L’Europe redoute l’impact du point numéro 14 du plan Trump. Ce volet propose de transférer une partie des avoirs russes immobilisés aux États-Unis et au Kremlin pour financer divers projets. Ce scénario est jugé inenvisageable par la majorité des capitales membres. Confier une partie de ces fonds à Washington, ou pire, les restituer directement à la Russie, reviendrait à priver l’Europe de son principal levier de pression stratégique face à Moscou. L’onde de choc est d’autant plus forte que l’UE est déjà en pleine négociation pour sécuriser un financement pluriannuel de l’Ukraine, afin d’éviter que Kiev ne subisse une pénurie de ressources dans les deux prochaines années.

La position française est claire. Emmanuel Macron, le président français, a été catégorique : c’est « aux Européens de décider » de l’usage de ces actifs russes. La proposition américaine ne se limite pas à un simple désaccord stratégique. Elle s’apparente à une tentative d’imposition extérieure sur un dispositif de sanction que l’UE considère comme un attribut de sa souveraineté économique.

210 milliards d’euros : l’attractivité face à l’insécurité juridique

Le montant total des avoirs gelés s’élève à 210 milliards d’euros. Il s’agit de fonds appartenant à la Banque centrale russe, immobilisés depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022.

Pour une large majorité des pays de l’UE dont les finances publiques sont sous tension, l’option de s’appuyer sur ces fonds, telle qu’étudiée par la Commission européenne, représente la solution de loin la plus séduisante et la moins coûteuse budgétairement. L’Allemagne, les pays baltes, les nations scandinaves, la Pologne et les Pays-Bas poussent fermement pour que l’Union avance rapidement sur ce dossier. Le Premier ministre polonais, Donald Tusk, a d’ailleurs exprimé l’espoir d’un compromis rapide pour que ces ressources puissent être mobilisées pour aider l’Ukraine.

Cependant, cette opération est sans précédent et soulève d’immenses questions juridiques. C’est précisément cet angle qui nourrit la forte réticence de la Belgique, pays qui héberge la plus grande partie de ces actifs.

La Belgique maintient son blocage face à la menace de représailles russes

La position belge reste ferme, malgré la publication du plan de Donald Trump. Le Premier ministre belge, Bart De Wever, exprime une crainte majeure et persistante : que son pays soit le seul à assumer les conséquences en cas de problème et se retrouve exposé à d’éventuelles représailles russes. Ces rétorsions pourraient prendre la forme d’actions en justice ou de mesures de rétorsion économique ciblées.

Cette résistance belge constitue le principal point de friction institutionnel à Bruxelles. Un diplomate européen a d’ailleurs confirmé que la proposition américaine a « encore accru la pression pour trouver un accord » en urgence.

Malgré l’optimisme affiché par Donald Tusk, qui a noté que ce n’est « pas encore une décision définitive, car certains pays européens ont encore des réserves », la Belgique, sollicitée par l’AFP, a affirmé que ses « préoccupations » et sa « position » demeurent pour l’heure inchangées.

Les capitales européennes disposent désormais d’une courte fenêtre de trois semaines. Elles doivent tenter de rallier la Belgique au projet d’utilisation des actifs, ou, alternativement, d’identifier d’autres formes de financement pérenne pour l’Ukraine. L’échéance politique est fixée au sommet de la mi-décembre.