Publié le
27 avr. 2025 à 17h36
« Cantat remercie Hurmic nous non ». Le collage est apparu dimanche 20 avril 2025 dans le quartier Saint-Michel à Bordeaux. La même nuit, d’autres collages sont apparus en rapport au meurtre de l’actrice Marie Trintignant dans la nuit du 26 au 27 juillet 2003, à Vilnius, par Bertrand Cantat. Et depuis, certains Bordelais s’interrogent : pourquoi le nom du maire de Bordeaux est associé à celui de l’ancien chanteur de Noir Désir ?
La raison est simple : Pierre Hurmic avait ouvert son cabinet d’avocat en 1984, une activité en suspend depuis qu’il a pris ses fonctions de maire. Et il a fait partie de l’équipe de la défense de Bertrand Cantat.
Dans le documentaire « De rockstar à tueur : le cas Cantat » diffusé sur Netflix, on voit même le maire de Bordeaux apparaître quelques secondes à l’écran, aux côtés de Krisztina Rády lors du procès de Vilnius. Il était alors « ami du chanteur de Noir Désir depuis une quinzaine d’années, et un proche de sa famille » écrivait à l’époque Le Parisien.
Un documentaire qui remet l’affaire sur le devant de la scène
Vue 1,9 million de fois rien que les quatre premiers jours, la série revient sur le meurtre à mains nues de Marie Trintignant, le procès au cours duquel Bertrand Cantat a été condamné huit ans de prison pour « meurtre commis en cas d’intention indirecte indéterminée », et le traitement médiatique de l’affaire, ainsi que du suicide de Krisztina Rády, la mère des enfants du chanteur.
Diffusé le 27 mars, le documentaire est toujours dans le top 10 des séries les plus vues sur la plateforme en France un mois après sa mise en ligne. Et si de nombreuses voix estiment toujours que Bertrand Cantat a purgé sa peine, la réception qui est faite au documentaire témoigne du changement de l’opinion publique sur les féminicides.
Briser le silence à Bordeaux
À Bordeaux, rares sont les personnes qui acceptent de parler publiquement de l’affaire. La mairie n’a d’ailleurs pas souhaité faire de commentaire auprès d’actu Bordeaux.
Les membres du collectif Collages féministes Bordeaux ont voulu « briser l’omerta qui règne à Bordeaux autour de Cantat, et rappeler qu’on n’oublie pas Marie Trintignant, ni Krisztina Rady ».
Cantat a voulu effacer Marie et Krysztina, nous les faisons réexister à travers les murs pour qu’elles ne soient jamais oubliées.
Collages féministes Bordeaux
Les quatre collages apparus dans le quartier où a évolué le chanteur plusieurs années lisaient : « Marie Trintignant Krisztina Rady ni oubli ni pardon », « Noir Désir Rouge Sang », « Cantat meurtrier hors de nos salles » et donc « Cantat remercie Hurmic nous non ».
Dimanche 20 avril 2025, le collectif Collages féministes Bordeaux a collé une série d’affiches en rapport à l’affaire Cantat. (©actu Bordeaux / Juliette Cardinale)
Le documentaire Netflix a « ravivé la colère » du collectif, certes. Si les membres mentionnent le rôle d’avocat du maire de Bordeaux, ce sont surtout ses propos à l’époque de la garde à vue de Bertrand Cantat qui sont utilisés pour justifier le collage le citant. « Il a dit en 2003 que Cantat n’était » pas un lâche « et un » être exceptionnel « », continue le collectif.
« Ce qui nous a poussé·es à coller, c’est de voir que Pierre Hurmic continue à se dire féministe tout en disant encore en 2023 qu’il faut » tourner la page « comme si les vies des femmes que Cantat a tuées ou poussées au suicide ne valaient rien », affirment les féministes. Rappelons que le maire de Bordeaux est un défenseur de la réinsertion sociale des condamnés pour une société apaisée.
Dimanche 20 avril 2025, le collectif Collages féministes Bordeaux a collé une série d’affiches en rapport à l’affaire Cantat. (©actu Bordeaux / Juliette Cardinale)
Mais les membres du collectif n’apprécient pas non plus que le nom de Pierre Hurmic soit omis dans l’affaire et ne veulent pas qu’il « s’en sorte en silence ». « Encore moins qu’il continue à se positionner comme un allié des luttes féministes, ajoute le collectif. Les murs de Bordeaux sont notre support pour mettre au jour ce qui est silencié dans cette affaire ».
Deux jours après les collages, ceux mentionnant directement Bertrand Cantat et Pierre Hurmic avaient déjà disparu des murs. C’est le cas de « beaucoup de collages nominatifs », précise le collectif. « Décoller n’effacera jamais les victimes de Cantat, et nous continuerons de coller leurs noms pour porter la voix qu’elles n’ont plus. »
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