Sans le leader Jannik Sinner et son lieutenant Lorenzo Musetti, l’Italie a été sacrée sans discussion, à domicile, pour décrocher un troisième titre d’affilée. Une domination implacable.
Déjà victorieuse 2-0 de l’Autriche en quart de finale, et de la Belgique sur le même score en demi-finale, la sélection hôte n’a pas perdu le moindre match durant la phase finale. Les Transalpins ont décroché dimanche face à l’Espagne leur quatrième Saladier d’argent dans la compétition, après ceux de 1976, 2023 et 2024. Le tout avec une équipe B. Aucune nation n’avait gagné trois années de suite l’épreuve par équipes depuis les États-Unis, vainqueurs de cinq éditions consécutives entre 1968 et 1972. Lauréate par ailleurs chez les filles de la Billie Jean King Cup (ex-Fed Cup) pour la deuxième année d’affilée, l’Italie a la mainmise sur les deux principales compétitions par équipes du tennis mondial. Tout sauf un hasard.
Un sacré réservoir
L’Italie s’est trouvé une nouvelle idole à Bologne en la personne de Flavio Cobolli, qui a apporté le point du titre face à Jaume Munar en finale (1-6, 7-6, 7-5). Contre la Belgique (tombeuse de la France), le Florentin de 23 ans avait effacé sept balles de match contre Bergs avant de s’imposer aussi au bout du suspense. Dans l’ombre de Musetti et bien évidemment de Sinner, Cobolli actuel 22e mondial et numéro 3 italien, serait leader du tennis français. Si la France a plus de joueurs dans le top 100 (12 contre 8), l’Italie en place 5 dans le top 25, contre… 0 pour la France, même si Fils et Humbert, quand ils en auront fini avec leurs blessures, pointaient dans le top 20, il y a quelques mois. Matteo Berrettini, finaliste de Wimbledon 2021, mais plombé par les blessures ces dernières années, a parfaitement fait le job, remportant ses trois matches et confirmant qu’il valait beaucoup mieux que sa 56e place actuelle.
Après les années 70 portées par Adriano Panatta, puis Nicola Pietrangeli, l’Italie avait par la suite complètement disparu des radars tennistiques, au point d’être reléguée dans le groupe 2 de Coupe Davis en 2004. De l’histoire ancienne. Avec le succès de Francesca Schiavone à Roland-Garros en 2010, le pays est irrésistiblement monté en puissance ces dix dernières années. Boosté d’abord par les femmes, le tennis italien règne sans partage chez les hommes. Et ce n’est pas fini. Ses meilleurs joueurs ont tous entre 22 et 25 ans…
Le tennis, sport majeur de l’autre côté des Alpes
Nation historiquement vouée corps et âme au football, l’Italie est devenue une terre de tennis. Nos voisins organisent désormais les ATP Finals de fin d’année (jusqu’en 2026), ainsi que la phase finale de Coupe Davis (jusqu’en 2027), sans oublier le Masters des jeunes à Milan. Premier sport individuel, le tennis, aidé aussi par l’explosion du padel, est désormais le deuxième en termes de licenciés, derrière le foot. Le pays affiche 900 000 licenciés (ils étaient 550 000 en 2022, contre 130 000 au début des années 2000. Lancée fin 2008 pour corriger le manque de visibilité de la petite balle jaune en Italie, SuperTennis diffuse gratuitement les plus grands tournois ATP et WTA, mais aussi les dernières éditions de la Coupe Davis et les ATP Finals.
Si la Coupe Davis a clairement perdu de son aura, la compétition a passionné de l’autre côté des Alpes, et pas seulement quand l’Italie était sur le court. Malgré l’absence des stars Sinner et Alcaraz plus de 62.000 spectateurs» (sur une capacité maximale d’environ 70.000 places sur la semaine) ont assisté sur site à la phase finale, ont indiqué à l’AFP les organisateurs. Entre les audiences de SuperTennis et celle de la Rai, la compétition aurait attiré au total 14,3 millions de téléspectateurs italiens. La finale Italie-Espagne, même sans Sinner et Musetti, a été regardée par 5,6 millions de téléspectateurs rien que sur Rai 1.
Le modèle italien inspiré… de la France
L’Hexagone regarde avec envie le renouveau de l’autre côté des Alpes, fruit d’un système qui porte plus ses fruits qu’en France. «Au début des années 2000, on comptait moins de licenciés, et les résultats économiques étaient désastreux », expliquait au Figaro le président de la Fédération italienne Angelo Binaghi, aux commandes depuis… 2001. Une profonde restructuration de la Fédération a été décidée, et un long investissement, avec des résultats au-delà de nos attentes.» En 2004, la Federazione a mis en place deux centres techniques, à Tirreno, près de Pise, pour les garçons, à Formia, près de Rome, pour les filles, afin de repérer et de former de futurs champions. Un système de bourses a été mis en place pour les 10-15 ans, et, une fois pros, un programme a été créé spécialement pour les 18-24 ans, qui reçoivent des invitations sur les tournois nationaux, sans avoir à parcourir des milliers de kilomètres. Nation ayant le plus de tournois Challengers (2e division) après les États-Unis, l’Italie a permis aux jeunes pousses de se confronter à la compétition et de s’aguerrir.
À l’instar du football, elle possède aussi de très bons entraîneurs formateurs. Riccardo Piatti a été le mentor de Sinner de ses 13 ans à ses 21 ans. Simone Tartarini entraîne Musetti depuis qu’il est arrivé à 9 ans. La Fédération accompagne les projets individuels. Et les résultats parlent d’eux-mêmes.