Surtout ne pas ciller. Au lendemain d’une nouvelle salve de critiques diplomatiques tous azimuts de l’administration américaine, l’Union européenne a choisi samedi de ne pas envenimer les choses, préférant souligner les convergences qu’accentuer le fossé avec les Etats-Unis. Le tout sur fond de négociations américaines pour mettre fin à la guerre entre la Russie et l’Ukraine sans que le Vieux continent ne soit impliqué.
«Bien sûr, il y a beaucoup de critiques, mais je pense que certaines d’entre elles sont également fondées», a ainsi expliqué la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, interrogée lors d’une conférence à Doha, au Qatar, sur la nouvelle stratégie de sécurité américaine, résolument nationaliste et anti-européenne. «Les Etats-Unis restent notre plus grand allié […]. Nous n’avons pas toujours été d’accord sur différents sujets, mais je pense que le principe général reste le même. Nous sommes les plus grands alliés et nous devons rester unis», a-t-elle ajouté.
Les Etats-Unis ont publié vendredi un document qui redéfinit leur «Stratégie de sécurité nationale» en ligne avec l’approche du président américain consistant à mettre «l’Amérique d’abord».
Le document s’en prend vivement aux Européens, soutenant les affirmations des extrêmes droites européennes selon lesquelles le Vieux continent est confronté à un «effacement civilisationnel» dû à l’immigration. Il met aussi en cause «son obsession infructueuse pour l’asphyxie réglementaire». Washington dénonce pêle-mêle les décisions qui «sapent la liberté politique et la souveraineté, les politiques migratoires qui transforment le continent et créent des tensions, la censure de la liberté d’expression et la répression de l’opposition politique, la chute des taux de natalité, ainsi que la perte des identités nationales.»
«Si les tendances actuelles se poursuivent, le continent [européen] sera méconnaissable dans 20 ans ou moins», prédit le document qui promet également qu’il n’y aura pas d’élargissement de l’Otan, anéantissant une fois de plus les espoirs de l’Ukraine qui subit l’invasion russe. «Imposer des restrictions et des contraintes à l’Ukraine ne nous apportera pas une paix durable, prévient Kaja Kallas samedi. Si l’agression est récompensée, elle se reproduira, non seulement en Ukraine ou à Gaza, mais partout dans le monde». A ses yeux, «l’Europe a sous-estimé son propre pouvoir. Vis-à-vis de la Russie, par exemple […] nous devrions avoir davantage confiance en nous».
Plus globalement, le texte confirme les grandes lignes de la politique étrangère américaine depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier. Les présidents américains publient généralement une présentation stratégique de ce type à chaque mandat. La dernière, publiée par Joe Biden en 2022, avait mis l’accent sur l’acquisition d’un avantage compétitif sur la Chine tout en limitant une Russie jugée «dangereuse».