Air France, qui a lancé les mises à jour d’un logiciel sur les appareils touchés dans la nuit de vendredi à samedi, prévoit un « retour à la normale » pour la plupart de ses vols dimanche.
Le rappel, qui concerne l’avion le plus vendu au monde, a provoqué des retards et annulations de vols tout autour du globe. Le constructeur aéronautique Airbus a annoncé, vendredi 28 novembre, l’immobilisation de quelque 6 000 avions A320, afin de remplacer en urgence un logiciel de commande vulnérable aux radiations solaires. Le groupe a notifié à ses clients utilisant ce logiciel de navigation sur son modèle A320 « d’arrêter immédiatement les vols ».
« Les perturbations sont très limitées » dans les aéroports parisiens samedi matin, a appris l’Agence Radio France auprès de Paris Aéroports. Du côté d’Air France, tous les passagers devant voyager samedi avec la compagnie « arriveront à destination », mais « pas forcément à l’heure initialement prévue », a rapporté un porte-parole de la société à France Télévisions. Air France prévoit un « retour à la normale » dimanche, sauf pour les vols reliant entre elles les destinations des Caraïbes. Cette immobilisation massive soulève plusieurs questions auxquelles franceinfo apporte des réponses.
1 Quel est le problème technique à l’origine du rappel ?
Une défaillance a été repérée au niveau d’un logiciel de commande d’un calculateur profondeur-ailerons (Elac) fabriqué par Thales. Comme le précise Libération, ces calculateurs fonctionnent comme un intermédiaire entre les commandes au niveau du poste de pilotage et les gouvernes de profondeur. Localisées à l’arrière de l’appareil, ces petites surfaces mobiles permettent à l’avion de monter ou descendre. « Un pilote n’agit pas directement sur les gouvernes », explique au Parisien l’ancien pilote Michel Polacco, spécialiste d’aéronautique. « Aujourd’hui, on agit sur des calculateurs auxquels on donne des ordres et ensuite, les calculateurs analysent la situation et la position des gouvernes, puis la modifient en fonction de l’objectif qui est cherché par le pilote. »
Un incident en vol et son analyse ont « révélé que des radiations solaires intenses pourraient corrompre des données essentielles au fonctionnement des commandes de vol », a rapporté vendredi Airbus dans un communiqué. D’après Michel Polacco, les calculateurs sont normalement « extrêmement protégés de l’extérieur », et localisés « dans des boîtes » à divers endroits de l’appareil.
Thales, fournisseur d’Airbus, a affirmé à l’AFP qu’il n’était pas responsable du problème. « La fonctionnalité dont il est question est portée par un logiciel qui n’est pas de responsabilité Thales », a-t-il précisé.
2 Comment cette défaillance a-t-elle été repérée ?
L’incident dont l’analyse a permis d’arriver à ces conclusions a eu lieu le 30 octobre sur un vol JetBlue entre Cancun (Mexique) et Newark, près de New York (Etats-Unis). Au-dessus du golfe du Mexique, l’avion A320 réalisant ce vol a soudainement piqué vers le bas, sans aucune intervention de l’équipage. Les pilotes ont alors amorcé la phase de descente puis atterri en urgence à Tampa, en Floride (Etats-Unis).
D’après l’administration fédérale de l’aviation américaine, citée par le New York Times, l’avion a perdu en altitude après avoir « rencontré un problème de commandes de vol ». Quinze à vingt personnes ont été conduites à l’hôpital après l’atterrissage d’urgence à Tampa, ont rapporté les pompiers de cette ville de Floride.
3 Quelles réparations vont avoir lieu après cette immobilisation ?
Dans son communiqué, Airbus assure avoir « collaboré activement avec les autorités aéronautiques pour solliciter des mesures préventives immédiates de la part des opérateurs, via une alerte de transmission aux opérateurs ». L’objectif, poursuit le constructeur aéronautique, est de « mettre en œuvre les protections logicielles et/ou matérielles disponibles », afin « de garantir la sécurité des vols ».
L’Agence européenne de sécurité aérienne a fait état d’une « vulnérabilité introduite par une mise à jour d’un logiciel dans l’un des ordinateurs de bord ». L’organisme a publié une directive de navigabilité d’urgence, qui « exige l’installation d’un Elac en état de marche et interdit l’installation d’un Elac affecté ». Les appareils affectés doivent ainsi « remplacer ou modifier chaque Elac concerné par un Elac en état de marche », avant tout prochain vol.
Le retour à une version précédente du logiciel doit permettre de résoudre rapidement le problème dans la plupart des cas, précise le New York Times. Une intervention a pu être réalisée dès vendredi, dans la nuit de vendredi à samedi ou samedi matin pour « plus de 5 000 appareils », d’après le ministre des Transports Philippe Tabarot. Sur BFMTV, le ministre a rapporté qu’une centaine d’Airbus A320 seraient plus durablement indisponibles, le temps de remplacer un logiciel défaillant. « On avait évoqué la possibilité sur un millier d’appareils. Il semble qu’on ne parle maintenant que d’une centaine d’appareils », a-t-il assuré. Air France a ainsi lancé toutes les mises à jour de ses A320 dans la nuit de vendredi à samedi, a déclaré à France Télévisions un porte-parole de la compagnie.
4 Quelles sont les conséquences sur le trafic aérien mondial ?
Airbus a reconnu dès vendredi que « des perturbations » auraient forcément lieu du fait de cette immobilisation et de ces réparations. Certaines compagnies sont particulièrement touchées : la société colombienne Avianca, par exemple, estime que 70% de sa flotte est concernée. Elle entrevoit des « perturbations importantes dans les dix jours à venir », et a suspendu les ventes de billets jusqu’au 8 décembre, selon un communiqué.
Aux Philippines, les compagnies locales Philippine Airlines et Cebu Pacific ont dû annuler plus de 40 vols, et ont proposé remboursement et changements de dates aux passagers affectés. Indigo et Air India, deux des principales compagnies aériennes indiennes, ont également prévenu de retards à cause de cette immobilisation. Aux Etats-Unis, United Airlines a recensé six appareils concernés et déclaré s’attendre à « des perturbations mineures sur quelques vols ».
En France, 35 vols ont été annulés vendredi soir au départ des aéroports français, dont une dizaine à Paris, ont appris l’Agence Radio France et France Télévisions auprès de Paris Aéroport et d’Air France. Samedi, « les perturbations sont très limitées » dans les aéroports parisiens. Air France a revu ses plans de vol, afin de pouvoir transporter tous ses passagers samedi, a déclaré à France Télévisions un porte-parole de la compagnie. Des passagers qui devaient voler à bord d’A320 ont ainsi été regroupés sur de plus gros avions. « Tous nos passagers du jour arriveront à destination, pas forcément à l’heure initialement prévue », a assuré Air France.
L’entreprise prévoit un retour à la normale dimanche, sauf pour les vols qui relient entre elles les destinations des Caraïbes, où les avions demandent une maintenance plus longue, selon cette source. Le trafic restera ainsi perturbé entre Cayenne (Guyane), Fort-de-France (Martinique), Pointe-à-Pitre (Guadeloupe), Saint-Domingue (République dominicaine) et Port-au-Prince (Haïti), précise la compagnie.