C’est une première pour le centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne (CHITS) : une équipe du service ORL spécialisée en chirurgie maxillo-faciale vient d’opérer une jeune Laotienne de 20 ans, dans le cadre d’une très large mobilisation humanitaire impliquant plusieurs associations, dont l’ONG varoise Josy Chambon (1).
À peine une semaine après son arrivée en France, Mesa a bénéficié d’une lourde intervention de reconstruction de la mâchoire, une chirurgie complexe, impossible dans son pays, Le Laos.
« Elle avait été opérée il y a deux ans d’une grosse tumeur bénigne, rembobine le Dr Charles Collet, le chirurgien ORL qui l’a prise en charge à Toulon. Les médecins au Laos avaient procédé à l’exérèse d’environ un tiers de sa mâchoire et le choix de reconstruction s’était porté sur une solution simple, une prothèse sur-mesure, en titane. »
Malheureusement, cette prothèse a fini par s’exposer à la peau : elle l’a transpercée et elle est devenue apparente.
Une longue chaîne de solidarité
En 2024, l’ONG Enfants du Noma, basée dans la région de Lyon et Saint-Étienne, a repéré Mesa lors de l’une de ses missions au Laos, où elle envoie régulièrement des équipes procéder à des interventions de chirurgie orthopédiques maxillo-faciale pédiatrique.
Faute de plateau technique, l’intervention dont elle avait besoin était impossible sur place.

Contactées, deux autres associations ont alors pris le relais pour la faire venir en France : l’ONG Face au Monde, à Paris, a pris en charge le coût financier de l’intervention et du séjour hospitalier tandis qu’à Toulon, l’ONG Josy Chambon a payé et organisé le voyage et le séjour : visa, billets d’avion, transferts, assurances et hébergement.
« Mesa est arrivée le 10 novembre, une semaine avant l’intervention », raconte Émilie Lefeuvre, membre de l’ONG. Infirmière puéricultrice, elle s’est portée volontaire pour accueillir chez elle la jeune fille.
« J’ai pris contact avec elle trois semaines avant son arrivée, pour faire les présentations. Sa famille était très inquiète, plus d’ailleurs du voyage en avion que de l’intervention ! Ils avaient peur qu’elle se perde… À la maison, elle a pris très vite ses marques et entre les rendez-vous médicaux préparatoires, on a eu le temps de l’emmener voir la mer pour la première fois. » Puis le jour J est arrivé.
« J’ai eu du mal à la laisser seule à l’hôpital, elle a l’âge de mon fils ! C’est une belle expérience mais c’est compliqué émotionnellement. Je me fais autant de soucis que pour mon fils ! »
Une intervention à trois
Deux chirurgiens toulonnais se sont relayés lors de l’intervention : le Dr Alain Bizeau pour la dépose de l’ancienne prothèse et le Dr Charles Collet pour la reconstruction. Ils ont été assistés par le Dr Jean-Thomas Bachelet, le chirurgien ORL lyonnais qui avait repéré le cas de Mesa au Laos.
Tout s’est bien passé. « On a simplement du mal à savoir si elle souffre ou pas, s’inquiète Émilie Lefeuvre. Elle n’utilise pas la pompe à morphine. Mesa est très pudique, ne laisse pas paraître ses émotions alors c’est un peu compliqué. Heureusement, le directeur de l’hôpital a accordé un accès wifi gratuit illimité dans sa chambre, qui lui permet à la fois de donner des nouvelles à sa famille et d’utiliser une application de traduction pour communiquer avec les personnels soignants du service. »
Grâce aux dons récoltés par les ONG
Mesa ne repartira au Laos que le 24 décembre. « Un laps de temps suffisant pour éloigner tout risque de complication majeur » précise le chirurgien, ravi d’avoir pu concrétiser ce projet humanitaire grâce aux soutiens mobilisés.
« Une telle opération coûte cher. Le devis pour les seuls frais médicaux tourne autour de 15.000 euros. Avec ce budget, une ONG organise une mission et prend en charge, sur place, entre 50 et 60 patients. Il faut donc sélectionner rigoureusement ceux qui sont pris en charge en France : le traitement ne doit pas être possible sur place et il doit être d’emblée curatif. Si un suivi est nécessaire, par exemple dans le cas d’une tumeur cancéreuse, ce n’est pas possible. Enfin, précise-t-il, un tel élan de solidarité n’est possible que grâce aux dons récoltés par ces associations. »
C’est d’ailleurs pour mettre en valeur l’impact de la générosité des donateurs et le travail des bénévoles des ONG qu’il souhaitait raconter l’histoire de Mesa. Une jeune femme de 20 ans qui rentrera chez elle avec une mâchoire fonctionnelle.
1. Organisation non gouvernementale.
Un engagement de longue date
Depuis plus de 20 ans, l’Institut de Formation Public Varois des Professions de Santé (IFPVPS) initie ses étudiants de troisième année à l’action humanitaire, à travers un enseignement optionnel.
En 2017, d’anciens étudiants ont sollicité Josy Chambon, la directrice de leur ancien établissement, pour la création d’une ONG qui leur permettrait la poursuite de cet engagement humanitaire.
Association à but non lucratif reconnue d’utilité publique, l’ONG regroupe des professionnels de santé (médecins, dentistes, pharmaciens, manipulateurs radio, psychomotriciens, aides-soignants, auxiliaires de puériculture…) mais aussi des volontaires toutes professions confondues.
Ces membres interviennent bénévolement pour procéder à des interventions humaines et/ou matérielles lors de situations de crise ou d’urgence en France comme à l’étranger, pour dispenser des soins médicaux et d’hygiène aux populations défavorisées, pour former les volontaires dans les domaines de compétence des missions proposées par l’association ou pour contribuer à la coordination opérationnelle et à l’expertise professionnelle.
Chaque année l’ONG Josy Chambon organise cinq à six missions humanitaires, en Asie et en Afrique essentiellement. Entre 5.000 et 6.000 consultations sont ainsi dispensées à des populations précaires. Ces voyages sont aussi l’occasion d’apporter sur place des médicaments, du matériel médical, des fournitures scolaires et des vêtements et de proposer des formations, aux gestes de premiers secours par exemple.
>> Pour faire un don : https://www.ong-josychambon.org/fr