Face à la menace russe amplifiée par son récent rapprochement avec les États-Unis de Donald Trump, Friedrich Merz le futur chancelier allemand, demande à la France son parapluie nucléaire. « Il faut se préparer au pire scénario » d’après lui, c’est-à-dire d’une Otan dépourvue de la garantie de sécurité américaine. Donald Trump menace en effet régulièrement de se désengager d’une Organisation transatlantique qui lui coûte cher.
Or c’est elle qui assure la sécurité de l’Allemagne en première ligne face à Moscou avec d’autres pays d’Europe de l’Est non nucléaires puisqu’en Europe seule la France et la Grande-Bretagne disposent du feu nucléaire. C’est donc auprès de Paris et de Londres que Berlin se tourne pour sa défense face à une Russie qui n’exclue pas de recourir à une arme nucléaire tactique.
Quelle est la réponse française ?
Depuis l’époque du général de Gaulle, le nucléaire français se veut complètement indépendant. Son recours en cas de menace contre nos intérêts vitaux ne repose que sur un seul homme, le président de la République, et dans ce domaine, il y a continuité. « C’est Français et ça restera Français », a rappelé le 27 février Sébastien Lecornu, le ministre des Armées.
Pourtant, en 2020, le disruptif Emmanuel Macron avait mis en avant « la dimension authentiquement européenne de nos intérêts vitaux ». Cela laissait donc entendre que notre dissuasion nucléaire pourrait être utilisée en cas de menace sur l’Europe, ce qui est le cas aujourd’hui avec les ambitions russes en Ukraine et au-delà.
Quelle efficacité aurait un tel dispositif élargi à d’autres pays européens ?
Paris dispose de 290 têtes nucléaires, et même associé au 225 du Royaume-Uni, on est très loin des 3 700 pour les États-Unis. Se poserait donc la question de la crédibilité d’une telle force nucléaire conjointe or, vous le savez en matière nucléaire tout ou presque est affaire de perception et de psychologie.
La Russie prend très au sérieux les États-Unis, mais beaucoup moins Paris et Londres. Le parapluie nucléaire français ne peut être comparé à la dissuasion américaine. Celui-ci est incompatible avec la protection de l’ensemble du territoire européen.
Une autre limite à prendre en compte est que tous les pays du Vieux continent ne partagent pas la position de l’Allemagne. En plus, étendre notre parapluie nucléaire en Europe impliquerait de stocker des bombes hors de l’Hexagone, ce serait une perte de notre souveraineté inconcevable. Bref, l’Allemagne a relancé un vieux débat qui épouse celui d’une défense européenne commune, là-encore un vieux serpent de mer en politique.
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