L’architecte américano-canadien Frank Gehry, disparu vendredi à 96 ans, laisse une empreinte unique sur l’architecture mondiale, dont il a bouleversé les codes en mêlant formes libres, matériaux détournés et innovations numériques. De Bilbao à Los Angeles, il a profondément remodelé le paysage urbain et culturel de plusieurs métropoles.

Né à Toronto en 1929 dans une famille juive ayant émigré aux Etats-Unis à la fin des années 1940, Gehry se forme à Los Angeles où il étudie l’architecture avant de changer de nom pour se prémunir de l’antisémitisme. Après un passage dans l’armée américaine et un cycle d’urbanisme à Harvard, il travaille chez Victor Gruen puis à Paris, chez André Remondet, avant d’ouvrir son propre cabinet au début des années 1960.

Des projets toujours plus complexes

A partir des années 1970, Frank Gehry s’impose comme l’une des voix les plus singulières de la scène californienne. Il adopte des matériaux du quotidien, explore les premières techniques de modélisation numérique et conçoit sa maison de Santa Monica, manifeste fondateur d’une approche qui détourne clôtures, bardages et structures pour en faire des éléments expressifs. Cette recherche formelle le conduit vers des projets toujours plus complexes, rendus possibles par la simulation informatique.

Sa reconnaissance internationale se cristallise en 1989 avec le prix Pritzker, puis en 1997 avec l’inauguration du musée Guggenheim de Bilbao. Ses courbes en titane, inspirées des mouvements d’un poisson, transforment la ville espagnole en destination culturelle mondiale. L’architecte Philip Johnson qualifiera l’édifice de « plus important édifice de notre temps », une appréciation qui contribuera à faire émerger la notion d’« effet Bilbao ».

Disney, Facebook et plein d’autres bâtiments

Porté par cette visibilité, Frank Gehry a multiplié les réalisations majeures : le Walt Disney Concert Hall à Los Angeles, le 8 Spruce Street à New York, la Fondation Louis Vuitton à Paris ou encore les bureaux de Facebook dans la Silicon Valley. Sa démarche atteint une forme d’extrême avec la clinique Lou Ruvo de Cleveland, où façades et ouvertures donnent l’impression de se déformer en cascade, un geste volontairement déstabilisant pour un lieu dédié aux maladies neurodégénératives.

Notre dossier sur l’architecture

Jusqu’à la fin, Frank Gehry aura repoussé les limites techniques et conceptuelles de son époque. Son œuvre, souvent décrite comme un brouillage assumé entre architecture et art, demeure l’un des marqueurs les plus visibles de l’évolution de l’architecture contemporaine.