La Cour de cassation a rendu vendredi plusieurs arrêts très attendus précisant qui peut obtenir le statut de « victimes d’actes de terrorisme », une définition désormais affinée qui vaudra aussi bien pour les cours d’assises jugeant les attentats que pour les demandes d’indemnisation.
Cette clarification juridique revêt un enjeu financier majeur dans le cadre des attentats de masse qu’a connus la France en 2015 et 2016, alors que près de 1.500 parties civiles avaient été admises lors du procès de l’attentat de Nice.
La plus haute juridiction française avait étudié le 10 octobre, en assemblée plénière, sa formation la plus solennelle réunie pour trancher des questions importantes de jurisprudence, trois pourvois déposés par des parties civiles des attentats du Bataclan et de la promenade des Anglais.
Bien que ces personnes aient été reconnues comme victimes par les cours d’assises ayant jugé ces affaires, leurs requêtes d’indemnisation auprès du Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et autres infractions (FGTI) avaient été rejetées par le juge civil, qui appliquait des critères plus stricts.
Attentats de Nice et du Bataclan : la Cour de cassation précise la notion de victime pour l’indemnisation
Dans sa décision rendue vendredi, la Cour de cassation confirme l’autonomie du dispositif d’indemnisation des victimes d’attentats, mais « tend à uniformiser les critères appliqués par le juge civil et le juge pénal pour reconnaître à une personne la qualité de victime d’un acte de terrorisme », explique-t-elle dans un communiqué.
Est ainsi qualifiée de « victime d’un acte de terrorisme » toute personne « qui a été directement exposée à un péril objectif de mort ou d’atteinte corporelle » ou qui, se trouvant à proximité, « a pu légitimement se croire exposée à ce péril » au moment des faits.
À partir de ces critères, la Cour de cassation a rejeté les pourvois de deux familles qui se trouvaient à proximité mais non au cœur de l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice, lorsqu’un Tunisien avait lancé un camion sur la foule rassemblée sur la promenade des Anglais, causant 86 morts et des centaines de blessés.
Situés à environ deux cents mètres au delà de l’endroit où le véhicule avait finalement été immobilisé par une panne mécanique, ces requérants « n’ont pu voir celui-ci passer à côté d’eux » et leurs préjudices « résultent d’un mouvement de foule lié à la panique ».
À l’inverse, une habitante du Bataclan a obtenu la cassation de l’arrêt de la cour d’appel de Paris qui avait rejeté sa demande d’indemnisation, son immeuble situé en face de la salle de concert ayant été pris pour cible par les tirs des jihadistes le 13 novembre 2015, au cours desquels un occupant du premier étage avait été tué.
Résidant au deuxième étage, la demandeuse avait observé une partie de l’attaque depuis ses fenêtres, sans être atteinte par des balles après avoir éteint les lumières et s’être réfugiée dans un placard.
Considérant qu’elle ne doit peut être sa survie qu’à ces réflexes, la Cour de cassation estime que cette voisine a été « directement exposée à un péril objectif de mort ou d’atteinte corporelle ».
- Ce qu’il faut retenir : Ces arrêts précisent les critères permettant de reconnaître le statut de victime d’un acte de terrorisme pour l’indemnisation. La Cour de cassation confirme l’autonomie de la procédure tout en rapprochant les analyses du juge pénal et du juge civil. Deux familles niçoises sont déboutées tandis qu’une riveraine du Bataclan obtient la cassation du refus de son indemnisation.
Avec AFP
