Combien de temps marcher par jour : la bonne mesure, pas le
mythe des 10 000 pas

Longtemps, le cap symbolique des 10 000 pas a
dicté nos objectifs d’activité, alors même que son origine tient
davantage au marketing d’un podomètre japonais qu’à un consensus
médical. Une récente salve d’études replace le curseur ailleurs :
non pas sur un total quotidien arbitraire, mais sur la façon de
marcher au quotidien. En clair, le corps réagit différemment selon
que l’on accumule des micro‑déplacements ou que l’on s’accorde un
vrai temps de marche continue.

Au Royaume‑Uni, des données portant sur 33 560 adultes de 40 à
79 ans, suivis plusieurs années, montrent qu’un schéma simple peut
déjà changer la donne pour le cœur. Chez les personnes peu actives,
un bloc de marche d’un seul tenant s’est révélé nettement plus
protecteur qu’une addition de petits trajets éparpillés. La suite
est contre‑intuitive et, bonne nouvelle, plus accessible qu’on ne
l’imagine. La clé tient en peu de minutes.

Marche continue : ce que montre l’étude UK Biobank sur 33 560
personnes

Les participants ont été répartis selon la durée de leurs
sorties quotidiennes, mesurées par podomètre : moins de 5 minutes,
5 à moins de 10 minutes, 10 à moins de 15 minutes, et au moins 15
minutes d’affilée. Après près de 9,5 ans de suivi, la mortalité
atteignait environ 4,4 % chez celles et ceux qui marchaient surtout
par tranches inférieures à 5 minutes, alors qu’elle chutait jusqu’à
près de 0,8 % dans les groupes aux marches plus longues. Même
tendance pour les événements cardiovasculaires : autour de 13 %
dans le groupe des marches très courtes contre près de 4,4 % chez
les personnes qui marchaient plus de 15 minutes d’un seul tenant.
« Nous avons tendance à mettre l »accent sur le nombre de pas ou la
quantité totale de marche, mais à négliger le rôle crucial des
schémas, par exemple ‘comment la marche est effectuée' », explique
Emmanuel Stamatakis, responsable du thème de l’activité physique au
Charles Perkins Centre, cité par Psychologies.

Dans ces travaux publiés dans les Annals of Internal
Medicine, la durée continue compte, au moins autant que le
volume total de pas quand on est en dessous de 8 000
pas
par jour. Un repère simple ressort : 15 minutes d’un
seul tenant représentent environ 1 500 pas, bien
loin du totem des 10 000. Et le message reste le même chez les
moins actifs, y compris sous 5 000 pas quotidiens : allonger la
durée de la marche quotidienne réduit le risque de décès et de
troubles cardiovasculaires, après prise en compte de facteurs comme
le tabagisme, l’obésité ou le cholestérol. « Cette étude montre que
même les personnes très inactives physiquement peuvent maximiser
les bienfaits pour leur santé cardiaque en modifiant leurs
habitudes de marche pour marcher plus longtemps, idéalement pendant
au moins 10 à 15 minutes par jour, lorsque cela est possible », a
déclaré le professeur Emmanuel Stamatakis, co‑chercheur principal
de l’étude.

Combien de minutes au quotidien pour rester en forme : les
repères concrets

Pour une personne sédentaire, le minimum utile et réaliste
consiste à installer une marche d’un seul tenant de 10 à 15
minutes
par jour, à une intensité modérée où l’on peut
parler mais avec un souffle un peu accéléré. Ce socle s’intègre
parfaitement aux recommandations de l’OMS et du NHS, qui
conseillent d’atteindre au fil de la semaine 150
minutes
d’activité d’intensité modérée. En pratique,
Harvard rappelle qu’environ 21 minutes quotidiennes s’associent à
une baisse d’environ 30 % du risque de maladie cardiaque.

Et puis, quand le quart d’heure devient confortable, on prolonge
à 20 minutes, puis on ajoute un second créneau les jours
disponibles. L’idée n’est pas de remplacer toute forme de mouvement
spontané, mais d’ajouter un repère simple et régulier qui porte ses
effets cardioprotecteurs. Sans viser 10 000 pas au quotidien,
beaucoup verront leur total grimper naturellement. Aujourdhui comme
demain, on garde à l’esprit que ces données restent
observationnelles et que l’habitude de marche a été mesurée au
départ seulement. En cas de douleur thoracique, d’essoufflement
inhabituel ou de vertiges, on s’arrête et on en parle à un
professionnel de santé.

Faut‑il viser 8 000 pas si on marche
déjà 15 minutes ?

Marcher 10 à 15 minutes d’affilée chaque jour n’empêche pas de
se donner un cap de pas si l’on aime ce repère. Les résultats
britanniques plaident pour un volume quotidien conséquent autour de
8 000 pas, qui s’atteint souvent quand on combine
un bloc continu et les déplacements du quotidien. Mais la priorité
reste le schéma : un bloc régulier, d’intensité modérée, mieux vaut
qu’un flot de micro‑trajets de moins de 5 minutes.

Faut‑il pour autant compter systématiquement chaque pas avec un
podomètre ? Non. Un simple minuteur suffit à caler ce rendez‑vous
quotidien avec soi, en conservant le critère le plus lisible au
jour le jour : le temps de marche continue et le ressenti d’effort.
Au fil des semaines, viser 15 à 20 minutes les jours de semaine et
un peu plus le week‑end permet d’approcher tranquillement les 150
minutes hebdomadaires, sans se laisser enfermer par le mythe des
10 000 pas ni par des objectifs difficiles à tenir
au long cours.