationale basée en Suisse, selon son CEO.
- Babcock à la tête d’un partenariat maritime de 4 milliards de livres sterling entre le Royaume-Uni et l’Indonésie.
- Bayer annonce des résultats positifs pour son anticoagulant après un revers en 2023.
- AstraZeneca prévoit d’investir 2 milliards de dollars dans une usine au Maryland (Etats-Unis).
- CaixaBank achève son programme de rachat d’actions de 500 millions d’euros.
- SGS rachète l’australien Information Quality.
- Fagron se développe en Pologne et en Hongrie.
- Assa Abloy acquiert International Door Products aux Etats-Unis.
- Sandoz lance un biosimilaire de l’Eylea en Europe.
- Les principales publications du jour : Prosus, Julius Bär…
D’Amérique du Nord
- L’administration Trump envisage d’autoriser l’envoi des puces d’IA H200 de Nvidia en Chine.
- Le gouvernement US demande le démantèlement de l’activité publicité de Google.
- Exxon Mobil suspend ses projets de construction d’une grande usine de production d’hydrogène sur le site de Baytown.
- Barrick Mining en pourparlers pour reprendre le contrôle d’une gigantesque mine d’or au Mali.
- Donald Trump veut faire pression sur Continental Edison pour que le producteur d’énergie baisse ses prix.
- Tyson Foods va fermer son usine de transformation de viande bovine du Nebraska et convertir son site du Texas en une usine à équipe unique.
- Les principales publications du jour : Alimentation Couche-Tard, Agilent Technologies, Keysight Technologies, Zoom Communications, Woodward…
D’Asie et d’ailleurs
- BHP a relancé sa tentative d’acquisition d’Anglo American, mais les deux entreprises ont fini par abandonner le projet, ont-elles annoncé.
- Les actions du fabricant chinois de puces IA Cambricon sous pression après la rumeur d’une autorisation américaine d’autoriser Nvidia à vendre des puces H200 en Chine.
- Lenovo constitue des stocks de puces pour faire face à une pénurie « sans précédent » à cause de la demande IA.
- Neoenergia vend la centrale hydroélectrique Dardanelos à EDF pour 463 millions de dollars.
- Les principales publications du jour : Siemens Energy India…
Le reste de l’agenda mondial des publications ici.
Lectures