32.000 kilomètres… à peine. Tel est la distance qui séparera l’astéroïde Apophis de la Terre le 13 avril 2029.
Autant dire, rien ou presque à l’échelle de l’univers.
Lors de sa découverte, il y a un peu plus de 20 ans, ce gros caillou avait été considéré comme une menace potentielle.
« La probabilité d’un impact avec notre planète était initialement estimée à 2,7 % », rappelle le Professeur Patrick Michel.
Cet astrophysicien niçois est un des pionniers du réseau international désormais chargé de sonner l’alerte à l’ONU dès lors que la probabilité qu’un astéroïde croise la route de la Terre dépasse 1 %.
Un dispositif qui, n’existant pas au moment de la découverte d’Apophis, a été pour la première fois activé en toute fin d’année dernière, quand un nouvel objet céleste baptisé 2024 YRA est apparu dans l’objectif des télescopes.
« Celui-là ne mesurait pourtant que quelques dizaines de mètres, contrairement à Apophis dont le diamètre est de l’ordre de 300 et 400 mètres », souligne Patrick Michel qui rassure d’emblée : aucun de ces deux géocroiseurs ne heurtera finalement la Terre.
D’abord considéré comme une menace
« Pas plus en 2029, que lors des prochains passages en 2036, 2044 et 2068 », promet l’astrophysicien avec certitude, la trajectoire d’Apophis ayant depuis longtemps été affinée.
On sait que ce gros caillou reviendra nous voir, mais de manière plus lointaine.
En avril 2029, cet astéroïde sera dix fois plus près de la Terre que ne l’est en moyenne la lune. Il se faufilera même entre la Terre et l’orbite de nos satellites géostationnaires !
Une occasion inespérée d’observer de très près ce type d’objet encore méconnu. Ce sera la mission de la sonde Ramses (pour Rapid Apophis Mission for Space Safety).
Au terme d’un conseil ministériel de deux jours réunissant les 23 états membres, le directeur général de l’agence spatiale européenne a annoncé ce jeudi 27 novembre que le financement de ce programme avait été validé.
Au grand bonheur de l’astrophysicien Patrick Michel qui, au travers du laboratoire Lagrange de l’Observatoire de Nice et de l’Université Côte d’Azur, s’est vu confier la codirection scientifique de cette nouvelle mission spatiale, en collaboration avec des scientifiques italiens.
Une opportunité qui ne se représentera pas avant 7 000 ans
« L’objectif sera alors d’étudier l’influence des forces de marée, c’est-à-dire de la gravité, sur la structure d’un astéroïde », décrypte le chercheur niçois.
Pour cela, Ramses embarquera à son bord deux instruments made in France : un radar ainsi qu’un sismomètre qui sera quant à lui déposé à la surface d’Apophis.
Le tout sera embarqué à bord du lanceur japonais H3, l’agence spatiale nippone JAXA et l’ESA travaillant main dans la main sur ce projet, qui intéresse d’ailleurs aussi la NASA et même des opérateurs privés.
Il semblerait tous le monde a très envie d’aller saluer Apophis. Les Européens devraient être les premiers à arriver à son contact dès mars 2029.
Du moins c’est l’objectif du compte à rebours très serré qui vient de s’engager.
Car, pour ne pas rater ce rendez-vous exceptionnel qui ne devrait pas se reproduire avant 7.000 ans, il va falloir respecter une fenêtre de lancement d’à peine 3 semaines entre le 24 avril et le 15 mai 2028.
Ramses devrait alors prendre son envol. Avec à son bord toute l’expertise scientifique niçoise.
Visible à l’œil nu depuis Nice
Après un an de voyage, la sonde européenne rejoindra Apophis pour l’observer au plus près.
Une inspection qui s’inscrit également dans le programme de défense planétaire.
« Pour arriver à dévier un astéroïde qui viendrait à nous menacer encore faut-il savoir précisément de quoi il est fait », résume ce chercheur qui a consacré sa carrière à élaborer une riposte face à ce risque qui, souligne-t-il, « a l’avantage d’être prévisible » : « Autant s’y préparer puisque nous en avons le temps ».
Car aucune menace ne pèse pour l’heure sur la Terre, insiste Patrick Michel qui invite surtout les Azuréen à profiter du spectacle qui leur sera offert le 13 avril 2029.
« Le petit point lumineux d’Apophis sera alors visible à l’œil nu depuis Nice », annonce l’astrophysicien, enthousiaste à l’idée que tout le monde, scientifiques et simples Terriens, « regardera ce soir-là dans la même direction ».
Vers ce ciel azuréen qui recèle encore tant de mystères. Pour nourrir de nouvelles vocations et pourvoir aux besoins industriels du New Space, l’université Côte d’Azur s’est d’ailleurs dotée d’un tout nouveau Master dédié aux métiers du spatial. Baptisée Comètes – ça ne s’invente pas – cette nouvelle formation supérieure accueillera ses premiers étudiants dès l’an prochain.