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Aux Etats-Unis, cette décision sur le vaccin contre l’hépatite B laisse craindre le pire. (photo d’illustration de Donald Trump et son ministre de la Santé Robert Kennedy Jr.)
La nouvelle fait grincer les dents de nombreux soignants. Un groupe d’experts nommés par le ministre de la Santé vaccinosceptique de Donald Trump, Robert Kennedy Jr., a décidé ce vendredi 5 décembre de cesser de recommander le vaccin contre l’hépatite B à l’ensemble des nouveau-nés. Adoptée par huit voix contre trois, cette décision devrait être suivie par les autorités fédérales américaines et conduire à la fin de l’actuelle politique de prévention du pays, en vigueur depuis plus de 30 ans.
Selon la nouvelle recommandation, l’administration d’une première dose de vaccin contre l’hépatite B – sur trois – dans les premières heures de la vie d’un enfant ne serait plus systématiquement recommandée aux bébés dont la mère a été testée négative. Ce changement majeur a été immédiatement dénoncé par des associations de soignants comme injustifié et même dangereux.
Elles pointent notamment des failles dans le dépistage des mères aux États-Unis et de la possibilité que les nouveau-nés soient contaminés par d’autres personnes de leur entourage. Cela « entraînera une augmentation des infections par l’hépatite B chez les nourrissons et les enfants » a ainsi fustigé Susan Kressly, présidente de l’Académie américaine de pédiatrie.
La remise en cause d’une politique vaccinale datant de 1991
Le Comité consultatif sur les pratiques de vaccination (ACIP), entièrement remanié plus tôt cette année par le ministre vaccinosceptique Robert Kennedy Jr. a également recommandé qu’un test sérologique puisse être réalisé après une première injection pour évaluer la nécessité de doses futures. L’hépatite B est une maladie virale du foie qui peut notamment être transmise par la mère lors de l’accouchement et qui expose les personnes touchées à un risque élevé de décès par cirrhose ou cancer du foie.
La recommandation de vacciner l’ensemble des nouveau-nés, soutenue par l’OMS, avait été instaurée aux États-Unis en 1991 et a permis de quasiment éradiquer les infections chez les jeunes dans le pays, selon les autorités. En amont du vote, le docteur Cody Meissner, l’une des rares voix dissidentes du comité entièrement remanié par le ministre Robert Kennedy Jr, connu pour ses positions antivaccins, avait exhorté ses collègues à ne pas changer les recommandations en vigueur.
« En modifiant la formulation de cette recommandation, nous causons du tort », avait-il alerté. D’autres membres défendaient au contraire une mesure permettant d’aligner la politique vaccinale américaine sur celle d’autres pays comme la France, malgré les avertissements d’experts pointant les problèmes de surveillance et d’accès aux soins spécifiques aux États-Unis.
La décision ne fait pas l’unanimité chez les Républicains
Désormais composé de personnalités pour beaucoup critiquées pour leur manque d’expertise ou pour avoir relayé de fausses informations sur les vaccins, le groupe avait déjà modifié en septembre les recommandations vaccinales sur le Covid-19 et la rougeole. Il a également entrepris vendredi une révision plus large du calendrier vaccinal des enfants, des travaux auxquels a participé l’avocat américain Aaron Siri, un proche de Robert Kennedy Jr. connu pour avoir relayé comme lui des théories infondées sur le sujet.
Cette initiative suscite l’inquiétude au sein de la communauté médicale américaine, qui accuse le groupe de chercher restreindre les accès aux vaccins, alors même que les taux de vaccination du pays évoluent à la baisse depuis la pandémie et font craindre le retour de maladies contagieuses mortelles, comme la rougeole. En réaction, plusieurs institutions scientifiques américaines et États démocrates ont récemment annoncé cesser de suivre les recommandations de ce groupe et élaborer leurs propres directives.
Au sein même du Parti républicain, la décision de l’ACIP vendredi a fait des remous, le sénateur Bill Cassidy, médecin de formation, ayant exhorté sur X les autorités fédérales à ne pas la mettre en œuvre. Une fois adoptées, ces recommandations dictent la prise en charge ou non de certains vaccins par des assurances et programmes des vaccinations. Un détail qui compte dans un pays où le prix d’un seul vaccin peut s’élever à plusieurs centaines de dollars.