On dit que c’est dans le besoin qu’on reconnaît ses amis. Fragilisé par un scandale de corruption, sous pression de l’administration américaine et de l’armée russe qui continue de grignoter le territoire ukrainien, Volodymyr Zelensky était ce lundi de retour à Paris. Objectif : mobiliser ses soutiens européens, alors que se négocie aux États-Unis le plan de paix qui sera soumis à la Russie. Moscou « ne doit pas être récompensé », a-t-il prévenu.

La première ébauche de ce plan, négocié secrètement par l’émissaire américain Steve Witkoff, et un financier proche du Kremlin, Kirill Dmitriev, constituait un alignement presque total sur les exigences de Moscou : abandon des Oblasts de Donetsk et Louhansk, cession des territoires occupés, renoncement de l’Ukraine à intégrer l’Otan, réduction de ses effectifs militaires… Une quasi-capitulation, que le président ukrainien n’avait pas osé rejeter de peur de brusquer Donald Trump, mais dont il avait proposé de réviser les termes. Le projet a depuis été retravaillé avec les Européens et les Ukrainiens. Depuis dimanche, des négociations bilatérales se déroulent en Floride entre l’administration Trump et une délégation de Kiev. Le négociateur ukrainien Roustem Oumerov a fait état ce lundi de « progrès significatifs » sur le projet, bien que des « ajustements » soient encore nécessaires.

L’émissaire américain attendu à Moscou

Les Européens n’en craignent toujours pas moins un plan qui soit défavorable à l’Ukraine, alors que Steve Witkoff est attendu mardi à Moscou par Vladimir Poutine. « Je crains que toute la pression soit exercée sur le côté le plus faible, car la reddition de l’Ukraine, c’est la manière la plus facile de mettre fin à cette guerre », a résumé la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas.

L’enjeu pour les Européens est donc de peser dans les discussions au côté de Kiev. « Il n’y a pas aujourd’hui à proprement parler un plan qui soit finalisé sur les questions des territoires. Il ne peut être finalisé que par le président Zelensky », a déclaré Emmanuel Macron à l’issue d’une rencontre avec son homologue à l’Élysée. « Sur la question des actifs gelés, des garanties de sécurité, de l’accession à l’Union européenne, des sanctions européennes, [ce plan] ne peut être finalisé qu’avec les Européens autour de la table. Donc nous sommes encore à une phase préalable », a ajouté le chef de l’État.

Sur le front, une pression qui ne faiblit pas

Les deux hommes se sont également entretenus avec le Premier ministre britannique Keir Starmer et plusieurs dirigeants européens (Allemagne, Pologne, Italie, Norvège, Finlande, Danemark, Pays-Bas), ainsi qu’avec les présidents des institutions européennes Antonio Costa et Ursula von der Leyen, ainsi que le secrétaire général de l’Otan Mark Rutte. « La rencontre a permis de faire avancer la concertation entre tous les Européens, de coordonner aussi nos vues avec les négociateurs et de rappeler l’importance de la mobilisation de tous pour une paix juste et durable », a souligné Emmanuel Macron.

Depuis le début de l’invasion russe, c’est la 10e visite en France de Volodymyr Zelensky. Il a également rapidement visité l’usine de Dassault Aviation en région parisienne, deux semaines après avoir signé une lettre d’intention pour acheter jusqu‘à 100 avions de combat Rafale, et est attendu ce mardi en Irlande pour sa première visite dans le pays.

Cette visite intervient alors que les forces russes continuent d’avancer au prix de lourdes pertes. Selon les données de l’Institut américain pour l’étude de la guerre (ISW), Moscou a pris en un mois 701 km² aux Ukrainiens, la deuxième avancée la plus importante après celle de novembre 2024 (en dehors des premiers mois de guerre où la ligne de front était très mobile).