La France insoumise n’écarterait pas une union des gauches au second tour des municipales de mars pour faire barrage à la droite, a évoqué le député Andy Kerbrat, alors qu’une liste concurrente proche de LFI pourrait voir le jour dans les prochaines semaines.
La petite phrase a soulevé bien des sourcils à Nantes, aussi bien chez les opposants de La France insoumise… que dans les propres rangs du mouvement, dans la Cité des ducs. À quatre mois des élections municipales, le député Andy Kerbrat (LFI) a indiqué, dans un entretien paru le 2 décembre dans le quotidien local Presse Océan, que la liste insoumise portée par William Aucant serait susceptible de rejoindre, au second tour, le groupe d’union écolo-socialiste formé autour de la mairie sortante, Johanna Rolland (PS). Envisagée en barrage à la droite, cette union ne pourrait cependant être validée qu’à la condition d’une place au futur conseil municipal, a ajouté l’élu. Jugée «défaitiste» par certains sympathisants, la sortie du député n’a pas manqué de faire réagir à Nantes, alors que d’autres mouvements radicaux ont profité des derniers jours pour avancer leurs propres pions.
Occupée à batailler sur les décorations de Noël avec le candidat des Républicains à Nantes, Johanna Rolland n’a pas réagi à la piste soulevée par Andy Kerbrat. Sa principale alliée, la cheffe des écologistes nantais, Marie Vitoux, a elle tendu la main aux Insoumis, pour «rassembler les forces de gauche». Prenant acte de la rencontre manquée pour le premier tour des élections, l’élue municipale – qui avait, par le passé, assuré des fonctions de campagne auprès d’Andy Kerbrat – a proposé à La France insoumise de «poursuivre les discussions autour de notre projet pour Nantes».
Le candidat de La France insoumise à Nantes, William Aucant (au centre), aux côtés de sa colistière Erika Cadersah (3e en partant de la gauche).
Simon Cherner, Le Figaro
L’invitation a cependant été écartée par la tête de liste insoumise à Nantes. «Il n’y a pas lieu de commenter aujourd’hui, au mois de décembre, des alliances hypothétiques alors que nous proposons un programme de rupture qui doit convaincre les électeurs», a balayé William Aucant, rescapé de plusieurs mois difficiles qui ont vu la campagne mélenchoniste vaciller, s’interrompre puis reprendre, enfin, malgré quelques troubles persistants en interne. «Il n’y aura donc aucune alliance automatique. Le programme primera toujours pour les Insoumis», a-t-il ajouté.
Sentiment d’abandon
Brouillonne, la séquence n’a pas manqué d’irriter le candidat de La France insoumise qui présentait, jeudi, le premier chapitre de sa campagne, baptisée «La nouvelle Nantes», centrée sur la lutte contre la ville chère, le racisme et les discriminations. «Notre liste, c’est la liste des gens qu’on oublie, qu’on laisse sur le côté, qu’on ne va plus chercher. Car ce qui est le plus frappant, quand on fait les porte-à-porte, c’est le sentiment d’être abandonné par la municipalité, le sentiment d’une précarité extrêmement forte», décrit William Aucant, en assumant, sans relâche, proposer un programme de rupture avec la majorité écolo-socialiste au pouvoir dans la Cité des ducs.
Margot Medkour (en bas à gauche), aux côtés d’Arnaud Kongolo, Victoria Pressigout et d’autres militants de Nantes populaire.
Simon Cherner, Le Figaro
Dans le sillon des Insoumis, d’autres formations veulent également croire à leur bonne étoile en mobilisant leur part d’habitants opposés à la droite, mais rebutés par le socialisme écologiste pratiqué par la mairie. C’est le cas, bien sûr, des traditionnelles – mais confidentielles – listes d’extrême gauche, Lutte ouvrière et le Nouveau parti anticapitaliste, qui ont annoncé cette semaine leurs candidats. Surtout, sur une ligne très proche de LFI, le mouvement Nantes populaire, formé à la rentrée autour de Margot Medkour, a déployé ses ailes en profitant des difficultés de la campagne insoumise.
En conférence de presse, l’ex-candidate, en 2020, de la liste citoyenne alors soutenue par LFI, a ainsi présenté mercredi une série de propositions sur la thématique du logement, en complément de mesures contre la vie chère et l’insécurité alimentaire précédemment mises en avant. Les prémices d’une campagne de plus, à la gauche de la gauche nantaise ? «L’essentiel, c’est de faire en sorte qu’il y ait des débats de fond dans cette ville, dans les prochaines semaines, pour qu’on n’ait pas l’impression de seulement avoir le choix entre Johanna Rolland et Foulques Chombart de Lauwe (le candidat de la droite, NDLR)», lance Margot Medkour, qui entretient le mystère sur une éventuelle candidature aux municipales déjà qualifiée d’«aventure personnelle», dans l’état-major de la campagne insoumise. «Quel est l’intérêt, pour les classes populaires, d’avoir une candidature de plus ?», y souffle-t-on, sans enthousiasme. Le premier tour des élections municipales aura lieu le 15 mars 2026.