Il est presque 13 h, ce jeudi 27 novembre, entre les murs de l’Hôtel de Ville de Rennes. Mahault, 16 ans, élève de première au lycée Sévigné à Césson (35), patiente dans l’attente du résultat Goncourt des lycéens. Dans sa main, le roman de Laurent Mauvignier, « La Maison vide », qui figure parmi les quatre œuvres en lice. « J’aurais bien aimé le défendre », souligne la jeune femme.

Le verdict tombe : « La nuit au cœur », de Nathacha Appanah, déjà récompensé du prix Fémina, décroche le célèbre prix. L’annonce arrive par la voix d’Elsa, 17 ans, élève en première au lycée Henri-Matisse, à Vence (Alpes-Maritimes), et porte-parole du jury final. « Nous avons été bouleversés par ces trois histoires de femmes et profondément touchés par sa plume alliant complexité, justesse et poésie », déclare Elsa. « C’était une très grande fierté pour moi d’annoncer ce prix, confie, plus tard, la jeune femme. Et c’est aussi une fierté de pouvoir représenter tous nos camarades. » Près de 2 000 lycéens ont bûché sur les 14 titres de cette édition du Goncourt des lycéens.

« C’est magique »

Un téléphone est tendu alors à la lycéenne. Au bout du fil, Nathacha Appanah, lauréate du prix. « C’est un grand cadeau », se réjouit alors l’autrice. Dans les rangs du jury, quelques larmes, suivies de grands sourires. Cette aventure, forte en émotions, les treize lycéens la vivent depuis plusieurs mois. « C’est magique comme moment. On s’en souviendra encore dans plusieurs années », sourit Clara.

Pour cette élève de première générale, à Paris, âgée de 16 ans, « cet instant ne peut pas se résumer. C’était tellement fort comme expérience. » Clara a découvert, en début de semaine, qu’elle participerait aux délibérations finales. « J’ai d’abord été élue comme représentante régionale. Puis, lundi, on m’a dit que je faisais partie du jury national. » De cette expérience, la Parisienne retient la responsabilité du choix : « On sait qu’on peut avoir une influence avec ce prix. »

Un débat et un résultat

Avant de rendre leur décision, ils ont débattu pendant un long moment. « Il y a eu un consensus », assure Elsa. Si, durant les délibérations, un coup de cœur divergent a pu se manifester, aucun juré ne laisse échapper un mot dessus. « On était tous d’accord », reprend Elsa, plusieurs fois. Pour Paul, originaire de Saint-Palais-sur-Mer (Charente-Maritime), le roman de Nathacha Appanah « répondait à tous les critères, autant par le style que par l’histoire. Il y a un équilibre entre l’esprit et la poésie. » Emma, étudiante en BTS à Brest et doyenne du jury, à 20 ans, avoue « avoir pleuré » pendant la lecture du bouquin. « Et je ne suis pas la seule. »

Des lecteurs assidus

Un point commun rassemble ces jeunes venus de toute la France : le plaisir de la lecture. « On a tous des profils différents mais on lit tous », affirme Clara. Emma penche plutôt vers le genre « policier ou la fantasy. Maintenant, je vais plus lire davantage des romans qui racontent le réel ».

« La jeunesse lit toujours, poursuit Emma. Dans ma classe, il y en a qui se sont mis à lire pour le prix. » « Je ne crois pas que ce soit vrai que la jeunesse ne lit plus. On en est la preuve », abonde Elsa.

L’ensemble du jury lors de la remise du prix.L’ensemble du jury lors de la remise du prix. (Le Télégramme/Jean-François Chesnay)De futures plumes ?

Cette expérience, qui se clôturera par la remise en mains propres du prix à Paris, a nourri l’imaginaire de certains. Quelques-uns se voient peut-être écrire dans quelques années. « On a tous une histoire à raconter », rêve Paul. En attendant, pour grand nombre d’entre eux, il faudra retourner sur les bancs du lycée : « Cette année, c’est le bac de français. »