« Je m’attends à ce que les prix à la pompe augmentent […] de l’ordre de quatre à six centimes par litre » au 1er janvier 2026, a déclaré mercredi Olivier Gantois, directeur de l’Union française des industries pétrolières (Ufip) Énergies et mobilités. Une semaine plus tôt, le PDG de Total, Patrick Pouyanné, avait aussi évoqué sur LCI « quatre à cinq centimes de plus dans le litre d’essence dans un an ou deux ». Dans le même temps, Engie a prévenu les clients de ses contrats Gaz Passerelle que « les prix seront révisés au 1er janvier 2026 » avec une hausse « d’environ 3,5 % du budget annuel » gaz de ses clients.
Cette hausse probable des prix de l’énergie au 1er janvier 2026 s’explique notamment par l’évolution du dispositif des “certificats d’économies d’énergie” (CEE), actée début novembre par le gouvernement. Ce dispositif, créé en 2005, contraint les fournisseurs d’énergie à promouvoir et financer des actions d’économies d’énergie auprès des consommateurs, faute de quoi ils doivent verser de lourdes pénalités. À partir du 1er janvier 2026, qui marque le début de la sixième phase du dispositif qui durera jusqu’au 30 décembre 2030, les entreprises concernées devront réaliser des obligations annuelles d’économies d’énergies de 1 050 térawattheures (Twh) cumac (unité de mesure qui calcule les économies d’énergie sur la durée de vie des opérations), soit une hausse de 27 %, conformément à un décret gouvernemental publié le 4 novembre.
164 euros en moyenne par an
Si cela peut paraître une bonne nouvelle pour l’environnement, elle l’est moins pour les portefeuilles des ménages. Car les fournisseurs d’énergie répercutent le coût des CEE dans leurs prix de vente. « Le coût associé aux CEE est donc supporté par les ménages et les entreprises du secteur tertiaire, s’apparentant sur le plan économique à une taxe sur l’énergie », déplorait dans un rapport paru en septembre 2024 la Cour des comptes. Les Sages ont estimé que chaque ménage finançait à hauteur de 164 euros en moyenne par an le dispositif. Dans le détail, cela coûtait 84 euros par an aux abonnés de gaz, 80 aux usagers du fioul, 76 euros aux automobilistes et 56 euros aux usagers de l’électricité.
Un montant similaire était estimé la même année par l’Inspection générale des finances, qui voyait elle aussi un coût « qui s’apparente à une taxe proportionnelle sur la consommation d’énergie ». L’UFC-Que Choisir estime de son côté que la contribution annuelle moyenne des ménages se situe « entre 124 et 244 euros par an par ménage ». « Ce n’est ni une taxe ni une hausse d’impôt. C’est une obligation qui incombe aux énergéticiens de faire des économies d’énergie avec la vocation de pouvoir œuvrer pour la transition énergétique. Ce sont les énergéticiens qui décident comment ils traduisent ces CEE. Ils choisissent ou non d’augmenter leurs prix », précise l’entourage du ministre de l’Économie Roland Lescure, qui rappelle que le dispositif « bénéficie avant tout aux ménages ».
15 et 17 centimes sur le litre de carburant l’an prochain
L’UFC-Que Choisir estime que « de fortes augmentations des factures énergétiques des ménages sont à redouter dès 2026 », en raison de la hausse à venir des obligations liées aux CEE. Mais le flou persiste sur l’impact réel. L’Ufip estime ainsi qu’actuellement, les CEE pèsent « 11 centimes » sur le prix du litre du carburant et que cela « devraient devenir 15 à 17 centimes » en 2026, quand l’entourage de la ministre de la Transition écologique, Monique Barbut, constate « une hausse de sept centimes en moyenne » sur la période 2022-2025. Côté électricité, le gouvernement a annoncé « travailler à des scénarios de baisse du prix pour les Français », ce qui pourrait par ailleurs venir restreindre l’impact de la hausse des obligations liées aux CEE.
Entre 2022 et 2023, où le niveau des obligations avaient progressé d’environ 25 %, le coût annuel moyen pour un ménage avait toutefois progressé de 44 euros, selon les calculs de la Cour des comptes. « Le niveau d’obligations augmente certes, mais il y aura plus de gisements (d’opérations) ouverts, donc un marché des CEE plus grand, ce qui permettra peut-être d’avoir un impact marginal », estime Bercy à propos de la hausse attendue en 2026. Car le décret de début novembre a aussi abaissé les volumes d’énergie mis à la consommation à partir desquels une entreprise devient contrainte par les CEE, faisant ainsi entrer de nouveaux acteurs et fournisseurs dans le dispositif. Le ministère de l’Économie assure auprès de Ouest-France qu’il sera « très vigilant à l’impact du dispositif sur l’évolution des prix en 2026 ».