Après la suppression par la région Île-de-France d’une subvention de 2 millions d’euros aux Maisons départementale des personnes handicapées (MDPH), les centres de formations des personnes en situation de handicap craignaient une baisse à hauteur de 15% des crédits alloués par la collectivité au titre de l’accompagnement des adultes en formation. Mais la mesure n’est plus à l’ordre du jour. “À l’annonce de notre manifestation, la région a contacté notre direction, alors que jusqu’à maintenant, il n’y avait que des échanges de mails de tableaux Excel. Et formidable : à la suite d’une rencontre hier soir, la région va apparemment reconduire les budgets de 2025 sur 2026“, se félicite Franck Boissier, formateur et secrétaire CGT de l’établissement et service de réadaptation professionnelle (ESRP) Masson-Timbaud qui avait appelé au rassemblement devant le conseil régional mercredi 20 novembre.

© CH“Totale fake news“

À l’origine de la mobilisation, c’est un courrier envoyé en juillet aux directions de ces établissements, leur demandant d’envisager une baisse du nombre de stagiaires, qui a mis le feu aux poudres. La mesure avait été médiatisée fin septembre par Céline Malaisé, la présidente du groupe La gauche communiste, écologiste et citoyenne.

Interrogée lors de la séance du conseil régional qui s’est tenu ce matin même, par Céline Malaisé et Christian Prudhomme, conseiller régional LFI, Valérie Pécresse, la présidente (LR) de la région, a fustigé une “totale fake news“. “Il s’agissait d’une initiative d’un de nos directeurs général (sic). Notre vice-présidente, Yasmine Camara, a écrit à tous les centres de formation pour leur dire que ce n’était absolument pas envisagé par la région et que le budget serait sanctuarisé en 2026“. Dans ce courrier, que 93 citoyens a pu consulter, la région explique avoir “dû faire face à d’importantes baisses de crédits décidées par l’État. Ce dernier souhaite reconduire et amplifier ces baisses en 2026. De telles contraintes ont naturellement conduit l’ensemble des politiques régionales à être réexaminées afin de garantir leur soutenabilité. C’est pourquoi les services de la Région avaient demandé aux établissements des informations permettant de mesurer les conséquences d’éventuelles baisses des crédits dédiés à la rémunération des stagiaires.” Pour autant, poursuit Yasmine Camara “malgré les contraintes budgétaires imposées par l’Etat et consciente de l’importance des missions assurées par les établissements de réadaptation professionnelle, je peux vous annoncer que la Région maintiendra en 2026 les crédits permettant de rémunérer les stagiaires“.

“La bataille a été gagnée avant la manif, mais on l’a maintenue parce qu’on ne sait pas pour les années suivantes“

De son côté, Céline Malaisé, rencontrée durant le rassemblement, se félicite “du recul de l’exécutif“, mais son groupe communiste a prévu de déposer un amendement pour pousser l’exécutif régional à prendre acte de l’abandon de ce projet, “incluant le courrier envoyé aux centres de formation pour bien montrer que l’on n’agitait pas un épouvantail“.

Malgré l’annonce du maintien du financement, plus d’une soixantaine de personnes, formateurs et stagiaires, ont répondu présents ce mercredi 20 novembre devant le conseil régional d’Ile-de-France à l’appel au rassemblement du syndicat CGT de l’établissement et service de réadaptation professionnelle (ESRP) Masson-Timbaud. “La bataille a été gagnée avant la manif, mais on l’a maintenue parce qu’on ne sait pas pour les années suivantes“, justifie Franck Boissier, auteur aussi d’une pétition qui a réuni 870 signatures. “C’est important de venir. Quand il manque de l’argent, on enlève toujours les moyens aux personnes en situation de handicap“, déplore Robert, 45 ans, en formation technicien supérieur systèmes et réseaux depuis mars 2025. Opéré des deux hanches, il a été contraint d’abandonner son travail comme maçon. “Ce n’est pas à cause de mon handicap que je vais arrêter de travailler. Je ne peux pas. Si on fait des formations, c’est que l’on veut retourner travailler. On cotise, on paye des impôts, on consomme, on a des enfants comme tout le monde. En plus, grâce à l’ESRP, j’ai obtenu des diplôme de Fle [Français langue étrangère]”, développe-t-il.

“Si on réduit de 15% les effectifs, on sort des objectifs“

Selon les professionnels des centres de formation, une baisse du financement de la région, qui prend en charge la rémunération des stagiaires, aurait pour effet de réduire mécaniquement leur capacité d’accueil. “L’impact s’évalue en nombre de places et en nombre de personnes qui sont formées parce que certaines formations durent moins d’un an. On défend donc en premier lieu l’accessibilité des personnes en situation de handicap à la formation. Mais, ce sont aussi nos moyens qui seraient affectés parce qu’on a l’obligation d’atteindre un minimum de 90 % de capacité d’accueil de stagiaires“, précise Frank Boissier, en référence au contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) de l’ESRP avec l’Agence régionale de santé (ARS). “Si on réduit de 15% les effectifs, on sort des objectifs, ce qui aurait des conséquences in fine sur les budgets attribués par l’ARS et donc moins de moyens et un nouveau plan social“, précise Franck Boissier. L’Île-de-France compte 18 ESRP, les 4 établissements et services de pré-orientation (ESPO) et les 2 Unités d’évaluation de réentraînement et d’orientation sociale et professionnelle (UEROS). Ces structures accompagnent près de 2200 personnes en situation de handicap, reconnues RQTH ou inaptes, âgés entre 16 ans et plus de 60 ans. Porté par l’association Ambroise Croizat, l’ESRP Masson-Timbaud est le plus grand avec 575 places répartis sur deux sites dans le 12ème arrondissement de Paris et à Montreuil pour un taux d’insertion de 69%.

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