Par

Léa Pippinato

Publié le

4 déc. 2025 à 6h08

« Chaque année, je me jure que je ne vivrai plus l’enfer du 24 décembre. » La phrase tombe net dans les allées du Polygone, à 17h, ce mercredi 3 décembre 2025. Elle sort de la bouche d’un père épuisé mais fier d’avoir déjà tout bouclé. Autour de lui, les décorations scintillent, la foule avance sans urgence. Pourtant, la course aux cadeaux vient à peine de commencer. Et quelques visiteurs affirment l’avoir déjà terminée, à contre-courant d’un pays qui adore frôler l’échéance.

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Au centre commercial, le flux monte doucement. Les bras se chargent et les conversations tournent autour de listes encore floues. Pourtant, derrière cette ambiance très classique de début décembre, une minorité annonce avoir tout prévu. D’après un sondage de l’institut YouGov pour Ankorstore en 2023, 64 % des Français avouent avoir acheté au moins un cadeau à la dernière minute ces trois dernières années. Le retard s’impose comme une habitude nationale. Les prévoyants, eux, deviennent presque une curiosité.

Justine, 29 ans, marche d’un pas léger. Son tote-bag ne contient presque rien. « Je n’ai plus rien à acheter. J’ai terminé début novembre », confie-t-elle. Elle glisse qu’elle suit une méthode stricte : une liste en octobre, un cadeau par week-end, des repérages tranquilles. « Mon père emballait ses cadeaux le 24 à minuit. Je détestais l’ambiance. Alors j’ai décidé de faire l’inverse. » Son organisation surprend souvent. L’hiver dernier, son manager l’avait taquinée lors d’une réunion : « Justine, c’est bon, t’as déjà fini tes cadeaux de Noël ? On est le 3 novembre, on s’inquiète… » Depuis, chaque début d’automne, ses collègues la consultent pour savoir quand ils doivent commencer leurs propres achats, et la jeune femme en rit encore !

Des raisons nombreuses, pas toujours rationnelles

Dans l’allée centrale, un retraité observe une vitrine de jeux. Il se contente de regarder. « J’ai fini mardi dernier. J’ai trois petits-enfants. Je préfère choisir calmement. » Il raconte un souvenir précis. Un soir de décembre, une file interminable, un jouet en rupture, un petit-fils déçu. « J’ai promis que cela n’arriverait plus. Depuis, je m’y prends tôt. » Ses arguments rejoignent une tendance générale. Pour près d’un Français sur deux (49 %), Noël crée un stress financier. Anticiper sert à lisser les dépenses. Cela évite aussi les foules massives et les déceptions.

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Quelques clients circulent encore tranquillement avant la montée du pic d’achats prévue mi-décembre.
Quelques clients circulent encore tranquillement avant la montée du pic d’achats prévue mi-décembre. (©Métropolitain / LP)

Salomé, 22 ans, sort d’une parfumerie. Un dernier sac lui manque encore. « Je ne suis jamais en avance. J’oublie toujours quelqu’un. » Cette année, elle a décidé de s’y prendre plus tôt. Elle voulait assurer l’achat d’un parfum très demandé. « L’an dernier, j’ai offert un bon d’achat imprimé sur du papier blanc parce que je m’y suis prise trop tard. J’ai eu honte. Cette année, j’ai dit stop. » À quelques mètres, Mathis avance avec une poussette. Sa fille dort. « J’ai tout acheté en octobre. Les jouets, les livres, même les piles », affirme-t-il. Il sourit. « Quand je vivais en colocation, je faisais partie de ceux qui se jetaient dans les magasins le 23. C’était drôle. Mais maintenant, avec un enfant, je refuse de courir. »

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Pour l’heure, les commerces respirent encore. Les prévoyants observent cette tranquillité comme un privilège. Dans deux semaines, ils regarderont la ruée avec un léger rictus. Ils auront leurs paquets, des soirées libres et peut-être même le temps de partager un chocolat chaud sans jeter un œil anxieux à une liste oubliée. Ceux qui attendront la dernière minute, eux, se promettront encore une fois de faire mieux l’année suivante. Un engagement qui, bien souvent, se dissout dans la frénésie du 24 décembre.

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