126 milliards de dollars, soit 108 milliards d’euros environ : c’est la somme colossale allouée par la Russie à son budget militaire pour l’année 2025, alors que la guerre en Ukraine bat encore son plein (Le Point). Cela représente environ un tiers des dépenses publiques du pays et, comme le rapportait Courrier International, c’est 500 millions de dollars dépensés chaque jour pour essayer de mettre son voisin à genoux.

Problème : les réserves fédérales commencent à tirer la langue, et les récentes sanctions décidées par les États-Unis contre Rosneft et Lukoil, les deux géants domestiques du pétrole, détournent la Chine et l’Inde de l’or noir de l’Oural et risquent d’assécher un peu plus encore les coffres du pays.

Ainsi que le rapporte un article fouillé de The Telegraph, il reste pourtant une richesse sonnante, trébuchante et qui se porte particulièrement bien, que la Russie possède en quantité chez elle, qu’elle cherche à rafler depuis quelques années en Afrique, et qui lui sert quotidiennement à payer ses dépenses militaires : l’or, dont les cours tutoient les sommets et continuent de grimper sans pause (L’Opinion).

La Russie, cinquième réserve d’or du monde

« Entre 2006 et 2020, la Russie a amassé plus d’or que n’importe quel autre pays au monde », écrit le quotidien britannique. Qui note que cette frénésie d’achat comme de conservation de sa propre production domestique a fait du pays la cinquième puissance la plus riche en or du monde. Sa réserve est estimée à 2 326 tonnes, juste derrière la France qui en possède 2 437 tonnes, et loin derrière les États-Unis dont les coffres en recèlent 8 133 tonnes.

« L’or n’a jamais été si important pour la Russie », explique au Telegraph John Kennedy, expert de RAND Europe. « Pendant une longue période, elle a amassé de l’or et depuis l’invasion, elle l’utilise. L’or est crucial pour gérer des pressions économiques, qui comprennent un déficit budgétaire important et de nouvelles sanctions sur ses plus grandes firmes exportatrices de pétrole. La Russie est aussi intéressée par l’usage de l’or dans l’accès aux marchés internationaux. »

Comme le note le quotidien britannique, l’or est facile à transporter de manière discrète, on peut très simplement le fondre et dissimuler ses origines, permet d’acquérir simplement des devises étrangères, et est idéal pour payer ses emplettes dans un régime de sanctions strict. Ce que fait la Russie selon RAND, en payant directement en or d’autres États ou firmes – l’un de ces paiements a par exemple servi à acquérir le savoir-faire iranien en matière de construction de drones, et de l’or a servi à payer des armes à la Corée du Nord.

L’Afrique, réserve d’or de la Russie

Où la Russie trouve-t-elle tout cet or, qu’elle commence d’ailleurs à vendre pour financer son budget déficitaire ? Sur son propre territoire, d’abord : elle en produit 300 tonnes par an. Dans les pays où elle tisse son influence, ensuite, en particulier en Afrique.

« Les successeurs du groupe Wagner ont pris le contrôle de mines en République centrafricaine, où ils se sont créé une réputation de brutalité et de violence », écrit The Telegraph. Des hommes y sont parfois fusillés, d’autres sont emprisonnés dans des prisons de métal en plein soleil : l’or centrafricain de l’Africa Corps est plein de sang.

Au Burkina Faso, la société russe Norgold s’est récemment vue octroyer un nouveau permis d’exploitation, alors qu’elle contrôle déjà deux autres mines dans le pays (Jeune Afrique). La junte malienne, qui ces derniers temps se montre plutôt fragile, a également permis à une firme russe de bâtir une raffinerie d’or sur son territoire, qui pourrait traiter 200 tonnes par an et devenir centrale dans la région.

Ce ne sont que deux exemples de cette mainmise russe sur l’or africain. « L’extraction minérale est l’un des moyens par lesquels la Russie développe ses relations internationales », explique John Kennedy. « Nous avons vu qu’en temps de guerre, la Russie noue ces relations minérales et alors qu’elle est sous une pression occidentale grandissante, l’or prend une plus grande importance. »

Transitant parfois et discrètement par les Émirats arabes unis, aux côtés des cryptomonnaies, il est devenu l’un des moyens de paiement indispensables du Kremlin pour financer sa guerre en Ukraine, et la communauté internationale n’y peut pas grand chose.