Comment est née l’idée de ce livre, Mers océans ?
L’éditrice m’a proposé ce livre, avec mes photos, sur le milieu maritime. Il ne s’agissait pas de faire quelque chose de technique, mais d’appréhender le rapport que chacun peut avoir avec ce milieu. Qu’est-ce qui nous attire vers la mer ? Pourquoi on va à la plage en été ? Pourquoi on aime voir des tempêtes en hiver ? Pourquoi on aime se promener le long du port ? Une relation qui concerne beaucoup de gens, et notamment ceux qui ne vivent pas sur la côte.
Et vous, d’où vient ce lien à l’océan ?
J’y suis arrivé par la navigation, par le bateau. Ma première relation à la mer, ça a été les vacances en Bretagne avec les parents, quand j’étais gamin. Notamment au Cabellou. C’est là que j’ai fait mes premières navigations. Une découverte d’un espace de liberté, d’ouverture.
Comment avez-vous pu faire cette sélection, sur une aussi longue carrière de photographe maritime ?
Il y a ici 25 ou 30 ans de photos. On en a sorti 200. Mais ça n’a pas été si compliqué. Aborder ce côté sensible de la mer, ça passe par l’esthétisme. On a envie que chaque photo ait un truc particulier. Il n’y en a pas tant que ça, des photos qui sortent du lot. J’ai fait une sélection large, que j’ai croisée avec celle de l’éditrice. Certaines photos dans le livre n’ont jamais été publiées.
Certaines photos de Benoit Stichelbaut illuminant ce livre n’avaient jamais été publiées. Comme celle de la couverture, prise sur la plage de Beg-Meil. (Le Télégramme/Olivier Desveaux)Des exemples ?
C’est le cas de la couverture, une photo prise sur la plage de Beg-Meil. Certaines sont plus évidentes. Comme l’Abeille Flandres dans la tempête. Il y a aussi des photos de chantiers, comme une, au Guilvinec, qui n’avait jamais été vue. Ou une du phare du Four. Des photos qui ont un petit truc en plus…
Il y a des photos qui ont été particulièrement difficiles à capturer ?
C’est le cas d’une photo du phare d’Ar-Men, dans la tempête, prise d’hélico. Quand on est passé au-dessus du raz de Sein, il y avait 55 nœuds de vent. On voulait se poser sur l’île, pour attendre le passage du front. Or, l’hélico ne peut pas se poser à plus de 60 nœuds. Il y avait des conditions de dingue. Le phare de la Vieille était sous l’eau. C’était fou de se dire que les conditions étaient exceptionnelles, et qu’on risquait de rater tout. Finalement, on a réussi à se poser et à redécoller. Ce qui fait à l’arrivée des photos qui sortent du lot.
Et d’autres pour lesquelles il a fallu patienter longtemps ?
Oui, comme une photo de l’île de Sein, par grand coefficient et tempête. Il m’a fallu trois ou quatre ans avant de pouvoir la faire. Ce n’est pas le genre de photo qui arrive par hasard.
Benoit Stichelbaut aborde ici, dans un très beau livre, la mer sous l’angle de l’esthétisme, à travers 200 de ses photos. (Le Télégramme/Olivier Desveaux)Y a-t-il une photo que vous n’avez jamais réussi à faire ?
Le phare de la Jument avec de très grosses vagues. Il m’est arrivé de faire les phares de la pointe d’Ouessant sous l’eau, sans qu’il ne se passe rien à la Jument.
Vous arrivez toujours à être surpris par la mer, même ici, en Cornouaille ?
Les lumières, la marée, les ambiances ne sont jamais les mêmes. Je découvre toujours la Bretagne. Aller à la pointe du Raz, un jour de tempête en hiver, sera toujours quelque chose d’extraordinaire.
Les textes sont d’Olivier Le Carrer. Comment les mots se sont-ils accordés avec les images ?
Le principe était clair avec lui : appréhender ce côté maritime d’un point de vue sensible qui passe par l’esthétisme. Il a monté ses chapitres en fonction des photos. En introduction, des termes de marine sont illustrés chacun par une photo. Puis c’est lui qui en a fait l’arborescence, autour de la côte, de tout ce qui est humain, de la respiration, de la navigation, des îles, avec un dernier chapitre sur la mer refuge. Faire un livre autour de l’esthétique de la mer, c’est aussi aider à mieux la connaître. Et mieux la connaître, c’est mieux la protéger. C’est notre petite pierre à l’édifice, qui passe par l’émotion.
Pratique
Mers océans, de Benoît Stichelbaut et Olivier Le Carrer, aux éditions Ouest-France. Lancement officiel du livre vendredi 5 décembre à 19 h à la librairie Albertine, en présence du photographe, qui pourra discuter tant du livre, de sa démarche que de sa pratique photographique. Réservation conseillée au tél. 02 98 74 82 43.