Par
Laure Gentil
Publié le
29 nov. 2025 à 17h22
Avec son béret sur la tête et son grand sourire, Sira respire la joie de vivre. Rien ne laisse transparaître l’adolescence difficile qu’elle a vécue, son voyage plein d’embûches de la Guinée-Conakry à la France, et la grossesse qu’elle n’avait pas du tout prévue. Après la naissance de sa petite fille, Sira a pu recevoir le soutien de l’association nantaise Marraine & Vous. Devenue « filleule », elle a retrouvé du lien social et a pu élever son enfant plus sereinement. Cette maman solo de 29 ans a accepté de raconter son histoire et son expérience à actu Nantes. Rencontre.
Elle fuit un mariage forcé
Sira a vu le jour en Guinée-Conakry, la seule fille d’une famille de 19 enfants. Sa mère était la première épouse de son père. Alors qu’elle n’avait que 16 ans, ce dernier décide de la marier en échange d’une somme d’argent mais sa mère refuse un tel destin pour sa fille. Discrètement, elle organise le départ de Sira pour la France.
Elle a dit : « Ma fille, elle ne va jamais vivre la même chose que moi ».
Sira
La mère de Sira ne dit rien à sa fille pour éviter que son projet ne s’ébruite. Sira est prévenue au dernier moment. Un passeur l’amène à Paris en échange de 10 000 euros, puis à Angers où elle est accueillie par une famille. Celle-ci la maltraite et refuse de l’envoyer à l’école comme promis à la mère de Sira. Une connaissance de cette famille, horrifiée par le traitement de la jeune fille, la conduit à Nantes. « Elle m’a déposé à la police. Ils m’ont placée en foyer ».
Ils m’ont demandé au foyer ce que je voulais faire. J’ai dit que je voulais réaliser le rêve de ma mère, que je voulais aller à l’école.
Sira
Un rêve qu’elle a réalisé. Les larmes lui montent aux yeux lorsqu’elle en parle. Il se passe trois ans avant qu’elle n’ait des nouvelles de sa mère restée au pays. Depuis, elles se sont retrouvées.
Entre-temps, une association, Parrain par milles, lui trouve une première famille marraine. « Ça s’est tellement bien passé qu’on est passé par une adoption simple ». Sira avait 17 ans. Lorsque sa famille adoptive part sur Pouliguen, elle décide de rester dans la cité des ducs. Sira devient aide-soignante.
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Ma vie en France, je ne pouvais pas rêver mieux.
Sira
Sira a récemment passé son entretien d’assimilation en vue d’obtenir la nationalité française et souhaite continuer ses formations pour devenir éducatrice : « J’ai été suivie par des éducateurs quand je suis arrivée, c’est un métier qui me tenterait. »
« C’était une surprise »
La grossesse est arrivée sans crier gare. « C’était une surprise », admet Sira. « Une surprise parce que déjà je n’étais pas en France. Je suis partie voir ma mère au pays, elle avait fait un AVC. Or, il y avait le Covid et le confinement ». Sira ne pouvait donc pas rentrer pour un avortement : « Je ne pouvais pas avorter en Guinée, je n’ai pas voulu prendre le risque. Je sais combien de femmes meurent durant un avortement. Je voulais faire ça en France ». Sira ne se voyait pas devenir mère, toute seule, à 24 ans. « Je n’étais pas prête », reconnaît-elle simplement.
Quand elle parvient enfin à revenir en France, il est trop tard : le délai légal est passé. « J’étais bouleversée, je n’étais pas bien », soupire la jeune femme. S’ajoute à cela que la grossesse est compliquée médicalement en raison de son anémie.
J’étais entre l’hôpital et la maison. Une semaine hospitalisée, deux jours à la maison.
Sira
L’accouchement est finalement déclenché et Sira donne naissance à une petite fille. « Ma mère adoptive était toujours là », raconte cette maman solo, émue. « Quand je suis sortie de l’hôpital, je suis partie directement au Pouliguen pour ne pas être seule ». Mais Sira doit rentrer sur Nantes pour son travail. Et là, la solitude est inévitable.
L’asso Marraine & Vous à la rescousse
« Quand je suis revenue à Nantes, la PMI (service de protection maternelle et infantile N.D.L.R.) m’a appelée et m’a parlé de Marraine & Vous », explique la jeune femme. Après un entretien avec l’association, on lui propose un match avec une famille. « Ils m’ont fait rencontrer Sarah et son mari Vianney ». Le sourire de Sira s’élargit lorsqu’elle parle du couple. « J’ai su sur le champs que ça allait bien se passer entre nous ».
Ils font des balades en bord de Loire, mangent ensemble… Lorsque Sira a changé d’appartement, ils l’ont aidé à déménager et à monter les meubles. Le couple et leurs enfants emmènent même Sira et sa fille en vacances sur la côte bretonne. Sira le répète à plusieurs reprises : « Ce sont des gens bien. »
Le soutien psychologique est indéniable pour cette maman solo. Sira travaille de nuit et a parfois besoin de repos. Sa famille marraine se propose alors souvent pour garder son enfant.
Il y a un vrai soutien ! Quand ça ne va pas, ils sont là tout de suite. C’est un soulagement pour moi.
Sira
Aujourd’hui, la petite fille de Sira a 5 ans et a « développé son caractère », la vie continue pour cette petite famille. La connexion avec la famille marraine est toujours aussi forte. « Je conseillerais toujours aux mamans solo d’avoir une famille marraine. »
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