Le label sur les médias, projet cher à Emmanuel Macron, n’est pas du goût de l’animateur phare de CNews. Dans son édito matinal ce lundi 1er décembre, Pascal Praud a fustigé la volonté d’instaurer un tel tampon, taclant «la tentation autoritaire du président».

De quoi lancer le débat, pour sûr. Pas certain cependant que l’animateur réactionnaire s’attendait à une réponse de la part de l’Elysée. Via une vidéo publiée ce lundi dans la soirée sur le compte X de la présidence de la République et repérée par le Parisien, les services de l’Elysée ont repris l’édito matinal de Praud. «Pravda ? Ministère de la vérité ? Quand parler de lutte contre la désinformation suscite la désinformation», lance ainsi l’Elysée aux équipes de CNews.

Le montage de l’Elysée démarre par une compilation des propos tenus à l’antenne, avec en lettres capitales surplombant l’extrait, la mention «Attention fausse information».

Une capture d’écran d’un tweet de Jordan Bardella qui s’inquiétait de ce projet de labellisation, fait alors suite aux captations des émissions de Pascal Praud. Invité sur le plateau de l’Heure des pros dimanche 30 novembre, le président du Rassemblement national a fustigé le projet de Macron, allant jusqu’à dire que «cette période qu’on est en train de vivre me rappelle le ministère de la vérité [d’Orwell] qui était chargé, non seulement d’effacer la mémoire, mais de réécrire l’Histoire», évoquant le récit dystopique de son œuvre 1984.

Chez d’autres politiques, de droite, la mesure envisagée indigne autant et on règle ses pas dans les pas du probable candidat RN à la présidentielle. Ainsi de l’ancien ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, l’ancien ministre de l’Intérieur et patron des LR, a dénoncé «une dérive inquiétante» dans un post sur X. Pour David Lisnard, maire de Cannes et président de l’Association des maires de France, partisan, comme l’éditorialiste de CNews, d’une union des droites pour la présidentielle, ce projet n’est rien d’autre qu’une «dérive liberticide particulièrement grave». Une campagne médiatique comme sait les orchestrer CNews et que l’Elysée range dans la catégorie «fake news». Mardi matin, Marine Le Pen, y est également allée de sa défiance, voyant dans la déclaration présidentielle une volonté «de maîtriser l’information».

Mais qu’a dit le Président en vérité ? Lors d’un déplacement à Arras mercredi 26 novembre, Emmanuel Macron avait salué l’initiative JTI, un label imaginé en 2018 par RSF pour améliorer la lutte contre la désinformation et auquel ont adhéré 115 médias français. Une «labellisation faite par des professionnels» des médias et non directement par l’Elysée, comme le rappelle enfin la vidéo partagée ce soir par ses services.

L’équipe de communication du Président n’a pas oublié de faire figurer en fin d’extrait les propos exacts tenus par le chef de l’Etat lors de son déplacement dans le Nord. «Ce n’est pas l’Etat qui doit vérifier. Si c’est l’Etat qui doit vérifier, là ça devient une dictature», y précisait justement Emmanuel Macron.

Ce n’est pas la première fois que les services de la présidence de la République utilisent les réseaux sociaux pour faire la chasse aux fausses informations visant des déclarations du chef de l’Etat. Mi-mai, des médias proches du Kremlin avaient assuré que le mouchoir blanc pris par Emmanuel Macron lors d’un trajet en train pour Kyiv était en vérité un sachet de cocaïne. De quoi motiver la com’de l’Elysée à partager une vidéo en guise de démenti. Quelques jours plus tard, l’affaire de la «gifle» assenée par Brigitte Macron à son mari lors d’une visite au Vietnam fait également l’objet d’un démenti par le compte X de l’Elysée.

Après la multiplication des sorties à droite et à l’extrême droite, le gouvernement a également réagi par la voix de sa porte-parole Maud Bregeon. En conférence de presse ce mardi matin, cette dernière a assuré que le Président n’avait «jamais» évoqué de «label d’Etat» ni de «ministère de la Vérité».

Mise à jour à 11h26 avec des précisions sur le label, la réaction de Marine Le Pen et celle du gouvernement.