EN BREF • Le congrès de l’AfD en Allemagne a été retardé de deux heures par des manifestations contre l’extrême droite.
• Le parti a formé une nouvelle organisation de jeunesse, « Generation Deutschland », pour remplacer « Junge Alternative », dissoute pour extrémisme en 2024.
• L’AfD vise à lisser son image pour gagner en popularité, tout en maintenant des liens avec des mouvements d’extrême droite.
Des manifestations contre l’extrême droite ont obligé le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD) à retarder son congrès de deux heures, ce samedi 29 novembre. Ce congrès était destiné à former sa nouvelle organisation de jeunesse, dissoute en 2024.
Initialement prévu à 10h, heures locales à Giessen, près de Francfort, le congrès n’a commencé qu’aux alentours de midi car les militants de l’AfD peinaient à rejoindre la salle en raison des blocages de rues des manifestants contre la formation antimigrants et prorusse, un peu partout dans la ville, comme vous pouvez le voir dans notre vidéo en tête de l’article.
Un porte-parole de la police de Giessen, interrogé par l’AFP, a chiffré à 25 000 le nombre total de manifestants en cours de journée, alors que les organisateurs espéraient en rassembler 57 000. Certains lançaient des fumigènes, d’autres brandissaient des drapeaux arc-en-ciel ou des banderoles avec des slogans comme « combattre le fascisme ». La manifestation était encadrée par un important dispositif policier.
Les régionales dans le viseur de l’AfD
Arrivée deuxième aux législatives de février dernier, l’AfD se met en ordre de bataille avant une série d’élections régionales en 2026 qu’elle espère remporter, en particulier dans ses bastions de l’Est.
Ce parti avait dû dissoudre au début de l’année sa précédente organisation de jeunesse, « Junge Alternative » (Jeune Alternative), menacée d’interdiction pour son extrémisme. On lui reprochait la promotion d’idées xénophobes et divers scandales, allant du chant raciste à l’organisation d’entraînements paramilitaires.
Une centaine de participants étaient réunis par le parti pour désigner les cadres de sa nouvelle organisation de jeunesse, adopter ses statuts, choisir un nom et un logo. Le parti avait annoncé en attendre un millier.
« Ce pays est en difficulté. Et quelque chose doit changer », a déclaré Kevin Potthast, un électricien de 34 ans, de Steinfurt (ouest de l’Allemagne) rencontré par l’AFP au congrès. « Il est bien sûr important d’emmener les jeunes avec nous, parce que les jeunes sont l’avenir », a-t-il ajouté.
« Generation Deutschland » comme nouveau nom
La direction de l’AfD veut désormais une organisation de jeunesse nettement plus sous son contrôle, mais toujours en lien avec les mouvances les plus radicales.
Parmi la liste de noms proposés pour la nouvelle organisation, les délégués ont opté pour l’appellation la plus neutre : « Generation Deutschland » (Generation Allemagne, ndlr), plutôt que « Jugend Germania » (Jeunesse Germania) ou « Junge Alternative », le nom de l’ancienne organisation.
Les délégués ont désigné Jean-Pascal Hohm comme chef. Le jeune homme de 28 ans est déjà député régional du Brandebourg, un bastion de l’AfD dans l’Est.
L’AfD cherche à la fois à lisser son image pour gagner en popularité dans l’ouest du pays, où les électeurs répugnent, bien plus qu’à l’Est, à voter pour un parti lié à la fois à des néonazis et à la Russie.
Une image qui se veut plus lisse
Mais la nouvelle organisation « continuera à entretenir des contacts étroits avec d’autres milieux d’extrême droite et à coopérer avec eux », prédit auprès de l’AFP Fabian Virchow, professeur à l’université de Düsseldorf et spécialiste de ces mouvements. Les cadres du mouvement de jeunesse « proviennent d’un milieu d’extrême droite où se côtoient d’ex-militants du mouvement identitaire, des corporations étudiantes, ainsi que des individus issus du néonazisme et de groupes ethno-nationalistes ».
Irina Gildt, 28 ans, a déclaré à l’AFP qu’en participant à la manifestation contre l’AfD, elle souhaitait prendre position en faveur de la liberté d’expression et de la diversité, et montrer qu’elle ne se laissait pas intimider « par la peur ou la haine ». « Ça vaut bien de se lever tôt », a ajouté la manifestante, rencontrée à l’aube dans les rues de Giessen.
L’Allemagne, marquée par son passé nazi, a longtemps résisté à l’essor électoral de l’extrême droite. Mais la crise migratoire de 2015, puis des attaques islamistes et des crimes commis par des étrangers ont alimenté la popularité de l’AfD.