Dans le 20e arrondissement de Paris, des associations de parents d’élève se mobilisent pour trouver une solution pour 400 personnes sans logement qui ont fini par dormir sur le parvis de la mairie pendant quatre nuits. Une lettre a été envoyée au préfet, pour l’instant sans réponse.
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Le courrier fait deux pages. Ni larmoyant, ni agressif, mais factuel. Le destinataire ? Le préfet d’Île-de-France, Baptiste Rolland, en poste depuis janvier dernier. Les faits ?
L’installation sauvage de plus de 400 mal-logés sur le parvis de la mairie du 20ème arrondissement, place Gambetta, le 12 novembre dernier. Des familles entières, des femmes et surtout des enfants, parfois de petits nourrissons, aidés par l’association Utopia 56.
Les signataires de cette lettre, des parents d’élèves de l’arrondissement, déstabilisés en voyant ces mamans « changer les couches à même le trottoir », disent avoir « pris conscience de la situation de ces familles ». Ils demandent désormais aux pouvoirs publics de « prendre leurs responsabilités ».
Le courrier a été envoyé le 12 novembre. Il est resté, pour l’instant, sans réponse. « Même pas un accusé de réception, rien » déplore Julien Pamart, coprésident de l’association ‘le 20ème aux enfants, cosignataire avec deux autres associations. Il parle d’une « vraie émotion collective », qui aurait poussé « des parents a amené des couches ou récupérer de la nourriture dans des commerces locaux afin de les redistribuer ».
Les associations de parents d’élèves traitent habituellement plutôt des problèmes tels que la sécurisation d’un passage piéton en face d’une école ou contre les fermetures de classe. « Il nous arrive, hélas, aussi de plus en plus souvent d’aider à mettre en contact avec les services sociaux des familles mises à la rue. Mais nous n’avons pas de position militant. Or là, impossible de rester insensible. Moi-même j’ai été un peu traumatisé de voir une maman changer des couches de son bébé sur une bâche, dehors par 3°. » explique le coprésident de l’association ‘le 20ème aux enfants.
Ce groupe hétéroclite où l’on retrouverait des personnes en attente de régularisation, des familles expulsées en attente d’un relogement ou des demandeurs d’asile a passé quatre nuits sur le parvis, abritées sous des tentes et des couvertures de survie fournies par l’association ‘les enfants du 20e’, la mairie étant « dépassée » selon Julien Pamart.
Le 16 au soir, la température ayant encore baissé, ils ont été finalement accueillis dans la salle de mariage avant d’être répartis le lendemain dans trois gymnases, dans le 20e, le 18e et le 15e. Mais depuis, la situation est « bloquée ».
« Nous avons souhaité médiatiser ce courrier car bien qu’envoyé le 21 novembre, il n’a suscité aucune réponse. Et ce, alors que 32 des 66 des écoles maternelles et élémentaires de l’arrondissement, ainsi que 100 % des collèges et deux lycées généraux l’ont signé en l’espace de deux jours, ce qui est du jamais vu », , explique Julien Pamart.
Ce dernier rappelle qu’en tant « qu’association de parents d’élèves, nous sommes habitués à envoyer des courriers à l’Education Nationale et ils répondent toujours. Mais là, rien, alors que les institutions sont censées, par la loi, protéger les familles et les mineurs ».
Antoine Alibert est adjoint à la mairie du 20e en charge de la solidarité et des affaires sociales, cosecrétaire d’Europe Ecologie les Verts Paris. Pour lui, si ces gens sont restés aussi longtemps sur le parvis, c’est à cause de « la conjonction de deux facteurs: primo, le refus de l’Etat, dont c’est pourtant la compétence, d’avoir une politique digne de ce nom en termes d’accueil. Secundo, la date. Officieusement, on m’a fait comprendre lorsque j’ai contacté les services concernés que réaliser ce genre d’occupation ne se faisait pas, je cite, la veille de la commémoration des attentats du Bataclan ».
Il revendique la « mise en place d’une rotation mensuelle voire bimensuelle de plusieurs gymnases pour gérer l’urgence » et une « coordination tournante ». Prévu à cet effet ce mois-ci, le gymnase des Pyrénées a donc accueilli à peu près deux cents personnes à partir du 17 novembre, Antoine Alibert glissant au passage avec cynisme que « les pouvoirs publics se défaussent de toute façon sur les mairies volontaristes de gauche ».
Selon le dernier recensement sur place, une cinquantaine de personnes manqueraient à l’appel au gymnase de Pyrénées « soit parce qu’ils sont partis, soit parce qu’ils ont trouvé une solution d’eux-mêmes. »
L’élu tient à rappeler certains chiffres. « Un seul : 1500. C’est le nombre de refus que doit faire le 115 par jour aux gens qui appellent pour obtenir un logement d’urgence. C’est énorme. Dans notre seul arrondissement, on estime à environ 3500 sans logement. Et ce chiffre est sûrement en deçà de la réalité. En six ans, nous avons réussi à créer 1000 places d’hébergement d’urgence mais on a l’impression d’essayer de vider un océan avec une cuillère. Il faut que l’Etat prenne enfin ses responsabilités »;