préservatifC’est la journée mondiale de lutte contre le SIDA, ce lundi 1er décembre. On fait le point avec le Dr Eric Billaud du CHU de Nantes, il préside le CORESS en Pays de la Loire, le Comité de coordination régionale de la santé sexuelle.

Parmi les patients chez qui on découvre une séropositivité, il y a des hommes qui ont des relations avec les hommes, contaminés vers la trentaine, et des migrants d’origine sub-Saharienne qui découvrent assez tard leur contamination au VIH faute de dépistage. Deux catégories qui représentent à plus de 80% les personnes atteintes de la maladie en Pays de la Loire.

 

L’évolution des pratiques sexuelles

 

Toutefois pour le Dr Eric Billaud, du CHU de Nantes, il y a aujourd’hui une diversification des pratiques sexuelles, et une augmentation du nombre de partenaires, notamment chez les plus jeunes. « Le problème, selon lui, c’est qu’il y a des hommes qui ne se considèrent pas comme homosexuels et qui pourtant ont de temps en temps ou rarement un rapport avec d’autres hommes, et qu’ils ne se considèrent pas comme homosexuels. Ils ne vont pas aller se faire dépister et ils risquent de vivre avec le virus pendant longtemps avant de commencer un traitement. Il faut donc éviter de parler des homosexuels parce que les gens, s’ils ne se retrouvent pas dans cette catégorie, ne pensent pas qu’ils ont pu prendre des risques.

L’ANRS, l’Agence nationale de recherche sur le sida, a commandité une étude sur la sexualité des Français et on constate qu’il y a de plus en plus de femmes qui ont des rapports avec des femmes, et d’hommes qui ont des rapports avec des hommes, et qui ne se considèrent pas pour autant homosexuels. »

Dr Eric Billaud du CHU de NantesDr Eric Billaud du CHU de Nantes

Crédit : Dolorès CHARLES

Pour le Dr Eric Billaud, le dépistage est diversement réalisé chez les populations à risque. « Le dépistage ne pose pas de problème chez les hommes qui ont des rapports avec des hommes, et qui se considèrent comme homosexuels parce qu’ils ont au sein de la communauté une communication autour de ce problème et ils se dépistent assez régulièrement. Ceci est d’ailleurs facilité par le fait qu’on peut avoir un dépistage sans ordonnance en allant dans son laboratoire d’analyse médicale directement. Pour les moins de 26 ans c’est remboursé à 100%, et pour les plus de 26 ans il y a un reste à charge qui peut être pris en charge par la mutuelle.

 

Un dépistage gratuit et sans ordonnance

 

En revanche, il y a un déficit clair de dépistage dans la communauté des migrants, et notamment des migrants subsahariens, sachant que les femmes par contre sont dépistées plus jeunes. Comme elles ont des grossesses, elles ont plus facilement accès au dépistage. »

Dr Eric Billaud du CHU de NantesDr Eric Billaud du CHU de Nantes

Le préservatif est là pour nous protéger mais il est moins utilisé, selon le Dr Billaud, car la maladie ne fait plus peur. « Il y a une perte d’utilisation du préservatif sur les dernières années, ce que prouve d’ailleurs l’enquête de l’ANRS, avec moins de gens qui utilisent le préservatif au premier rapport ou lors d’un changement de partenaire. »

 

Parce qu’on n’a plus peur du SIDA aujourd’hui, c’est ça la principale raison avancée ? « Je pense qu’on en parle de moins en moins, à part au 1er décembre, alors qu’il faudrait en parler toute l’année. Il faut parler des infections sexuellement transmissibles (IST), du papillomavirus, etc. Il y a toutes ces pathologies qui peuvent survenir et le préservatif protège de toutes ces maladies. »

Dr Eric Billaud du CHU de NantesDr Eric Billaud du CHU de Nantes

Il existe aujourd’hui, pas un vaccin, mais un traitement contre le SIDA, « simple, efficace et bien toléré » mais le virus peut toujours tuer sans prise de médicament et peut influer sur la vie des patients pour le Dr Billaud. « On est obligé de prendre le traitement toute sa vie. Et, si on projette de faire le tour du monde ou d’aller s’installer dans un autre pays, c’est une complication ou parfois une impossibilité. »

 

Un antibiotoque une fois par an, pour traiter le SIDA

 

A propos du vaccin, « il est peu probable qu’on en voit un dans les années qui viennent, ce d’autant qu’il y a des recherches pour trouver un médicament injectable une fois par an et qui permettrait d’éviter d’attraper le VIH, ce qui revient à vacciner une fois par an contre la grippe, contre le Covid. Mais ce n’est pas un vaccin, c’est un médicament, c’est un antibiotique. »

Le Dr Billaud préside le CORESS en Pays de la Loire (*), le Comité de coordination régionale de la santé sexuelle. Environ 630.000 personnes sont décédées de maladies liées au Sida l’an dernier, soit une diminution de 54 % depuis 2010 et de 15 % depuis 2020.

 

Des coupes budgétaires dénoncées par l’Onusida

 

Dans le même temps, l’Onusida a dénoncé les « conséquences des coupes budgétaires internationales de nombreux donateurs, et en particulier l’arrêt brutal des financements par les États-Unis ». L’an dernier, plus de 18 milliards de dollars étaient disponibles pour la riposte mondiale au sida, soit 17% de moins que les besoins annuels évalués d’ici 2030. Conséquence, des ruptures de stock de kits de dépistage du VIH et de médicaments ont été signalées dans des pays comme l’Éthiopie et la République démocratique du Congo (AFP).

 

(*) Depuis mars 2025, les COREVIH (Comités de coordination régionale de la lutte contre le VIH et les infections sexuellement transmissibles) ont évolué pour devenir des Comités de coordination régionale de la santé sexuelle (CoReSS).