La liste des manœuvre russes hybrides contre les pays européens est longue comme le bras : attaques informationnelles sur internet ou à Paris (« mains rouges » au mémorial de la Shoah, étoiles de David peintes sur des immeubles), drones survolant de nombreux aéroports, incursions aériennes et maritimes, ainsi que le sabotage d’un chemin de fer polonais utilisé pour livrer des équipements militaires à l’Ukraine. Le temps est peut-être venu de riposter, raconte Politico.
« Globalement, l’Europe et [l’OTAN] doivent se demander combien de temps elles sont prêtes à tolérer ce type de guerre hybride… [et] si elles devraient envisager de s’impliquer davantage elles-mêmes dans ce domaine », a récemment affirmé Florian Hahn, secrétaire d’État allemand à la Défense, interviewé par la chaîne Welt TV. Plus de 110 actions hostiles liées à la Russie ont été répertoriées en Europe entre janvier et juillet.
Fini de rire
Certes, l’Europe a déjà renforcé ses défenses. Mais elle a également dénoncé plus vivement que d’habitude les actions russes après le récent sabotage ferroviaire en Pologne. « Terrorisme d’État », a accusé le Premier ministre polonais Donald Tusk. Kaja Kallas, cheffe de la diplomatie européenne, a évoqué un « danger extrême » pour l’UE et appelé celle-ci à « apporter une réponse ferme ».
Il s’agit désormais de joindre le geste à la parole, selon certains responsables politiques et militaires. « Nous ne pouvons pas nous permettre d’avoir peur et de craindre une escalade. Nous devons rester fermes », a déclaré le général Michael Claesson, chef d’état-major suédois, dans une interview.
Le ministre italien de la Défense, Guido Crosetto, a récemment dévoilé un plan de riposte de 150 pages face aux opérations russes de déstabilisation. Il prévoit de créer un « Centre européen de lutte contre la guerre hybride », une « cyberforce » de 1 500 hommes, et de se doter de « militaires spécialisés en intelligence artificielle. »
Jusqu’où aller ?
« Cela soulève une question éthique et philosophique : les États régis par l’État de droit peuvent-ils se permettre d’utiliser les mêmes outils… et les mêmes stratégies que les Russes ? » relève le chercheur Kevin Limonier.
La ministre lettone des Affaires étrangères, Baiba Braže, suggère de franchir un cran dans les opérations cyber, à la fois pour mieux se renseigner et pour entraver la Russie. Selon Filip Bryjka, politologue et expert en menaces hybrides à l’Académie polonaise des sciences, des cyberattaques pourraient permettre de paralyser la production ou la logistique de l’effort de guerre russe.
Selon des responsables militaires et politiques européens, il faut également une coopération dans la « guerre de l’information », à condition que les actions puissent être « plausiblement niées », tout en attribuant et en dénonçant plus efficacement les opérations d’influence russes.
Enfin, pour montrer sa « puissance » et son « unité », l’OTAN pourrait « mener des exercices militaires surprises à la frontière russo-lituanienne ou estonienne », suggère Oana Lungescu, ancienne porte-parole de l’OTAN et chercheuse associée au Royal United Services Institute de Londres.