Szymon Keller au Musée Picasso à Paris, dans le cadre de la première exposition de la Kave Gallery.

Comment a débuté votre collaboration avec la Kave Gallery ?

Elle a commencé de manière très organique. Kave Home, via son projet Kave Gallery, m’a contacté, et je me suis immédiatement senti en phase avec leur vision — créer un dialogue entre l’art et le design, entre la matière et l’émotion. C’était très naturel de faire partie d’un projet qui valorise l’artisanat, la narration et la sensibilité.

Quelle a été votre réaction à l’idée d’exposer dans un lieu aussi riche symboliquement et historiquement que le Musée National Picasso–Paris ?

C’était à la fois une leçon d’humilité et une source d’inspiration. Exposer dans un lieu chargé d’un tel héritage artistique apporte une énergie particulière. On se sent entouré par l’histoire, tout en étant invité à ajouter sa propre voix à cette continuité. C’est une expérience qui élève l’œuvre et pousse à réfléchir à sa signification.

Créations de Szymon Keller pour la Kave Gallery et tabouret de la nouvelle collection Kave Home.

Tabouret en résine, de Szymon Keller pour la Kave Gallery.

Quelle création présentez-vous dans le cadre de cette exposition ? Pouvez-vous nous en raconter la genèse ?

Je présente une collection très personnelle qui relie différentes cultures et mes propres origines. C’est un voyage de la Baltique à la Méditerranée. Elle est née du besoin de rendre hommage aux formes naturelles de la mer Baltique, réinterprétées à travers la lumière et les couleurs de la Méditerranée. Certaines pièces sont inspirées par l’ambre, explorant sa transparence, sa chaleur et sa manière de capter la lumière. C’est un dialogue entre mémoire, géographie et matérialité.

Comment votre travail s’inscrit-il dans le dialogue collectif imaginé par la Kave Gallery pour cette toute première exposition ?

La Kave Gallery crée un espace où coexistent différents langages créatifs. Mon travail ajoute une perspective sculpturale et tactile. Il parle de texture, de couleur et de lumière. Je pense qu’il ancre le dialogue en apportant un élément de calme et d’honnêteté matérielle.

Qu’est-ce qui, selon vous, relie les artistes réunis par la Kave Gallery — une matière, une émotion, une démarche ?

Je pense que ce qui nous relie, c’est une sensibilité partagée, une manière d’observer le monde à travers l’émotion et la matière. Chacun d’entre nous interprète cette connexion différemment, mais il existe un esprit méditerranéen commun, un sens de la lumière et de l’authenticité qui unit l’ensemble.

Les créatifs de la première exposition de la Kave Gallery et leurs oeuvres au Musée Picasso à Paris. De gauche à droite : Sacrée Frangine, Terre Brute, Szymon Keller et Piro.

Votre travail oscille entre art, design et sculpture — comment définissez-vous votre langage plastique ?

Il est visuel, tactile et émotionnel. Je m’intéresse aux formes qui évoquent des sensations, qui suscitent des sentiments, sans nécessairement représenter quelque chose de précis. Mon langage, c’est la lumière, la couleur et les émotions, avec des objets qui invitent au calme, à la contemplation et à la réflexion.

Quelle démarche créative vous anime ?

Je suis fasciné par la manière dont la nature, les émotions et la nostalgie donnent forme à la création — comment quelque chose d’aussi éphémère et fugace peut devenir matériel, visuel et tactile. Mon processus commence souvent par une atmosphère ou un souvenir, qui prennent lentement forme à travers le toucher et l’expérimentation.

Quelle place occupe la matière dans votre processus créatif ? Est-ce le point de départ, ou plutôt le résultat d’un geste ?

Les deux. J’aime travailler avec des matières qui ont leur propre vie et leur propre comportement. Même lorsque j’interviens, elles laissent leur empreinte — en particulier les résines, qui réagissent de manière unique selon l’environnement. Cette part d’imprévisibilité confère à chaque pièce son identité et sa texture propre.

Quels sont les principaux thèmes ou préoccupations qui traversent votre pratique aujourd’hui ?

Créer des œuvres et des environnements durables, continuer à relier les cultures et raconter des histoires à travers mes créations. Mon travail consiste à préserver l’émotion et à la transformer en forme : quelque chose de durable mais de sensible.

Szymon Keller et ses tabourets en résine réalisés pour la Kave Gallery.

Comment votre travail dialogue-t-il avec l’architecture ou l’intérieur d’un espace ?

Ce dialogue est essentiel. Mes collections sont nées de mon travail d’architecte d’intérieur, du besoin de créer des pièces capables de renforcer l’identité d’un espace. Mes objets interagissent avec l’architecture : ils apportent de la personnalité, de la chaleur et une présence qui rend chaque lieu plus humain.