C’est une opération d’une ampleur rarement vue qui s’est déroulée mardi 25 novembre à la maison d’arrêt de Nanterre (Hauts-de-Seine). Cette nuit, près de 200 agents spécialement mobilisés ont mené une fouille de grande envergure dans l’établissement pénitentiaire, permettant la saisie de 70 téléphones portables et de stupéfiants, dont la pesée est toujours en cours. Une première du genre depuis quinze ans.

Cette opération marque le coup d’envoi d’un vaste plan de lutte contre les objets illicites en détention, annoncé ce mercredi matin sur RTL, par le garde des Sceaux, Gérald Darmanin. Dans une circulaire adressée à l’ensemble des directeurs interrégionaux des services pénitentiaires, le ministre de la Justice ordonne l’organisation de « fouilles sectorielles » dans toutes les maisons d’arrêt de France d’ici au 31 décembre 2025.

Des moyens technologiques inédits

À Nanterre, les autorités ont déployé des moyens exceptionnels. Outre les quelque 200 agents mobilisés, des chiens spécialement formés à la détection de stupéfiants et des dispositifs technologiques de pointe ont été utilisés. Ces équipements permettent notamment de détecter les téléphones portables, même éteints, ainsi que les cartes SIM dissimulées dans les cellules.

Chaque fouille sectorielle doit concerner environ 50 cellules et 100 personnes détenues, de manière à pouvoir ouvrir le maximum de cellules simultanément, précise la circulaire ministérielle. Les chefs d’établissement sont invités à solliciter le concours des forces de sécurité intérieure, des équipes cynotechniques, des agents des douanes, mais également la présence d’officiers de police judiciaire et d’un représentant du ministère public.

79 526 découvertes en 2024

Cette offensive intervient alors que l’administration pénitentiaire fait face à une véritable hémorragie. En 2024, pas moins de 79 526 découvertes de téléphones et d’accessoires (cartes SIM, chargeurs, câbles USB) ont été dénombrées en détention. Un chiffre vertigineux qui témoigne de la porosité des établissements pénitentiaires.

« La perméabilité des établissements pénitentiaires, y compris dans des quartiers sécurisés tels que les quartiers d’isolement, a facilité la poursuite de leurs activités par les délinquants et criminels, malgré leur incarcération », déplore Gérald Darmanin dans sa circulaire. Le ministre souligne que cette faille a conduit à la création des quartiers de lutte contre la criminalité organisée (QLCO), destinés à isoler les narcotrafiquants les plus dangereux.

Le premier de ces quartiers ultra-sécurisés a été mis en service à Vendin-le-Vieil, suivi d’un second à Condé-sur-Sarthe. Quatre mois après la mise en service du premier d’entre eux, le ministre dresse un premier bilan positif de ces structures qui accueillent près de 140 détenus sur les plus de 85 000 pris en charge par l’administration pénitentiaire.

Ces fouilles massives s’inscrivent dans la stratégie plus large annoncée le 21 novembre par Gérald Darmanin lors d’un déplacement à la prison de la Santé. Le garde des Sceaux a dévoilé un plan « zéro téléphone » de 29 millions d’euros visant à renforcer l’étanchéité de six établissements pilotes grâce à des brouilleurs, des portiques à ondes millimétriques et la couverture des cours de promenade pour empêcher les projections d’objets depuis l’extérieur.

Réponse pénale systématique

Mais le ministre entend désormais étendre la lutte à l’ensemble du parc pénitentiaire. Toutes les découvertes réalisées lors de ces opérations de fouille feront systématiquement l’objet d’un signalement au parquet compétent, « afin de permettre l’engagement de poursuites chaque fois que les éléments constitutifs d’une infraction seront réunis », insiste la circulaire.

Six établissements pénitentiaires font par ailleurs l’objet d’un plan spécifique de lutte contre les téléphones portables, combinant dispositifs actifs et passifs : les maisons d’arrêt d’Arras et de Dijon, et les centres pénitentiaires de Paris-La Santé, Rennes-Vezin, Toulon-La Farlède et Toulouse-Seysses. Dans ces six seules structures, 545 téléphones portables ont été saisis en 2024.

Les directeurs interrégionaux des services pénitentiaires doivent transmettre au ministère le calendrier de l’ensemble de ces fouilles pour le 3 décembre prochain.