Laurent Lafitte, acteur caméléon passé maître dans l’art de mêler comédie et drame, a promené son jeu singulier aussi bien au cinéma que sur les scènes les plus prestigieuses, jusqu’à devenir pensionnaire de la Comédie-Française. Pourtant, malgré cette palette déjà vaste, La Cage aux folles marque pour lui une première : incarner Albin/Zaza, personnage flamboyant et intime qui exige une véritable métamorphose. Entre héritage de Michel Serrault, fascination ancienne pour l’œuvre et plongée inédite dans un rôle performatif, Lafitte s’aventure ici sur un terrain qu’il n’avait encore jamais foulé – et qui redéfinit, une fois de plus, l’acteur qu’il est.

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Vogue. Comment avez-vous découvert La Cage aux folles ?

Laurent Lafitte. Le film, d’abord, quand j’étais gamin, doté du génie de Michel Serrault. Puis j’ai découvert la comédie musicale à Broadway, dans la reprise de 2010, puis à Londres et à Berlin. J’aime observer comment différentes productions abordent une même œuvre. Après nos discussions avec Olivier Py autour de La Cage aux folles, sur le tournage du Molière imaginaire, j’ai été ravi qu’il puisse me proposer ce projet à son arrivée à la tête du théâtre du Châtelet !

Albin/Zaza est un personnage performatif qui demande un vrai travail de transformation physique… en talons, n’est-ce pas ?

En talons, évidemment. Sinon, ce serait décevant ! En effet, c’est un rôle qu’on ne peut pas aborder à reculons. Si je n’ai jamais eu le fantasme du transformisme, j’envisage le travail des drag queens comme une forme théâtrale à part entière – passionnante. Une fois le spectacle terminé, Albin/Zaza reste sur scène. Mais cela reste un défi d’acteur ! Ce personnage est aussi déstabilisant, parce qu’il va à l’encontre de toutes les injonctions à la virilité qu’on reçoit en grandissant. Ne fût-ce que pendant la séance photo pour l’affiche, j’ai ressenti quelque chose de fort : presque un mélange de malaise et d’excitation. Et j’ai compris que cette expérience allait chercher des choses très intimes en moi, et qu’il n’y avait rien d’anodin…

Était-ce impressionnant de succéder à Michel Serrault ?

J’ai toujours été fasciné par Serrault, au point de penser qu’il était impossible de rejouer cette partition. Mais la version musicale permet de raconter autrement l’histoire, et donc d’aborder Albin sous un autre angle. On le réduit souvent à sa “follitude”, alors qu’il y a beaucoup plus : sa sensibilité, sa fragilité… Il fallait rester sincère sans tomber dans la caricature. Ce qui m’intéresse aussi, c’est la dualité. Car Zaza est le refuge d’Albin. La comédie musicale l’exprime très bien, notamment quand il chante qu’il entre dans son personnage à la fois comme dans un refuge
et sur un champ de bataille.

Olivier Py nous confiait il y a quelques mois que l’une des forces de La Cage aux folles, c’est sa résonance avec notre époque actuelle. Ce que vous avez, vous aussi, ressenti ?