De là où nous sommes, cinquante kilomètres nous séparent de Michel Waksberg. Un ancien élu de Sarcelles (Val-d’Oise) qui, enfant, durant la Seconde Guerre mondiale, a passé les premières années de sa vie caché parce que juif.

Il est l’un des témoins dont on peut entendre et voir le récit grâce à l’application « Les derniers », qui vient d’être lancée par la région Ile-de-France, alors que l’on commémore cette semaine le 80e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz. Un outil à destination des lycéens, mais pas uniquement, qui met la géolocalisation au service d’un travail de mémoire.

Joseph Weisman, ancien déporté, a grandi dans le quartier des Abbesses à Paris. Esther Senot, emmenée à Auschwitz, raconte son histoire depuis Saint-Ouen-sur-Seine (Seine-Saint-Denis). Shelomo Selinger, artiste, a réalisé la sculpture du mémorial de Drancy (Seine-Saint-Denis).

L'application les Derniers permet de chercher via la géolocalisation des témoignages de rescapés d'Auschwitz.L’application les Derniers permet de chercher via la géolocalisation des témoignages de rescapés d’Auschwitz.

Ils font partie des derniers survivants des camps de concentration à avoir témoigné auprès de la réalisatrice Sophie Nahum dans la série documentaire « Les derniers d’Auschwitz ». Et « ils ne sont plus très nombreux », alerte-t-elle. C’est elle qui, en 2019, avait annoncé le décès d’Albert Veissid, autre rescapé, qu’elle avait pu filmer à Marseille quelques semaines plus tôt, pour ce projet.

« Une rencontre entre la tech et la mémoire »

« Elle a réussi à faire sortir l’histoire de la Shoah des manuels scolaires et des documentaires très classiques pour en faire quelque chose de vivant et beaucoup plus contemporain », salue le conseiller régional Pierre Liscia, délégué spécial chargé de la laïcité et de la citoyenneté.

L’application « Les derniers » a la même ambition, « en mettant cette mémoire dans la poche de tous les gamins d’Île-de-France et de France », explique Pierre Liscia.

Disponible gratuitement, elle a été soutenue financièrement par Philippe Corrot, le cofondateur de la licorne Mirakl, (une startup valorisée à plus d’un milliard de dollars, NDLR) « et c’est la première fois qu’on a une telle rencontre entre la tech et la mémoire », glisse le conseiller régional.

Bien au-delà de l’Île-de-France, elle emmène par exemple son utilisateur en Normandie, pour entendre le récit de Bernard Kanovitch dont les parents et la sœur sont morts à Auschwitz. L’utilisateur de l’application reçoit une notification, lorsqu’il approche d’un lieu de mémoire. « C’est un outil qui est relié au quotidien. Plus on touche de jeunes mieux ce sera », explique encore Pierre Liscia.

À 35 ans, il fait partie d’une génération qui a pu avoir accès, lors de sa scolarité, à des récits en « direct » de rescapés venus témoigner dans des classes. Mais le temps passe et les « derniers » s’envolent. L’application, qui donne aujourd’hui accès à 136 témoignages, a vocation à s’enrichir.